Comptes rendus

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L’importance de la cicatrisation de la muqueuse dans la colite ulcéreuse

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 45e Assemblée annuelle de l’Association canadienne de gastroentérologie Semaine canadienne des maladies digestives 2007

Banff, Alberta / 16-20 février 2007

Dans le cadre de la semaine canadienne des maladies digestives, un certain nombre de spécialistes ont présenté des données issues des essais 301 et 302 sur la préparation de SPD476 à matrices multiples (MMX). Cette préparation de 5-ASA (mésalamine) est présentée dans un comprimé novateur à forte dose (1,2 g) et à monoprise quotidienne dont l’enrobage est une pellicule gastrorésistante (l’objectif étant de retarder la libération du principe actif jusqu’à ce que le pH soit supérieur à 7, ce qui est normalement le cas dans l’iléon terminal). Lorsqu’elle est exposée au liquide intestinal, la matrice hydrophile du noyau se gonfle et se transforme en masse gélatineuse, laquelle se défait dans le côlon en fragments qui libèrent le médicament. Une deuxième matrice parsemée de 5-ASA, la matrice lipophile, vient encore ralentir la dissolution de l’agent.

Cicatrisation complète de la muqueuse

Chez les patients en rémission clinique, une cicatrisation incomplète de la muqueuse – par comparaison à une cicatrisation complète – a été liée à un taux plus élevé de poussées dans la colite ulcéreuse (CU).

Comme le souligne le Dr William Sandborn, professeur titulaire de médecine, clinique des maladies inflammatoires de l’intestin, Mayo Clinic, Rochester, Minnesota, un traitement par le 5-ASA MMX d’une durée pouvant atteindre huit semaines induit efficacement une cicatrisation complète de la muqueuse chez environ le tiers des patients souffrant de CU active légère à modérée. Par rapport au placebo, ce traitement réduit aussi substantiellement la proportion de patients chez qui la sigmoïdoscopie met en évidence des lésions modérées ou sévères, note-t-il.

Le Dr Sandborn a cité une analyse de la cicatrisation complète de la muqueuse (c.-à-d., baisse du score de la sigmoïdoscopie à 0) sous mésalamine, analyse qui reposait sur les données colligées des essais SPD476-301 et -302. Ses collaborateurs et lui-même ont examiné les données de cicatrisation complète de la muqueuse à la suite du traitement chez les patients souffrant de CU active légère à modérée. Les sujets de ces études recevaient le traitement actif à raison de 2,4 g/jour une ou deux fois par jour (comprimé de 1,2 g) ou de 4,8 g/jour (une fois par jour dans les deux études), ou un placebo. Le critère d’évaluation principal de l’étude était la rémission clinique et endoscopique à huit semaines. Pour les besoins de l’analyse, la cicatrisation de la muqueuse (mesurée par sigmoïdoscopie) était évaluée après huit semaines ou au moment de l’abandon prématuré. Après une période pouvant atteindre huit semaines, le taux de cicatrisation complète de la muqueuse était plus élevé chez les sujets recevant 2,4 g/jour (55/172 [32,0 %]) et 4,8 g/jour (56/174 [32,2 %]) que chez les témoins (27/171 [15,8 %]). Il s’agit là d’un résultat important, car la rémission endoscopique est un meilleur facteur pronostique que la rémission clinique.

Effet de l’âge sur l’issue clinique

Lors d’une seconde analyse rétrospective des essais SPD476-301 et -302, le Dr Sandborn et ses collaborateurs ont évalué l’effet de l’âge sur l’issue clinique. Ils ont constaté que le traitement actif induisait efficacement une rémission clinique et endoscopique chez les patients souffrant de CU active légère à modérée, peu importe leur âge.

Les sujets ciblés par cette analyse avaient reçu la mésalamine MMX à raison de 2,4 g/jour en une ou deux prises par jour (comprimé de 1,2 g) ou de 4,8 g/jour (une fois par jour dans les deux études), ou un placebo. Le critère d’évaluation principal était la rémission clinique et endoscopique après huit semaines, selon des critères stricts (indice modifié de l’activité de la CU £1, score de 0 pour les rectorragies et la fréquence des selles, absence de friabilité de la muqueuse et baisse de ³1 point du score de la sigmoïdoscopie par rapport au score initial). Chez les patients de moins de 55 ans, les chercheurs ont observé des taux de rémission significativement plus élevés après un traitement à 2,4 g/jour (51/143 [35,7 %]; p<0,001) et à 4,8 g/jour (48/138 [34,8 %]; p<0,001) qu’après l’administration d’un placebo (24/138 [17,4 %]). Chez les patients de 55 ans et plus, les chercheurs ont noté des augmentations semblables du taux de rémission dans les groupes 2,4 g/jour (13/29 [44,8 %]) et 4,8 g/jour (13/36 [36,1 %]) par rapport au groupe placebo (6/33 [18,2 %]); cependant, en raison du petit nombre de patients dans ce groupe, seule la différence entre la dose de 2,4 g/jour et le placebo a atteint le seuil de signification statistique (p=0,02). Une analyse de régression logistique a confirmé l’absence d’interaction significative entre l’âge et le traitement (p=0,801), rapporte le Dr Sandborn.

