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Nouveaux concepts dans la prise en charge de l’anémie ferriprive

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 54e Assemblée annuelle de l’American Society of Hematology

Atlanta, Géorgie / 8-11 décembre 2012

Atlanta - L’Organisation mondiale de la Santé estime que 1,6 milliard de personnes souffrent d’anémie ferriprive (WHO Global Database on Anaemia. 2008;1-40, WHO anaemia fact sheet. 2001;114). Le fer administré par voie orale demeure le traitement recommandé en première intention, mais pour diverses raisons, certains patients aux prises avec une anémie ferriprive ne peuvent pas prendre de fer ou n’y répondent pas suffisamment. En Amérique du Nord, les seules solutions de rechange au fer oral qui soient homologuées sont les préparations de fer dextran, dont l’innocuité et la commodité laissent à désirer. Le développement d’une nouvelle génération de préparations martiales intraveineuses pourrait éliminer les contraintes que nous imposent les options de traitement actuelles.

Solutions de rechange aux agents administrés par voie orale

Chez une proportion substantielle de patients aux prises avec une anémie ferriprive, le taux d’hémoglobine (Hb) ne se normalise pas en réponse à l’administration de fer par voie orale, les principales raisons étant notamment une intolérance, une réponse sous-optimale et une piètre absorption (Am J Medicine 2000;109:27-32). En Amérique du Nord, les suppléments de fer injectables par voie intraveineuse (i.v.) que l’on peut donner aux patients ne souffrant pas de maladie rénale chronique (MRC) se limitent aux préparations de fer dextran. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration exige que la monographie de ces produits comporte une mise en garde encadrée quant au risque de réaction anaphylactique. De plus, les préparations de fer dextran injectables sont associées à des schémas peu pratiques qui nécessitent de multiples injections par voie intramusculaire (i.m.) ou perfusions i.v. ou encore, une perfusion de la dose totale qui s’échelonne sur de nombreuses heures et qui risque de nuire à l’observance du traitement. «Ainsi, un grand nombre de ces patients ne reçoivent pas de fer par voie i.v. et, parce qu’ils ne sont pas traités de façon optimale, ils continuent d’avoir des symptômes», expliquait la Dre Saroj Vadhan-Raj, University of Texas MD Anderson Cancer Center, Houston, dans une communication par affiche.

Le ferumoxytol, nouvelle préparation martiale i.v. homologuée pour le traitement de l’anémie ferriprive chez les patients atteints de MRC, a récemment été étudié chez des patients atteints d’anémie ferriprive qui ne souffraient pas de MRC et chez qui le traitement martial oral était insatisfaisant ou ne pouvait pas être utilisé.

La Dre Vadhan-Raj a présenté les résultats d’un essai multicentrique mené avec placebo et randomisation chez des patients anémiques ne souffrant pas de MRC qui ne toléraient pas les suppléments de fer oraux ou n’y répondaient pas suffisamment.

Dans le cadre de l’essai IDA-301, 808 patients dont le taux d’Hb initial était de l’ordre de 7 à 10 g/dL ont été randomisés de façon à recevoir selon un rapport 3:1 soit deux doses de 510 mg de ferumoxytol, soit deux doses d’un placebo, administrées à 2-8 jours d’intervalle, après quoi ils ont été suivis durant 5 semaines. Le paramètre principal était la proportion de patients obtenant une amélioration du taux d’Hb de ≥2 g/dL.

L’analyse principale a révélé que le taux d’Hb avait augmenté de ≥2 g/dL par rapport au taux initial chez 81 % des patients sous ferumoxytol vs 5,5 % des patients sous placebo (p<0,0001). De plus, l’augmentation moyenne du taux d’Hb par rapport au taux initial se chiffrait à 2,7 g/dL sous ferumoxytol, par comparaison à 0,1 g/dL sous placebo (p<0,0001) (résumé 2098).

