Comptes rendus

Éventail grandissant d’options de traitement dans la polyarthrite rhumatoïde

Lipides et inflammation : stabilisation de la plaque vulnérable

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Congrès canadien sur la santé cardiovasculaire

Toronto, Ontario / 25-29 octobre 2008

Lors d’une séance fort courue malgré son heure matinale, séance que présidait un expert en lipides du Canada, le Dr Jacques Genest fils, directeur du Département de cardiologie, CUSM-Hôpital Royal-Victoria, Montréal, Québec, les congressistes ont pu actualiser leurs connaissances sur les facteurs qui contribuent à l’instabilité d’une plaque athéroscléreuse, sur la possibilité de mieux repérer les patients les plus à risque de rupture de la plaque et de thrombose grâce à des stratégies de stratification du risque autres que l’équation de Framingham, et sur l’importance que revêt la protéine C-réactive ultrasensible (hsCRP) en tant que stratégie de stratification du risque pour prédire l’issue.

Comme l’explique le Dr Subodh Verma, professeur agrégé de chirurgie, University of Toronto, Ontario, les plaques friables renferment un large noyau lipidique et subissent un remodelage aberrant. Ces plaques – qui se développent aux dépens de la paroi artérielle (et non de la lumière) – sont aussi dotées d’une fine chape fibreuse contenant des cellules musculaires lisses et des macrophages activés. Détail important sur le plan de l’imagerie, la majorité de ces plaques friables occupent des artères sténosées à moins de 50 % à la coronarographie. La plupart des infarctus du myocarde (IM) surviennent donc en présence de sténoses n’ayant pas d’incidence hémodynamique, indique le Dr Verma, ce qui donne à penser que l’issue clinique dépend probablement bien davantage de la morphologie, de la composition et du degré d’inflammation des plaques que de la masse athéromateuse absolue.

Le facteur hsCRP

La hsCRP, marqueur de l’inflammation, pourrait favoriser l’athérothrombose en exerçant divers effets locaux sur la réparation et la régénération vasculaires. Il semble aussi qu’elle participe à la progression des lésions, là encore par divers mécanismes. «Le blocage de la hsCRP pourrait donc conférer des bénéfices uniques [sur le plan de la prévention des maladies cardiovasculaires (CV)]», affirme le Dr Verma. Chose certaine, les données à l’appui du lien entre un taux élevé de hsCRP et le risque CV sont légion.

Comme le rappelle le Dr Paul Ridker, professeur de médecine titulaire de la chaire Eugene Braunwald, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts, les guides de pratique préconisent depuis longtemps déjà l’utilisation d’une statine pour réduire le risque d’IM et d’AVC chez les patients présentant une maladie vasculaire établie, un diabète ou une hyperlipidémie franche. Cependant, «la moitié de toutes les crises cardiaques et des AVC surviennent chez des hommes et des femmes apparemment en bonne santé dont le taux de C-LDL est inférieur au seuil thérapeutique», fait remarquer le Dr Ridker. En outre, plus de 70 % de tous les événements vasculaires surviennent chez des patients considérés comme étant à risque «intermédiaire»; or, ces patients sont un peu laissés pour compte dans les guides de pratique. Enfin, il est évident que d’autres facteurs contribuent au fardeau de la morbi-mortalité d’origine CV, notamment l’inflammation.

Si, comme l’avance le Dr Ridker, l’athérosclérose est une maladie inflammatoire, «pourquoi traiter seulement l’hyperlipidémie?» Le Dr Ridker, chercheur à qui l’on doit la majeure partie des données clés sur la hsCRP, a montré à maintes reprises que la hsCRP est prédictive du risque CV. Dans l’une de ses nombreuses études, par exemple, il a démontré que le taux de hsCRP est un meilleur prédicteur du risque d’un premier événement CV que le taux de C-LDL chez la femme dont le taux de C-LDL est inférieur à 3,36 mmol/L (130 mg/dL).

Qui plus est, les taux de C-LDL et de hsCRP ne sont pas interdépendants, «de sorte qu’on ne peut pas prédire le taux de hsCRP d’un patient d’après son taux de C-LDL, pas plus qu’on ne peut prédire la réponse de son taux de hsCRP à une statine d’après la réponse de son taux de C-LDL à cette même statine», fait valoir le Dr Ridker.

Les médecins doivent absolument reconnaître l’importance d’atteindre les taux cibles de C-LDL et de hsCRP pour optimiser les résultats, à tout le moins chez les patients à risque élevé, note le Dr Ridker. L’étude PROVE IT-TIMI 22 (Pravastatin or Atorvastatin Evaluation and Infection Therapy–Thrombolysis in Myocardial Infarction 22) – qui regroupait des patients présentant un syndrome coronarien aigu – l’illustre bien. Lors de cette étude, les résultats cliniques étaient meilleurs chez les patients qui présentaient un faible taux de hsCRP (<2 mg/L) après avoir reçu une statine que chez ceux dont le taux de hsCRP restait élevé (>2 mg/L), quel que soit leur taux final de C-LDL. Les taux les plus faibles d’événements ont été enregistrés chez les patients dont le taux de C-LDL était inférieur à 1,81 mmol/L (70 mg/dL) et chez ceux dont le taux de hsCRP était inférieur à 2 mg/L. «Les patients qui ont atteint les deux cibles se sont très bien tirés d’affaire», enchaîne le Dr Ridker. Dans le cadre de toute stratégie visant à réduire le risque CV au moyen d’une statine, on devrait surveiller à la fois le taux de hsCRP et le taux de cholestérol. Cela dit, seulement 44 % des sujets de l’étude PROVE IT-TIMI 22 qui ont reçu 80 mg d’atorvastatine ont atteint les deux taux cibles, et le pourcentage était encore plus faible chez ceux qui ont reçu 40 mg de pravastatine.