Cicatrisation de la muqueuse mesurée à l’endoscopie

Les essais ASCEND (Assessing the Safety and Clinical Efficacy of a New Dose of 5-ASA) I et II étaient des études de phase III multicentriques, randomisées et à double insu ayant pour objectif d’évaluer l’efficacité d’un traitement par la mésalamine chez des patients souffrant de CU. Les chercheurs ont colligé les données recueillies chez 423 patients admissibles dont la CU avait une activité modérée.

Le Dr Gary Lichtenstein, directeur du programme des maladies inflammatoires de l’intestin et professeur titulaire de médecine, University of Pennsylvania, Philadelphie, et ses collaborateurs ont tenté d’évaluer, sur une période de six semaines, l’effet de la mésalamine orale à libération retardée (4,8 g/jour vs 2,4 g/jour) sur la cicatrisation de la muqueuse mesurée à l’endoscopie en présence d’une CU modérément active. La cicatrisation de la muqueuse se définissait comme un sous-score de 0 ou 1 à l’endoscopie.

Après à peine trois semaines, sans égard à la dose, le traitement a permis une cicatrisation de la muqueuse à l’endoscopie chez >50 % des patients, ajoute-t-il. Par comparaison au traitement administré à raison de 2,4 g/jour, le traitement amorcé à 4,8 g/jour a permis une amélioration significative de la cicatrisation de la muqueuse mesurée à l’endoscopie chez les patients dont la CU était modérément active, de conclure le Dr Lichtenstein.

Corrélation entre la cicatrisation de la muqueuse et la réponse au traitement

Le Dr David Rubin, professeur adjoint de médecine, University of Chicago, était l’investigateur principal d’une étude sur la corrélation entre la cicatrisation de la muqueuse mesurée à l’endoscopie et la réponse au traitement par la mésalamine orale à libération retardée administrée à raison de 4,8 g/jour et de 2,4 g/jour chez des patients dont la CU était modérément active.

La cicatrisation de la muqueuse se définissait comme un score de 0 ou 1 à l’endoscopie, et l’évaluation du patient était fondée sur l’échelle PFA (Patient Functional Assessment) en quatre points (de 0 à 3), précise le Dr Rubin. Étaient ciblés par cette analyse 391 patients atteints d’une CU modérément active dont le score initial sur l’échelle PGA (Physician’s Global Assessment) était de 2 et dont le sous-score initial à l’endoscopie était ³2. Globalement, après six semaines, 67 % des patients souffrant de CU modérée chez qui le traitement avait réussi bénéficiaient aussi d’une cicatrisation de la muqueuse (coefficient kappa=0,6938). Ce résultat était systématique sans égard à la dose quotidienne. Un score de 0 à l’endoscopie est en soi faiblement corrélé avec la réussite du traitement, quoique cette corrélation soit meilleure après six semaines qu’après trois semaines (coefficients kappa=0,2252 et 0,1176, respectivement).

La réussite du traitement d’une CU modérément active par la mésalamine est associée à une amélioration de l’intégrité de la muqueuse dans un délai d’à peine trois ou six semaines, rapporte le Dr Rubin, soulignant qu’il n’y a pas de lien entre l’amélioration à l’endoscopie et le score PFA. D’autres études visant à évaluer l’amélioration de la muqueuse à l’endoscopie s’imposent, estime-t-il.

«Nous croyons vraiment que l’apparence de la muqueuse est une issue importante du traitement et qu’il sera bientôt démontré de façon mieux définie que la cicatrisation de la muqueuse est en fait associée à une amélioration de l’issue à long terme, explique le Dr Rubin. Ces études ne sont qu’un commencement. Elles ont une portée limitée à cet égard, mais elles nous apportent néanmoins d’importants éléments d’information.»

Résumé

«La cicatrisation de la muqueuse est une notion qui n’a pas encore d’application dans la pratique clinique. Afin que cette notion atteigne la pratique clinique, nous avons besoin de données supplémentaires montrant que la cicatrisation de la muqueuse est associée à un bénéfice à long terme et il nous faut trouver une méthode moins invasive d’évaluer l’amélioration ou la cicatrisation de la muqueuse. Nous avons besoin de marqueurs de substitution corrélés avec la cicatrisation de la muqueuse qui permettront aux médecins d’évaluer ce paramètre de façon non invasive ou à peine invasive. Notre intérêt pour la cicatrisation ou l’amélioration de la muqueuse en tant que marqueur de la maladie sous-jacente est a priori purement intuitif. Si l’on peut prouver noir sur blanc que la maîtrise de la maladie inflammatoire sous-jacente est suffisante pour permettre la cicatrisation des lésions intestinales, la corrélation avec la diminution des symptômes pourra être établie. Nous nous attendons en fait à pouvoir établir une corrélation avec une issue stable à plus long terme.»

Nota : Au moment où le présent compte rendu a été mis sous presse, le 5-ASA en préparation MMX n’était pas commercialisé au Canada.

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