Comptes rendus

Regard sur les INTI de fond : données actuelles à l’appui des schémas recommandés
Amélioration significative des résultats cliniques dans le myélome multiple grâce aux agents innovants

L’inflammation dans la MPOC : nouvelle cible des traitements innovants

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 5e Conférence mondiale de l’International Primary Care Respiratory Group

Toronto, Ontario / 2-5 juin 2010

Le pronostic de la maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) est meilleur lorsque la maladie est diagnostiquée à un stade précoce, car l’abandon du tabac, l’activité physique régulière et le soutien nutritionnel ont alors plus de chances d’améliorer les résultats cliniques. Diverses stratégies présentées au congrès – notamment encourager les omnipraticiens à demander une spirométrie chez tous les patients possiblement à risque de MPOC – pourraient aider les professionnels de la santé à diagnostiquer la maladie plus tôt.

Dans le cadre de l’étude danoise TOP, par exemple, les chercheurs ont persuadé 335 omnipraticiens d’offrir une spirométrie à tous leurs patients de plus de 35 ans ayant des antécédents de tabagisme ou d’exposition professionnelle à divers irritants et présentant au moins un symptôme respiratoire. En tout, 3097 patients ont été recrutés. Les résultats de la spirométrie ont montré que le ratio VEMS/CVF (volume expiratoire maximal en une seconde/capacité vitale forcée) était inférieur à 70 % chez 35 % des sujets de la cohorte et que 79 % des patients dont le VEMS répondait aux critères diagnostiques de la MPOC souffraient d’une MPOC légère ou modérée.

Peter Bo Poulsen, PhD, Ballerup, Danemark, a présenté une autre initiative danoise dont l’objectif était de dépister la MPOC à un stade précoce chez des habitants de Ballerup. Des fumeurs et des ex-fumeurs de plus de 35 ans qui avaient au moins un symptôme respiratoire se présentaient à des cliniques de la ville où le personnel faisait une spirométrie. Les patients qui montraient des signes d’obstruction des voies respiratoires étaient invités à rendre visite à leur omnipraticien afin que les résultats puissent être confirmés. Deux ou trois mois plus tard, les chercheurs communiquaient avec ces mêmes patients pour savoir s’ils avaient effectivement vu leur médecin.

Plus de la moitié (51 %) des 152 participants présentaient une obstruction des voies respiratoires se traduisant par un VEMS inférieur à 70 % de la valeur théorique, explique Peter Bo Poulsen. En outre, les omnipraticiens étaient d’accord pour dire qu’il s’agissait d’une obstruction des voies respiratoires dans 85 % des cas, et la concordance a presque atteint 100 % entre les résultats du dépistage municipal et le diagnostic des omnipraticiens dans les cas où l’obstruction était modérée ou sévère. Il importe ici de souligner que 39 % des sujets qui ont reçu un diagnostic de MPOC ont amorcé un programme de renoncement au tabac et que 61 % prenaient le médicament que le médecin leur avait prescrit.

Traitement amorcé plus tôt

Si le patient atteint de MPOC est encore assez jeune, l’administration plus précoce de médicaments à visée respiratoire, y compris le tiotropium, anticholinergique à longue durée d’action, peut améliorer la réponse. Lors de l’étude UPLIFT, le tiotropium n’a pas influé sur le taux annuel de déclin du VEMS et de CVF avant et après la bronchodilatation, paramètres principaux de l’essai. Par contre, l’analyse des 356 sujets de moins de 50 ans a objectivé un ralentissement du déclin de la fonction pulmonaire au fil des quatre années chez les patients sous tiotropium : baisse moyenne du VEMS post-bronchodilatation de 38 mL/année dans le groupe tiotropium vs 58 mL/année dans le groupe témoin (p<0,05). De plus, on a observé une baisse de 27 % du taux d’exacerbation dans le groupe tiotropium par rapport au groupe témoin. Les scores de qualité de vie liée à la santé se sont améliorés au fil des quatre années chez les patients sous tiotropium, mais l’écart entre les deux groupes n’était pas statistiquement significatif la quatrième année.

Soulagement suffisant des symptômes

Les bronchodilatateurs demeurent la pierre angulaire du traitement de la MPOC, mais les bronchodilatateurs ne suffisent pas à eux seuls à soulager les symptômes de façon satisfaisante chez tous les patients atteints de MPOC. En général, il est recommandé dans les algorithmes d’ajouter un corticostéroïde en inhalation (CSI) traditionnel afin d’améliorer la maîtrise des symptômes. Cela dit, même s’ils reçoivent une pharmacothérapie optimale, les patients présentant une inflammation résiduelle ne répondent pas forcément aussi bien à un CSI à la dose usuelle que les patients asthmatiques.

Comme l’explique le Dr Charles Chan, professeur titulaire et vice-président, Département de médecine, University of Toronto, Ontario, «les éosinophiles, les mastocytes et les lymphocytes CD4+ sont les cellules inflammatoires qui prédominent dans l’asthme, alors que dans la MPOC, ce sont plutôt les neutrophiles, les cellules CD8+ et les macrophages», poursuit-il. Cette distinction revêt une grande importance vu la nature des nouveaux traitements contre la MPOC. «La présence de toux et d’expectorations dénote une plus grande probabilité d’inflammation plus aiguë des voies respiratoires, de déclin plus marqué du VEMS et de risque accru de décès», souligne le Dr Chan.