Des données d’innocuité ont montré que le supplément de fer administré par voie i.v. était généralement bien toléré et qu’il ne générait aucun nouveau problème d’innocuité, souligne la Dre Vadhan-Raj. Les taux d’effets indésirables étaient similaires sous ferumoxytol (49,2 %; 2,6 % d’effets indésirables [EI] graves) et sous placebo (43 %; 3 % d’EI graves). «Deux doses de ferumoxytol se sont révélées hautement efficaces pour élever le taux d’Hb et les paramètres ferriques chez des patients atteints d’anémie ferriprive sans MRC pour qui le traitement martial oral avait toujours été insatisfaisant, fait-elle valoir. Nous croyons que le ferumoxytol pourrait constituer une nouvelle option de traitement importante dans les cas où le traitement martial oral ne peut pas être utilisé ou a toujours été associé à une réponse insatisfaisante», conclut la Dre Vadhan-Raj.

Maintien de la qualité de vie

L’anémie ferriprive peut miner la qualité de vie (QdV), et nombreux sont les patients qui font état d’un niveau élevé de fatigue, de dyspnée et de manque d’énergie ou de vitalité. Dans le cadre de l’essai IDA-301, on demandait aux patients de remplir une série de questionnaires visant à évaluer l’impact de l’anémie ferriprive sur les paramètres rapportés par les patients, puis d’évaluer les changements survenus sous l’effet du traitement par le ferumoxytol.

Les instruments utilisés pour évaluer les résultats rapportés par les patients étaient l’échelle FACIT-Fatigue (Functional Assessment of Chronic Illness Therapy-Fatigue), l’échelle analogique linéaire (LASA) de l’énergie et la composante vitalité du formulaire SF-36 (36-item Short Form Health Survey) (résumé 478).

Au départ, le score FACIT-Fatigue moyen se chiffrait à 24,1 dans le groupe ferumoxytol et à 24,7 dans le groupe placebo. Après 5 semaines de traitement, le score de fatigue s’était amélioré de 10,6 points en moyenne dans le groupe ferumoxytol vs 5,7 points dans le groupe placebo (p<0,0001). L’écart de 4,9 points excédait le seuil de 3,0 considéré comme cliniquement important chez les patients cancéreux anémiques.

«Le score FACIT-Fatigue s’était amélioré davantage sous ferumoxytol que sous placebo lors de chacune des évaluations, affirme la Dre Vadhan-Raj. Nous avons observé un écart statistiquement significatif entre les groupes dès la première semaine.» De plus, l’ampleur de l’amélioration du score FACIT-Fatigue était corrélée avec l’amélioration du taux d’Hb en réponse au traitement par le ferumoxytol, ajoute-t-elle.

La comparaison des groupes a objectivé, lors de chacune des évaluations, une amélioration significativement plus marquée du score LASA ainsi que des sous-scores énergie, activités de la vie quotidienne et QdV sous ferumoxytol que sous placebo (p=0,0106 à p<0,0001). Les résultats ont également fait ressortir une augmentation statistiquement significative de 10,7 points du sous-score vitalité de l’échelle SF-36, par comparaison à une variation minime dans le groupe placebo (p<0,0001).

Agents administrés par voie intraveineuse

Dans le cadre d’un autre essai clinique avec randomisation, le ferumoxytol a été comparé au fer saccharose i.v. chez des patients anémiques ne souffrant pas de MRC qui n’avaient pas bien répondu aux suppléments de fer oraux.

Au total, 605 patients ont été randomisés de façon à recevoir selon un rapport 2:1 du ferumoxytol ou du fer saccharose pendant
5 semaines (résumé 2099). Les patients sous ferumoxytol recevaient une injection de 510 mg (17 mL) le jour 1 et une deuxième dose de 2 à 8 jours plus tard. Les patients sous fer saccharose recevaient 200 mg (10 mL) en 5 jours non consécutifs étalés sur une période de 14 jours.

