Comptes rendus

Le bon usage des antibiotiques et le rôle des agents à large spectre
Les algorithmes de traitement de la MPOC en pleine évolution

UPLIFT : De nouvelles données à l’appui d’un traitement d’entretien

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence internationale de l’American Thoracic Society

San Diego, Californie / 15-20 mai 2009

Malgré le vaste arsenal de médicaments qui atténuent les symptômes de la MPOC, le soulagement des symptômes n’avait jamais été relié à une amélioration objective de l’issue clinique à long terme avant la publication des résultats de l’étude UPLIFT (Understanding Potential Long-term Impacts on Function with Tiotropium) l’année dernière (Tashkin et al. N Engl J Med 2008;359:1543-54). Cette étude a confirmé qu’un traitement anticholinergique d’entretien peut améliorer plusieurs paramètres cliniquement pertinents, notamment la fonction pulmonaire et la qualité de vie, sur une période d’au moins quatre ans.

Population jamais traitée

L’analyse du sous-groupe des patients jamais traités au départ a permis d’établir qu’un traitement anticholinergique pouvait être administré en première intention, les bénéfices observés chez ces patients ayant été comparables aux bénéfices observés au sein de la population entière de l’étude. «Lorsque [le tiotropium], un anticholinergique, est utilisé comme traitement d’entretien, il contribue au mieux-être du patient à long terme», souligne le Dr Thierry Troosters, Département de la rééducation, Université catholique de Louvain, Belgique. Lorsqu’il a présenté les données de l’analyse du sous-groupe des patients qui avaient été admis à l’étude sans avoir d’abord été traités, le Dr Troosters a expliqué qu’elles ajoutaient du poids aux données montrant que l’anticholinergique est un traitement de première intention. Au terme des quatre années de l’étude, la fonction pulmonaire et la qualité de vie s’étaient améliorées chez les patients jamais traités au départ qui avaient reçu l’anticholinergique aléatoirement, au même titre que chez l’ensemble des patients sous anticholinergique, même si les patients du groupe témoin étaient autorisés à prendre, au besoin, n’importe quel autre médicament à part un anticholinergique pour soulager leurs symptômes.

Les 810 patients jamais traités auparavant représentaient environ 14 % des 5993 sujets de l’étude UPLIFT. Le sous-groupe sous traitement actif (403 patients recevant 18 µg de tiotropium une fois par jour) et le sous-groupe témoin (407 patients sous placebo) étaient de taille similaire. Il n’y avait aucune différence significative entre ces sous-groupes quant aux caractéristiques initiales. À cet égard, en fait, les patients jamais traités auparavant étaient presque identiques à l’ensemble de la population UPLIFT. Au départ, les patients présentaient un volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) de 53 %. Environ 40 % des sujets fumaient toujours. La majorité des patients jamais traités auparavant souffraient d’une MPOC de stade II selon la GOLD (Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease); un nombre moindre de patients en étaient au stade III et quelques patients en étaient au stade IV.

Cette analyse avait pour but de déterminer si le tiotropium était un choix efficace comme traitement d’entretien initial, même chez des patients encore jamais traités. Les résultats ont objectivé des bénéfices comparables à ceux de la population entière sur les plans des paramètres objectifs et de la qualité de vie. Au fil des quatre années de l’étude, le VEMS a baissé de 42 mL/année dans le sous-groupe tiotropium vs 53 mL/année dans le sous-groupe placebo (p=0,026). Au terme du traitement, sur le plan de la vitesse du déclin de la capacité vitale, l’écart entre les deux sous-groupes en faveur du tiotropium s’apparentait à l’écart entre les deux groupes complets. Au terme de l’étude, le VEMS minimum était supérieur de 134 mL dans le groupe tiotropium.

Protection contre le déclin de la fonction respiratoire

La protection contre le déclin de la fonction respiratoire s’est reflétée dans l’évaluation de la fonction pulmonaire (score total au SGRQ [St. George’s Respiratory Questionnaire]) et celle de la qualité de vie. D’après le SGRQ, dans lequel un écart de 4,0 unités était considéré comme un avantage cliniquement important, l’avantage du tiotropium est demeuré significatif à partir de la deuxième année, et l’écart se chiffrait à 4,6 unités après quatre ans (p<0,001). Sur le plan de la qualité de vie, l’avantage relatif le plus marqué du traitement actif par rapport au placebo concernait l’activité, sans doute la mesure la plus importante du bénéfice associé au médicament. Comme dans le cas du SGRQ, le graphique de la qualité de vie montrait une divergence précoce entre les courbes, et l’avantage en faveur du tiotropium s’accentuait graduellement, mais de façon constante au fil du temps. Après quatre ans, au chapitre de la qualité de vie, l’écart entre les groupes était hautement significatif quant à l’impact de la maladie (p=0,004) et à l’activité (p<0,001).

Le risque d’exacerbation a diminué de 15 % au fil du suivi, mais l’écart n’a pas atteint le seuil de significativité statistique (p=0,07). Cependant, on a observé une réduction relative de 23 % du risque d’hospitalisation pour cause d’exacerbation en faveur du traitement actif (p=0,012).