Une autre étude a également révélé que le risque d’exacerbation aiguë était significativement plus élevé chez les patients ayant une toux chronique et des expectorations, par comparaison aux patients n’en ayant pas : 55 % vs 22 % (Burgel et al. Chest 2009;135:975-82). Il est donc plus probable qu’une inflammation continue soit présente malgré l’administration de doses maximales de bronchodilatateur si le patient présente une toux chronique et des expectorations, enchaîne-t-il.

Un nouvel inhibiteur oral de la phosphodiestérase 4 (PDE-4), le roflumilast, inhibe l’enzyme PDE-4 dans les cellules inflammatoires qui interviennent dans la MPOC, prévenant ainsi la dégradation de l’adénosine monophosphate cyclique (AMPc). Comme l’AMPc atténue l’inflammation en temps normal, «son accumulation dans la cellule lui permet de jouer son rôle», souligne le Dr Chan. Cet agent peut aussi exercer un effet favorable sur les cellules musculaires lisses des voies respiratoires et ralentir l’apparition d’une hypertension pulmonaire.

Essais pivots

Quatre essais pivots ont à ce jour permis d’évaluer l’innocuité et l’efficacité de ce nouvel inhibiteur de la PDE-4 administré en concomitance avec du tiotropium ou du salmétérol chez des patients atteints de MPOC. Comme l’expliquait le Dr Kenneth Chapman, professeur titulaire de médecine, University of Toronto, les patients atteints de MPOC modérée ou sévère (stade II ou III de la classification GOLD [Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease]) qui participaient à l’étude M2-127 (n=933) ou à l’étude M2-128 (n=743) recevaient aléatoirement 500 µg de roflumilast une fois par jour ou un placebo. Les sujets de l’étude M2-127 recevaient comme traitement de fond 50 µg de salmétérol deux fois par jour et ceux de l’étude M2-128, 18 µg de tiotropium une fois par jour. Les sujets des deux essais souffraient de MPOC modérée ou modérée à sévère et n’étaient pas autorisés, ni dans une étude ni dans l’autre, à recevoir un anticholinergique à courte durée d’action, un CSI ou d’autres bronchodilatateurs à longue durée d’action.

Dans le cadre de l’étude M2-127, après 24 semaines de traitement, l’association roflumilast+salmétérol avait amélioré le VEMS pré-bronchodilatation moyen de 49 mL par rapport au salmétérol seul (p<0,0001), ce qui représentait une augmentation de 39 % par rapport aux valeurs initiales. En outre, ce schéma avait réduit le taux annuel moyen d’exacerbation (modérée ou sévère) de 36,8 % (p=0,0315) et prolongé la médiane de l’intervalle précédant la première exacerbation modérée ou sévère de 40 %, ce qui était significatif (taux de risque [HR] de 0,6; p=0,0067). Au terme de l’essai M2-128, l’association roflumilast+tiotropium avait amélioré le VEMS pré-bronchodilatation moyen de 80 mL (p<0,0001) par rapport au tiotropium seul et prolongé la médiane de l’intervalle précédant la première exacerbation légère, modérée ou sévère de 30 % (HR de 0,7; p=0,0264). La même association avait aussi réduit le taux annuel moyen d’exacerbation modérée ou sévère de 23,2 %, mais la diminution n’était pas significative. Le taux moyen d’exacerbation modérée ou sévère par année-patient se chiffrait à 0,3 chez les patients sous association dans les deux études, par comparaison à 0,5 par année-patient pour les patients sous salmétérol dans l’étude M2-127 (réduction de 36,8 % [p=0,0315]) et à 0,4 par année-patient pour les patients sous tiotropium dans l’étude M2-128 (réduction de 23,2 % [p=n.s.])

Le Dr Daryl Freeman, Sheringham Medical Practice, Royaume-Uni – qui passait en revue deux autres études, M2-124 et M2-125 sur la MPOC de stade III ou IV selon la classification GOLD – a ajouté que le roflumilast avait également amélioré la fonction pulmonaire et diminué les exacerbations par rapport au placebo. Ces quatre études semblent indiquer que l’inhibiteur de la PDE-4 améliore la fonction pulmonaire et réduit les exacerbations lorsqu’il est associé à un bêta2-agoniste à longue durée d’action, à un antagoniste des récepteurs muscariniques à courte durée d’action ou au tiotropium chez des patients atteints de MPOC de stade II, III et IV selon la classification GOLD, bien que l’on ignore encore s’il est associé à un bénéfice clinique supplémentaire par rapport à un CSI seul.

Comme l’expliquait le coprésident de l’International Primary Care Respiratory Group, le Dr Alan Kaplan, médecin de famille, Bedford Park Medical Centre, Richmond Hill, Ontario, les patients qui recevaient du roflumilast en plus de leur traitement ont perdu en moyenne 2 kg environ. On a également enregistré quelques cas de nausées et de diarrhée, mais pas de vomissements. «La perte de poids m’inquiète, mais je suis rassuré de constater qu’elle n’a pas tendance à survenir chez les patients minces», fait remarquer le Dr Kaplan.

Résumé

Les médicaments à visée respiratoire actuellement sur le marché soulagent les symptômes chez un grand nombre de patients, mais pour certains types de patients comme ceux qui présentent une toux chronique et des expectorations, il est fréquent que les symptômes doivent être mieux maîtrisés. Il a été démontré qu’un nouvel anti-inflammatoire oral améliorait la fonction pulmonaire et réduisait les exacerbations chez les patients atteints de MPOC modérée ou sévère, ce qui donne tout lieu de croire que ce nouvel agent aura un rôle à jouer le jour où il sera commercialisé.

Nota : Au moment de la mise sous presse, la vente du roflumilast n’est pas autorisée au Canada.

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