Comptes rendus

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Nouvelle ère dans le traitement de l’infection à VIH : diminuer la charge virale, même chez les patients au lourd passé thérapeutique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 47e Congrès intersciences sur les antimicrobiens et la chimiothérapie (ICAAC)

Chicago, Illinois / 17-20 septembre 2007

Comme les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) et les inhibiteurs de la protéase (IP), la nouvelle classe des inhibiteurs de l’intégrase cible l’une des trois enzymes virales qui gouvernent le cycle de vie du VIH. Le raltegravir, premier représentant de cette nouvelle classe, fait actuellement l’objet d’études de phase III chez des patients jamais traités ou déjà traités. Le Dr Eric Daar, chef de la médecine du VIH, Harbor-UCLA Medical Center, et professeur titulaire de médecine, UCLA-David Geffen School of Medicine, a présenté les résultats de deux études pivots de phase III – BENCHMRK (Blocking Integrase in Treatment Experienced Patients with a Novel Compound Against HIV: Merck)-1 et BENCHMRK-2.

Résultats de BENCHMRK

Les sujets des deux études étaient résistants à un ou à plusieurs agents de diverses classes – dont les IP, les INTI et les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI) – et avaient déjà été traités massivement. L’analyse en intention de traiter a montré que 77 % des sujets de BENCHMRK-1 et -2 qui recevaient 400 mg de raltegravir 2 fois par jour (f.p.j.) plus un traitement de fond optimisé (TFO) avaient des taux d’ARN du VIH <400 copies/mL à 16 semaines vs 41 % et 43 %, respectivement, des patients qui recevaient uniquement un TFO. La même analyse a révélé que 61 % et 62 % des sujets qui prenaient du raltegravir dans les deux études avaient atteint un taux d’ARN du VIH <50 copies/mL à 16 semaines vs 33 % et 36 % des témoins sous TFO. L’augmentation moyenne du nombre de cellules CD4+ était de 83 et 86 cellules/mm³ chez les patients sous raltegravir vs 31 et 40 cellules/mm³ chez les témoins.

Chez les patients, moins nombreux, qui ont été évalués à 24 semaines, les résultats étaient semblables aux données à 16 semaines, fait remarquer le Dr Daar. Les effets indésirables signalés dans le groupe raltegravir plus TFO étaient comparables à ceux du groupe TFO seul, et on n’a pas observé d’incidence accrue d’anomalies dans les épreuves de laboratoire. Un échec virologique a été signalé chez 76 sujets des études BENCHMRK. L’analyse génotypique – qui a été effectuée pour les 41 patients dont le traitement par le raltegravir avait échoué – a révélé que 32 d’entre eux présentaient l’une ou l’autre des mutations N155H ou Q148K/R/H du gène codant pour l’intégrase. En général, au moins deux mutations étaient présentes au moment de l’échec du traitement, soulignent les chercheurs. Cela dit, note le Dr Daar, «on peut probablement supposer que tous les patients qui n’ont pas encore reçu d’inhibiteur de l’intégrase répondront à cet agent».

Un deuxième inhibiteur de l’intégrase, l’elvitegravir, fait actuellement l’objet d’une étude de phase II chez des patients déjà traités. Comme le précise le Dr Daar, l’elvitegravir est métabolisé par l’enzyme CYP3A4 et pourrait interagir de façon notable avec d’autres antirétroviraux (ARV). Ce n’est pas le cas du raltegravir, celui-ci étant métabolisé par glucuronidation.

Données corroborantes

Dans le cadre de l’essai 004 de phase II chez des patients jamais traités, environ 80 % des patients des groupes raltegravir et éfavirenz ont atteint des taux d’ARN du VIH <50 copies/mL à 24 semaines, mais la chute de la charge virale a été plus rapide sous l’effet du raltegravir, celle-ci étant devenue indécelable en moins de quatre semaines chez plus de la moitié des patients de ce groupe de traitement. Toujours dans cette étude, des taux similaires de suppression virologique ont été enregistrés à 48 semaines. À ce jour, aucun effet toxique relié à la dose n’a été associé au raltegravir.

Dans le cadre d’une étude de phase II à double insu dont l’objectif était de déterminer la dose, là encore chez des patients déjà traités, les résultats – obtenus sur une période plus longue – ont confirmé que la réponse au raltegravir était durable et que le traitement était extrêmement bien toléré.

Comme l’explique le Dr José Gatell, chef des unités des maladies infectieuses et du SIDA, et professeur titulaire de médecine, Université de Barcelone, Espagne, des patients qui étaient porteurs de mutations de résistance à trois classes et dont le taux d’ARN du VIH était >5000 copies/mL ont été randomisés de façon à recevoir 200, 400 ou 600 mg de raltegravir 2 f.p.j. plus un TFO ou uniquement un TFO pendant 24 semaines. Après 24 semaines, le protocole a été modifié de façon que les témoins sous TFO puissent recevoir en mode ouvert 400 mg de raltegravir 2 f.p.j. pendant 24 semaines.

