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Maladie d’Alzheimer : nouveaux critères diagnostiques et évaluation du traitement

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence internationale sur la maladie d’Alzheimer (ICAD) de l’Alzheimer’s Association

Honolulu, Hawaï / 10-15 juillet 2010

Nouveaux critères diagnostiques

Des chercheurs réunis au congrès ont présenté des ébauches de critères diagnostiques du déficit cognitif et de la maladie d’Alzheimer (MA). À la demande du National Institute on Aging aux États-Unis et de l’Alzheimer’s Association, ces ébauches portaient sur le diagnostic de la démence de type Alzheimer, du déficit cognitif léger secondaire à la MA et de la MA préclinique. Les nouveaux critères proposés – les premiers depuis 1984 – visent à délimiter plus clairement les différents stades de la maladie et à souligner l’importance des biomarqueurs de la MA, actuellement en cours de validation. Ces biomarqueurs, que l’on peut évaluer à l’aide de la tomographie par émission de positons, de l’imagerie par résonance magnétique et d’un prélèvement de liquide céphalorachidien (LCR), témoignent de lésions causées par la bêta-amyloïde, d’une atteinte neuronale, d’une dysfonction neuronale et de la neurodégénérescence.

«De plus en plus de données étayent l’importance nouvellement reconnue de certains marqueurs pour le diagnostic de démence, avant même l’apparition de quelque symptôme que ce soit», affirme le Dr Serge Gauthier, directeur, Unité de recherche sur la MA, Centre McGill d’études sur le vieillissement, et professeur titulaire de neurologie, de neurochirurgie, de psychiatrie et de médecine, Université McGill, Montréal, Québec. Le Dr Gauthier a discuté de l’utilité actuelle et future des biomarqueurs, des critères diagnostiques essentiels comme la détérioration de la mémoire et de la capacité fonctionnelle, et des tests d’évaluation des risques dans la pratique clinique. Grâce à de tels outils diagnostiques, peut-être pourrons-nous prescrire dans les années à venir des traitements de fond qui seront adaptés au profil de risque de chaque patient, explique le Dr Gauthier.

Les études et les communications présentées au congrès ont aussi porté sur l’importance d’intervenir tôt pour retarder la progression du déficit cognitif léger (DCL) vers la MA.

Dans certains groupes à risque comme les patients déprimés (le DCL semble progresser plus rapidement vers la MA chez ces derniers que chez les patients non déprimés), les inhibiteurs de la cholinestérase (IChE) comme le donépézil pourraient être particulièrement bénéfiques, affirme la Dre Sandra Black, titulaire de la chaire Brill en neurologie, University of Toronto, Ontario. À en juger par les données scientifiques à notre disposition, les IChE ne sont pas aussi utiles dans le DCL que dans la MA légère ou modérée, précise-t-elle, mais de récentes études comme celle de Lu et al. (Neurology 2009;72[24]:2115-21) indiquent que ces agents pourraient retarder l’évolution du DCL vers la MA dans certains sous-groupes comme les patients déprimés.

Mesure des retombées concrètes d’une intervention précoce

Selon les statistiques de l’Alzheimer’s Association, la prévalence de la démence augmentera de 225 % entre 2010 et 2050. En 2009, 34,4 millions de personnes étaient atteintes de la MA, et le coût pour la société excédait 422 milliards de dollars à l’échelle mondiale. Pareilles statistiques soulignent la nécessité d’agir sans délai, d’autant plus qu’une intervention précoce permet non seulement d’atténuer les symptômes et d’alléger le fardeau des aidants, mais aussi de diminuer significativement les dépenses de santé, comme la recherche l’a démontré.

La recherche réalisée dans le cadre du Dementia Demonstration Project, initiative qui regroupe sept établissements de la Veteran’s Administration aux États-Unis, montre que le dépistage, le diagnostic et le traitement précoces de la MA peuvent diminuer de 29 % le coût moyen des soins ambulatoires au cours de l’année suivant le diagnostic. Lors de cette étude qui réunissait plus de 8000 patients, l’équipe soignante spécialisée en démence de chacun des établissements faisait passer un bref test de mémoire à trois items à des vétérans de 70 ans ou plus qui se présentaient à la clinique de soins primaires pour un rendez-vous. Parmi les 8278 vétérans qui ont passé le test, 26 % ont échoué; parmi les patients qui ont échoué le test, 34 % sont retournés pour une évaluation complète et 95 % de ces patients ont reçu un diagnostic de déficit cognitif et, plus précisément, de démence dans 76 % des cas.

Après avoir évalué les patients ayant reçu un diagnostic de démence, l’équipe soignante rencontrait le patient et sa famille afin d’analyser les résultats, de discuter du diagnostic et d’expliquer brièvement le traitement recommandé, qui était fonction de la sévérité de la démence et des besoins de chaque patient et aidant. Chez les patients pris en charge par l’équipe soignante spécialisée, le coût moyen des soins ambulatoires a baissé de 1991 $ au cours de l’année suivant le diagnostic, alors que chez les patients n’ayant pas bénéficié de soins spécialisés, le coût a baissé de 406 $.

