Comptes rendus

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Mise à jour sur les lymphomes : survol du traitement d’entretien et du traitement d’induction

Maîtrise prolongée de la colite ulcéreuse

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Digestive Disease Week 2007

Washington, D.C. / 20-23 mai 2007

La colite ulcéreuse (CU) se caractérise par la survenue imprévisible de poussées inflammatoires touchant les muqueuses. Ces épisodes aigus, volontiers invalidants, sont souvent réprimés grâce à une intensification du traitement. Toutefois, pour que le patient puisse vaquer normalement à ses activités quotidiennes et jouir d’une qualité de vie acceptable, il est indispensable de le mettre complètement à l’abri des poussées au moyen d’un traitement d’entretien efficace. En présence d’une maladie chronique, l’efficacité d’un traitement d’entretien doit nécessairement être évaluée à l’aune de sa tolérabilité, de son innocuité et de sa commodité, facteurs qui peuvent tous influer sur l’observance.

Constatations récentes

Lors de deux prolongations d’essais pivots de phase III, on a démontré que les agents novateurs amenaient une maîtrise à long terme de la CU, progrès de première importance dans le traitement de cette maladie. L’étude la plus marquante porte sur une préparation de mésalamine fortement dosée à prendre une fois par jour. Les diverses formes d’acide 5-aminosalicylique (ASA), dont la mésalamine, sont d’ores et déjà reconnues comme des agents de première intention. L’étude dont il est question ici couvre une période de 12 mois.

Comme nous l’apprend le Dr Michael Kamm, division de gastro-entérologie, St. Mark’s Hospital, Londres, Royaume-Uni, «moins de 15 % des patients ont subi une rechute clinique au cours de la longue période d’évaluation. En outre, plus des deux tiers des sujets sont demeurés en rémission d’après des critères cliniques et endoscopiques très stricts», ajoute-t-il.

L’essai sur la mésalamine a été réalisé à l’aide d’un nouveau système à matrices multiples (MMX), récemment homologué pour l’induction de la rémission sur la foi de deux essais multicentriques de phase III avec randomisation. Composée d’excipients lipophiles et hydrophiles, la matrice retarde la libération du principe actif en se dissolvant graduellement. Résultat : la mésalamine n’est libérée qu’une fois parvenue dans le côlon, d’où une meilleure exposition des tissus lésés au médicament. Avec les préparations antérieures de 5-ASA, y compris les formes à libération prolongée, le patient devait ingérer plusieurs comprimés en de multiples prises pour que le médicament parvienne en quantité suffisante au siège de l’inflammation. Grâce à la préparation MMX, la plupart des patients peuvent prendre une seule dose par jour.

Lors de la prolongation, 362 patients ayant participé à l’un ou l’autre des essais de phase III avec placebo et étant parvenus à une rémission tant clinique qu’endoscopique ont reçu un traitement d’entretien de 12 mois par la mésalamine MMX à 2,4 g. Environ la moitié des sujets prenaient le médicament une fois par jour (f.p.j.), tandis que l’autre moitié recevait deux doses par jour. Les investigateurs sont demeurés à l’affût d’une rechute clinique et endoscopique durant la totalité de l’étude.

Les deux posologies ont amené de bons résultats, sans écart significatif. Après 12 mois, 88,7 % des patients traités 1 f.p.j. et 92,5 % des patients traités 2 f.p.j. étaient en rémission clinique. On a également observé une rémission endoscopique – définie par des critères stricts, à savoir un score de 1,0 ou moins à la sigmoïdoscopie et l’absence de friabilité de la muqueuse – chez 67,8 % et 72,3 % des sujets de chaque groupe, respectivement.

«Cette étude ne se prêtait pas à une comparaison des schémas thérapeutiques, explique le Dr Kamm, mais, selon des analyses exploratoires, il n’y aurait pas de différence significative entre les posologies uniquotidienne et biquotidienne quant aux taux de rémission ou de rechute.» Conscient que l’observance est sans doute plus rigoureuse en contexte expérimental que lors de l’application réelle d’un traitement, le Dr Kamm insiste toutefois sur le fait qu’«on a montré maintes et maintes fois, dans diverses maladies, que les traitements les mieux acceptés par les patients étaient ceux qui comportaient le moins de comprimés et le moins de prises».

Une substance, plusieurs présentations

Les deux essais de phase III sur la mésalamine MMX se sont déroulés suivant des plans distincts. Dans un cas, 280 patients atteints de CU ont été affectés au hasard à l’un des groupes suivants : 2,4 g/jour (1,2 g 2 f.p.j.), 4,8 g/jour (1 f.p.j.) ou placebo, puis ont été suivis pendant huit semaines (Lichtenstein et al. Clin Gastroenterol Hepatol 2007;5:95-102). Chez les sujets sous traitement actif, les taux de rémission clinique et endoscopique avaient atteint, au terme de l’étude, plus du double des taux enregistrés dans le groupe placebo (34,1 % et 29,2 % vs 12,9 %). Dans l’autre essai, 343 patients atteints de CU ont été affectés au hasard à l’un des groupes suivants : mésalamine MMX à 2,4 g/jour, mésalamine MMX à 4,8 g/jour, mésalamine à libération prolongée à 800 mg 3 f.p.j. (dose totale de 2,4 g/jour) ou placebo (Kamm et al. Gastroenterology 2007;132:66-75). Les deux préparations actives ont été associées à un taux de rémission clinique et endoscopique de 41 % par rapport à 22,1 % pour le placebo.