L’essai JUPITER

C’est pourquoi les chercheurs ont opté pour la rosuvastatine, statine hautement efficace pour réduire à la fois le taux de C-LDL et le taux de hsCRP, lorsqu’ils ont conçu l’essai JUPITER (Justification for Use of Statins in Prevention: an Intervention Trial Evaluating Rosuvastatin). Cet essai visait à vérifier la nouvelle hypothèse que voici : si l’on traitait des hommes et des femmes apparemment en bonne santé dont le taux de C-LDL est inférieur à 3,36 mmol/L, le seuil thérapeutique actuel, mais dont le taux de hsCRP est élevé (>2 mg/L), on réussirait à réduire le risque de survenue d’un paramètre clinique majeur – notamment un premier IM, un AVC, la mort d’origine CV ou l’hospitalisation pour une intervention de revascularisation. Plus de 17 000 hommes et femmes – représentant un nombre appréciable de minorités – ont été randomisés de façon à recevoir 20 mg/jour de rosuvastatine ou un placebo jusqu’en 2011.

À la fin de mars 2008, le comité indépendant de surveillance des essais a toutefois mis un terme à l’essai en raison d’une différence évidence entre les groupes de traitement. «Bref, nous savons déjà que la rosuvastatine prévient la survenue d’un premier événement CV chez des sujets dont le taux de C-LDL est <3,36 mmol/L, car cette conclusion relève déjà du domaine public», poursuit le Dr Ridker.

Plusieurs questions demeurent sans réponse, à tout le moins d’ici à ce que les résultats définitifs de l’étude soient dévoilés au congrès de l’American Heart Association en novembre. L’une d’elles sera l’ampleur de la réduction du risque relatif en faveur de la rosuvastatine. «Comme il s’agit d’un essai de très grande envergure, précise le Dr Ridker, nous devons garder à l’esprit que la réduction du risque relatif pourrait être significative même si elle est modeste.»

On ne sait pas non plus s’il est plus important, tout aussi important ou moins important de faire échec à l’inflammation que d’abaisser le taux de C-LDL ni s’il est sûr d’abaisser le taux de C-LDL en deçà du seuil de 1,30 mmol/L (50 mg/dL), cible qui sera atteinte chez environ la moitié des sujets de la cohorte puisque la rosuvastatine abaisse le taux de C-LDL d’environ 50 %.

«L’essai JUPITER ne remet aucunement l’hypothèse du C-LDL en question, insiste le Dr Ridker. JUPITER prouve seulement que l’on doit penser à un autre facteur en sus du C-LDL.» Ce dernier précise que d’autres chercheurs et lui-même ont déjà montré que l’administration d’une statine abaisse le taux de hsCRP. Chez des patients à risque élevé, l’ampleur du bénéfice associé au traitement par statine était corrélée en partie avec le taux de hsCRP atteint. Cela dit, aucun essai prospectif n’avait encore tenté de déterminer si le traitement pouvait être bénéfique chez des sujets apparemment en bonne santé dont le taux de C-LDL était inférieur au seuil thérapeutique actuel, mais dont le taux de hsCRP était élevé.

Modalités d’imagerie

On a recours à un certain nombre de modalités d’imagerie – notamment l’échographie intravasculaire (IVUS) – pour mieux quantifier la masse athéromateuse et mieux évaluer le risque CV. Comme l’explique la Dre Eva Lonn, professeure titulaire de médecine et de cardiologie, McMaster University, Hamilton, Ontario, l’IVUS est «extrêmement prometteuse» du fait qu’elle permet d’obtenir des coupes transversales de haute résolution de la paroi artérielle. De plus, elle montre mieux l’ampleur de l’athérome que l’angiographie et fournit quelques renseignements sur la caractérisation et le remodelage de la plaque. Il s’agit néanmoins d’une modalité invasive, et les données sur la corrélation entre l’IVUS et l’issue clinique demeurent limitées.

L’épaisseur intima-média (EIM) carotidienne, en revanche, est un paramètre que l’on peut mesurer sans effraction vasculaire et qui a l’avantage de permettre un suivi de la progression de l’athérosclérose dans le temps. Il ressort d’études épidémiologiques que plus la valeur de l’EIM est élevée, plus le risque d’IM et d’AVC est élevé. Chez des patients bien traités, cependant, la variation de l’EIM carotidienne pourrait être non significative et ne pas avoir suffisamment d’intérêt pronostique.

La prévention, le vrai défi de la médecine

En sa qualité d’expert de renom international en cardiologie préventive, le Dr Marc Pfeffer, professeur de médecine titulaire de la chaire Dzau, Brigham & Women’s Hospital, Boston, a rappelé aux congressistes que rien ne servirait de dépister des anomalies en l’absence de traitement pour les corriger et, surtout, pour prévenir leurs conséquences. Pourtant, si un bon traitement voit le jour et se révèle capable de sauver des vies, le médecin doit à tout le moins envisager de l’utiliser.

«La prévention est la facette la plus difficile de notre travail, mais c’est aussi la plus importante, dit-il. On doit être convaincu de faire ce qu’il faut [quand on utilise un nouveau traitement] et être assez convaincant pour que le patient soit persuadé d’agir dans son propre intérêt en acceptant de suivre ce traitement.»

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.