En outre, la probabilité qu’un traitement soit ajouté au traitement en cours, comme un bêta-agoniste à longue durée d’action ou un corticostéroïde en inhalation, a été réduite de 28 % (p<0,01). Ce résultat a été considéré comme particulièrement pertinent chez les patients qui n’avaient encore jamais été traités.

«La diminution de la probabilité qu’un traitement d’entretien soit ajouté est à mes yeux le résultat le plus important de cette étude», affirme le Dr Troosters. Dans le contexte des avantages du tiotropium au fil du suivi, «ce résultat plaide en faveur de l’efficacité du tiotropium en première intention».

Comme dans l’article qu’il a signé, le Dr Troosters s’est montré prudent quand il a parlé de diminution de la mortalité sous tiotropium. Selon les résultats globaux de l’étude UPLIFT, le taux de risque (hazard ratio [HR]) de mortalité toutes causes confondues se chiffre à 0,89 (IC à 95 % : 0,79 à 1,02) si l’on tient compte dans l’analyse de la période post-randomisation de 30 jours pendant laquelle les deux groupes recevaient 40 µg d’ipratropium quatre fois par jour (étape conçue pour confirmer les différences soutenues dans la fonction respiratoire après le traitement par le tiotropium). Lorsqu’on a comparé les deux groupes quant au taux de mortalité au terme de la période avec randomisation, la diminution de 13 % (HR de 0,87; IC à 95 % : 0,76-0,99; p<0,05) atteignait le seuil de significativité statistique. Dans le sous-groupe des patients jamais traités auparavant, une tendance à la baisse similaire s’est dégagée sur le plan de la mortalité (HR de 0,74; IC à 95 % : 0,50-1,10).

Bénéfices dans le sous-groupe des fumeurs

Selon une autre analyse de sous-groupe de l’étude UPLIFT, les fumeurs ont également bénéficié d’une amélioration durable de la fonction pulmonaire et d’une meilleure qualité de vie. Le Dr Donald P. Tashkin, professeur émérite de médecine, directeur médical, division des soins pulmonaires et intensifs, David Geffen School of Medicine, University of California, Los Angeles, a expliqué que son équipe avait évalué les effets du traitement chez les 846 patients qui disaient avoir continué de fumer et les 3534 patients qui étaient demeurés abstinents (les fumeurs intermittents ont été exclus de l’analyse). Comme on pouvait s’y attendre, le déclin du VEMS était nettement plus rapide chez les fumeurs (59 mL/année vs 36 mL/année), mais la pente du déclin était significativement moins raide chez les patients sous tiotropium que chez les patients sous placebo dans les deux sous-groupes.

«Le bénéfice du tiotropium par rapport au placebo était très comparable chez les fumeurs et les non-fumeurs, tant sur le plan de l’amélioration soutenue de la fonction pulmonaire que sur celui de la qualité de vie liée à la santé. Nous avons aussi constaté que, comparativement au placebo, le tiotropium protégeait mieux les patients, à la fois les fumeurs et les non-fumeurs persévérants, contre le risque d’exacerbation», rapporte le Dr Tashkin.

Ce dernier et le Dr Troosters insistent tous deux pour dire qu’en raison de sa taille et de sa portée, cette étude apporte les données nécessaires à l’élaboration d’une démarche rationnelle pour le choix d’un traitement d’entretien initial chez un patient atteint de MPOC. Dans les discussions qui ont suivi les deux présentations, l’auditoire a demandé si d’autres bronchodilatateurs, surtout les bêta-agonistes à longue durée d’action, pouvaient offrir les mêmes bénéfices. Ces deux médecins et d’autres, dont le Dr Bartolome R. Celli, chef de la division de pneumologie, de médecine intensive et de médecine du sommeil, Elizabeth’s Medical Center, et professeur titulaire de médecine, Tufts University School of Medicine, Boston, Massachusetts, ont répondu qu’ils ne pouvaient se prononcer sans avoir de données comparatives en main.

«L’étude UPLIFT montre que le tiotropium administré une fois par jour modifie l’évolution naturelle de la MPOC, indique le Dr Celli. Il s’agit là d’une donnée importante que nous n’avions pas auparavant, et je pense qu’elle dictera la conduite à tenir.»

Résumé

De nouvelles données de l’étude UPLIFT ont renforcé les résultats initiaux. Sur une période d’au moins quatre ans, le tiotropium administré une fois par jour a permis de ralentir le déclin de la fonction pulmonaire et de la qualité de vie et de diminuer le risque d’exacerbation chez l’ensemble des patients de l’étude, y compris chez les patients qui n’avaient jamais été traités auparavant. La tendance à la baisse du taux de mortalité – qui n’a pas atteint le seuil de significativité statistique – s’ajoute aux données montrant que le soulagement des symptômes grâce à cet agent modifie des paramètres importants de l’issue à long terme. Les résultats de l’étude UPLIFT – qui sont les premières données probantes à l’appui d’un traitement d’entretien par le tiotropium – ont préparé le terrain pour que l’on détermine quels autres agents on pourrait ajouter au traitement pour ralentir davantage la progression des symptômes.

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