Le paramètre principal était la proportion de patients dont le taux d’Hb avait augmenté de ≥2 g/dL entre le début de l’étude et la fin de la 5e semaine. Les résultats ont révélé que 84 % des sujets du groupe ferumoxytol et 81 % des sujets sous fer saccharose avaient atteint le paramètre principal.

Chez les patients sous ferumoxytol, l’augmentation du taux d’Hb était en moyenne de 2,7 g/dL, vs 2,4 g/dL pour le fer saccharose, précise le Dr David Hetzel, Royal Adelaide Hospital, Australie.

Dans l’ensemble, les deux préparations i.v. avaient des profils d’innocuité similaires, et aucun nouveau problème d’innocuité n’a été signalé, enchaîne le Dr Hetzel.

En quête d’un marqueur de la réponse

Aux fins d’évaluation de la charge ferrique, l’hepcidine – en raison du rôle qu’elle joue dans la régulation de la disponibilité du fer pour l’érythropoïèse – suscite beaucoup d’intérêt à titre d’éventuel biomarqueur.

«Les analyses biochimiques traditionnelles ont des limites dans l’évaluation de la charge ferrique des patients, car leurs résultats varient en présence d’inflammation», explique le Dr Lawrence Goodnough, Stanford University, Californie. «L’hepcidine est l’un des principaux régulateurs de l’homéostasie ferrique et influe sur la biodisponibilité du fer pour l’érythropoïèse. L’hepcidine pourrait donc servir de biomarqueur pour la réponse au traitement martial oral dans les cas où une anémie ferriprive est suspectée.»

Pour examiner le potentiel du dosage de l’hepcidine aux fins de surveillance du traitement de l’anémie ferriprive, les chercheurs d’un essai avec randomisation sur le carboxymaltose ferrique i.v. ont inclus un dosage de l’hepcidine lors de l’évaluation et de la surveillance d’un sous-groupe de patients (résumé 484). L’objectif principal était de déterminer si les taux d’hepcidine étaient prédictifs de la réponse au traitement martial.

Les patients ont été soumis à un premier dosage de l’hepcidine au départ, puis de nouveau après une période de transition de 14 jours où ils avaient reçu un supplément de fer par voie orale. Les patients dont le taux d’Hb n’augmentait pas de ≥1 g/dL étaient considérés comme des non-répondeurs et étaient randomisés de façon à recevoir du carboxymaltose ferrique i.v. ou un supplément de fer oral.

Le Dr Goodnough et ses collaborateurs ont comparé les taux d’hepcidine de départ chez 22 patients qui n’avaient pas répondu à 14 jours de supplémentation ferrique et 22 patients qui y avaient répondu. Chez les non-répondeurs, le taux d’hepcidine était significativement plus élevé (33,2 vs 8,7 ng/mL, p=0,0036). Parmi les patients qui ont ensuite été randomisés de façon à recevoir un supplément de fer oral pendant 4 autres semaines, seulement 20 % ont obtenu une augmentation de ≥1 g/dL du taux sérique d’Hb, comparativement à 65,3 % des patients randomisés de façon à recevoir du carboxymaltose ferrique.

«La non-réponse au traitement martial oral n’exclut pas la possibilité d’une carence martiale, note le Dr Goodnough. Le carboxymaltose ferrique i.v. a été associé à une forte réponse chez les deux tiers des patients qui n’avaient pas répondu à un traitement martial oral de 14 jours antérieur. Ces résultats semblent indiquer que chez les patients porteurs d’inflammation, la voie i.v. pourrait être la meilleure solution pour l’administration du fer.»

Résumé

L’anémie ferriprive touche le quart de la population mondiale. Pour de nombreux patients, les préparations de fer orales et de fer dextran injectables par voie i.v. que l’on trouve actuellement sur le marché ne permettent pas un traitement optimal. Le développement d’une nouvelle génération de produits ferriques i.v. a rendu possible la création de stratégies thérapeutiques qui s’annoncent prometteuses pour améliorer l’issue clinique de l’anémie ferriprive en l’absence de MRC.    

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