Taux de rémission

«Nous savons déjà que la mésalamine est efficace et bien tolérée pour l’induction d’une rémission clinique et endoscopique. Cependant, nous avons constaté que la préparation à prise uniquotidienne n’était pas moins efficace que les formes à prendre en de multiples doses par jour, ce qui n’est pas sans incidence sur l’adhésion au traitement», affirme le Dr Kamm. Pour étayer ses propos, le médecin a présenté des données tirées d’une prolongation d’essai à laquelle ont pris part 156 patients qui n’avaient pas obtenu de rémission lors de l’une ou l’autre des études de phase III d’une durée de huit semaines; on leur a prescrit un traitement à raison de 4,8 g/jour pendant huit autres semaines. Le taux de rémission s’est élevé à 60,9 %. Les sujets en rémission ont ensuite été admis à l’essai sur le traitement d’entretien à long terme, pendant lequel s’est poursuivie la prise de mésalamine MMX, à raison cette fois de 2,4 g 1 f.p.j.

«Chez les patients aux prises avec une CU active légère ou modérée et affectés initialement au groupe mésalamine MMX, 56,6 % ont obtenu une rémission clinique et endoscopique dans un délai de 16 semaines et n’ont pas subi de rechute au cours des 12 mois suivants», rapporte le Dr Kamm.

Par ailleurs, un sous-groupe de 47 patients traités par la mésalamine à libération prolongée en doses multiples est parvenu à une rémission clinique et endoscopique après 16 semaines, puis a reçu de la mésalamine MMX en traitement d’entretien à raison de 2,4 g/jour pendant la prolongation de 12 mois. Au total, 77,8 % de ces personnes étaient encore en rémission après les 12 mois, proportion comparable à celle des sujets traités dès le départ par la préparation MMX.

Selon le principal auteur de cette analyse, le Dr Gary R. Lichtenstein, division de gastro-entérologie, University of Pennsylvania, Philadelphie, «la préparation de mésalamine à une prise par jour est efficace comme traitement d’entretien à long terme en présence d’une CU légère ou modérée, quelle que soit la forme de 5-ASA qui a conduit à la rémission».

Ces résultats viennent confirmer les bienfaits à long terme appréciables du traitement uniquotidien chez les patients souffrant d’une CU légère ou modérée, mais ce ne sont pas là les seules données intéressantes. En effet, une prolongation d’étude réalisée chez des sujets présentant une atteinte grave, normalement réfractaire au 5-ASA, a donné des résultats encourageants. Lors des essais d’homologation de phase III sur l’emploi de l’infliximab dans la CU, on a obtenu de forts taux de maîtrise sur une période de deux ans. Le Dr Walter Reinisch, professeur titulaire de médecine, Université de Vienne, Autriche, a exposé les résultats d’une prolongation d’essai qui réunissait 291 sujets des études ACT I ou II (Active Ulcerative Colitis Trials). Les patients en rémission ont poursuivi le traitement qui leur avait été attribué, à savoir l’infliximab à 5 mg/kg ou à 10 mg/kg. On dispose actuellement de données portant sur 215 patients suivis pendant un an et 92 patients suivis pendant deux ans.

«Les rechutes ont été peu fréquentes, et la qualité de vie liée à la santé s’est améliorée avec le temps. Au total, 98 % des sujets traités pendant plus de deux ans ne prenaient plus du tout de corticostéroïdes», nous apprend le Dr Reinisch. Il souligne au passage que même si l’infliximab a provoqué des effets indésirables graves pendant les essais ACT (Rutgeerts et al. N Engl J Med 2005;353:2462-76), il a entraîné peu de manifestations graves pendant la prolongation, exception faite d’un seul cas de sarcoïdose. Néanmoins, les résultats de cette prolongation d’étude semblent indiquer que l’infliximab est efficace à long terme et améliore la qualité de vie en cas de CU sévère.

«Il faudra mener d’autres études pour déterminer si la mésalamine doit être prescrite à plus forte dose en traitement d’entretien lorsque l’endoscopie révèle une atteinte sévère», prévient cependant le Dr Lichtenstein. Chose certaine, «la mise au point de traitements d’entretien plus simples pourrait présenter des avantages non négligeables pour la prise en charge de la CU».

Résumé

Des données récentes tirées de prolongations d’essais cliniques sur la CU nous autorisent à penser que des options de plus en plus intéressantes s’offrent à nous pour prévenir la rechute dans les cas légers ou modérés et les CU réfractaires. Une nouvelle préparation de mésalamine à prise uniquotidienne et un agent biologique – tous deux prescrits au long cours – ont amené une rémission soutenue chez des patients aux prises avec une CU active initialement réprimée au moyen d’un traitement d’induction par le même médicament. Vu la chronicité et le lourd fardeau clinique de la CU, ce sont là des données encourageantes. La CU étant incurable, toute amélioration du traitement revêt une importance cruciale pour les patients qui devront composer avec cette maladie leur vie durant. La simplification de la posologie dans une optique de resserrement de l’observance du traitement pourrait favoriser grandement la maîtrise à long terme de la maladie.

Nota : Au moment où le présent compte rendu a été mis sous presse, le 5-ASA en préparation MMX n’était pas commercialisé au Canada.

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