«La recherche semble indiquer qu’il est possible d’atténuer les symptômes comportementaux et psychiatriques si l’on informe bien la famille d›une personne qui reçoit un diagnostic formel de MA et que la famille collabore au plan de traitement avec les professionnels», fait valoir Maria Carrillo, PhD, directrice principale, Relations médicales et scientifiques, Alzheimer’s Association. Une évaluation complète et un suivi étroit réalisés par une équipe de cliniciens peuvent aussi atténuer le stress de l’aidant, ajoute-t-elle.

Retarder la progression de la MA

L’utilité des IChE comme le donépézil dans la MA légère ou modérée a également été au cœur des discussions du symposium de la University of Massachusetts. Comme le soulignaient les présentateurs, les bénéfices ont été confirmés par les premiers essais cliniques sur ces médicaments. Il a aussi été démontré qu’ils étaient assez bien tolérés chez les sujets âgés, le taux d’effets indésirables variant entre 7 et 8 %, précise la Dre Black. «J’ai exercé de nombreuses années avant l’arrivée de ces médicaments, et si j’en juge par mon expérience clinique, les patients ne dépérissent pas aussi vite qu’avant, lorsque nous n’avions pas ces médicaments», dit-elle.

Cela dit, des questions subsistent quant à l’utilité des IChE dans la MA sévère. Il est difficile d’évaluer les effets de ces médicaments à long terme dans la MA en raison du taux élevé d’abandon dans les études de prolongation ouvertes, dont les résultats peuvent aussi être faussés par un biais d’autosélection. «Avec une maladie comme la MA, il est difficile de garder les patients dans un essai pendant plus de six mois parce qu’ils sont en perpétuel déclin», explique la Dre Black. Par conséquent, les essais cliniques sur les IChE ne durent généralement pas plus de six mois, et seuls quelques essais avec placebo d’une durée supérieure à un an ont pu être menés à bien, poursuit-elle.

Cependant, il ressort d’études récentes réalisées chez des patients atteints de MA sévère que le traitement par un IChE permet d’améliorer la cognition, la mémoire et les fonctions exécutives. L’utilisation de ces médicaments a été associée à un déclin significativement plus lent de la cognition et de la capacité fonctionnelle globale.

Bien que certaines contradictions se dégagent des résultats d’études à long terme, des études d’une durée pouvant atteindre deux ans indiquent que les IChE pourraient aussi retarder de près de un an le déclin cognitif et fonctionnel de même que la progression vers les symptômes neuropsychiatriques de la MA, commente la Dre Black. «La stabilisation des symptômes est aussi possible chez les patients atteints de MA modérée ou sévère. En effet, on n’observait ni détérioration ni amélioration chez 50 % des patients après un an et chez 35 % des patients après deux ans», affirme-t-elle.

La protéine tau, nouvelle cible dans le traitement de la MA

D’autres nouvelles études présentées au congrès ont mis en lumière le potentiel prometteur des immunothérapies expérimentales ciblant la protéine tau, que l’on croit responsable des dégénérescences neurofibrillaires caractéristiques de la MA. Dans le cadre d’une analyse exploratoire groupée de deux petits essais multicentriques menés à double insu avec randomisation et placebo, les chercheurs ont constaté que le bapineuzumab – anticorps dirigé contre les plaques de bêta-amyloïde qui fait actuellement l’objet d’une étude de phase III – pouvait aussi influer sur le taux d’une protéine anormale, la protéine tau phosphorylée.

Lorsque les chercheurs se sont penchés sur les résultats de l’étude 201, qui regroupait 35 patients randomisés de façon à recevoir du bapineuzumab ou un placebo, ils ont observé une tendance à la baisse du taux de protéine tau phosphorylée dans le LCR chez les sujets sous bapineuzumab, par comparaison aux témoins sous placebo. Lors de l’étude 202 qui réunissait 11 patients, aucun effet significatif du traitement n’a été signalé, mais les données colligées des deux essais ont objectivé une diminution statistiquement significative du taux de protéine tau phosphorylée chez les sujets sous bapineuzumab (p=0,0270).

«Ce sont de petites études, certes, mais elles revêtent une grande importance du fait qu’un taux élevé de protéine tau phosphorylée dans le LCR est corrélé avec des lésions tissulaires étendues dans le cerveau, une évolution rapide du DCL vers la MA, un déclin cognitif rapide et un taux de mortalité élevé», indique le chercheur principal, Kaj Blennow, PhD, Université de Göteborg, Suède. «Ces observations permettent de croire que l’immunothérapie ciblant la bêta-amyloïde pourrait aussi modifier les processus neurodégénératifs qui surviennent plus tard dans le cours de la maladie.»

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