À 48 semaines, 64 % à 71 % des patients sous raltegravir avaient atteint un taux d’ARN du VIH <400 copies/mL, et 46 % à 64 % d’entre eux avaient une charge virale indécelable. Toujours à 48 semaines, l’augmentation moyenne du nombre de cellules CD4+ par rapport aux valeurs de départ variait entre 64 et 110 cellules/mm³. De même, le nombre d’abandons pour cause d’effets indésirables était remarquablement faible, ajoute le Dr Gatell, précisant que les sujets de cette étude souffraient d’une «infection à VIH très avancée», comme en témoignaient la durée médiane du traitement ARV de 10 ans et la charge virale initiale supérieure à 100 000 copies/mL chez environ 30 % des patients. «Les réponses à 48 semaines étaient très comparables aux réponses observées à 24 semaines, affirme le Dr Gatell, et ajoutent au potentiel de ce pionnier d’une nouvelle classe prometteuse d’ARV.»

Autres études

Les données les plus complètes dont on dispose sur une deuxième nouvelle classe d’ARV, les inhibiteurs de fusion, concernent le maraviroc. Cet antagoniste du CCR5 agit en bloquant la fixation du virus au corécepteur CCR5, mais est inefficace contre celle du virus au corécepteur CXCR4.

Il devient donc important de déterminer si le patient est porteur d’un virus à tropisme CCR5 pur (virus R5), note le Dr David Kuritzkes, professeur titulaire de médecine, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts, car le virus à tropisme CXCR4 (virus X4) et le virus qui se fixe aux deux corécepteurs (virus à tropisme double ou mixte ou virus D/M) ne répondent pas aux antagonistes du CCR5. Selon diverses études, de 22 % à 48 % des patients déjà traités sont porteurs d’un virus X4 ou D/M et ne sont donc pas aptes à recevoir un antagoniste du CCR5.

Par contre, chez les patients déjà traités qui sont porteurs d’un virus R5 pur, le maraviroc semble très puissant. Selon la mise à jour présentée par le Dr Jacob Lalezari, directeur, Quest Clinical Research, San Francisco, 50,9 % des patients qui recevaient du maraviroc 1 f.p.j. dans le cadre des essais MOTIVATE 1 et 2 (Maraviroc Plus Optimized Background Therapy in Viremic, ART-experienced Patients) avaient toujours une charge virale <400 copies/mL à 48 semaines, tout comme 57,5 % des patients qui en recevaient 2 f.p.j., vs 22 % des témoins sous TFO seul. Le pourcentage de patients dont la charge virale était indécelable se chiffrait à 42 %, 47 % et 16 %, respectivement. L’augmentation moyenne du nombre de cellules CD4+ était aussi significativement plus marquée dans les groupes maraviroc (113 et 122 cellules/mm³ pour les groupes 1 f.p.j. et 2 f.p.j., respectivement, vs 54 cellules/mm³ dans le groupe TFO seul). Les taux d’abandons pour cause d’effets indésirables étaient comparables dans les trois groupes de traitement (£6 %), et on n’a noté ni signe d’hépatotoxicité ni taux excessif de cancers chez les patients recevant du maraviroc. Quelque 60 % des patients dont le traitement par le maraviroc a échoué étaient porteurs d’un virus D/M ou X4, précise le Dr Lalezari.

La mise à jour des données de l’essai ACTG 5211 sur le vicriviroc, autre antagoniste du CCR5, a objectivé une suppression virale soutenue pendant deux ans chez des patients souffrant d’une infection à VIH avancée qui avaient déjà été traités. Après 12 mois de traitement, 37 % des patients qui recevaient 10 mg et 27 % de ceux qui en recevaient 15 mg ont atteint un taux d’ARN du VIH <50 copies/mL, par comparaison à 11 % des sujets sous placebo. Le nombre d’échecs virologiques était moins élevé dans les groupes de traitement actif (27 % et 33 %) que dans le groupe placebo (86 %) à la même évaluation.

Lors d’une autre allocution, les données colligées à 24 semaines des essais DUET 1 et 2 sur un INNTI de deuxième génération, le TMC125 (etravirine), plus un TFO, par rapport à un TFO seul, ont de nouveau fait ressortir la supériorité constante et significative du TMC125 pour tous les paramètres, dont le pourcentage de patients ayant un taux d’ARN du VIH <50 copies/mL (59 % vs 41 %) ou <400 copies/mL (74 % vs 53 %), et l’augmentation moyenne du nombre de cellules CD4+ (86 vs 67 cellules/mm³). Le profil d’effets indésirables et les constantes biologiques étaient essentiellement les mêmes dans les deux groupes, si ce n’est que les éruptions cutanées survenaient tôt chez les patients recevant le TMC125. Le taux d’abandons pour cause de toxicité du médicament administré était très faible.

Les chercheurs ont conclu que même en l’absence d’un traitement de fond hautement actif, 45 % des patients sous TMC125 ont pu atteindre une charge virale indécelable, ce qui montre clairement que l’etravirine est une autre option active chez les patients résistants à d’autres INNTI.

Résumé

Le choix d’un schéma ARV hautement actif apporte son lot de défis lorsque le patient a déjà reçu de nombreux ARV et qu’il est porteur de mutations conférant une résistance à de multiples classes d’ARV. Néanmoins, grâce à la mise au point de nouvelles options de traitement comme les inhibiteurs de l’intégrase et les inhibiteurs de fusion, il est maintenant possible de concevoir des schémas puissants, sûrs et bien tolérés pour la vaste majorité des patients infectés par le VIH, peu importe les ARV auxquels ils ont déjà été exposés. Ces nouvelles options de même que d’autres agents déjà en développement permettront aux médecins de répondre aux besoins des patients d’aujourd’hui, et il est à espérer qu’ils continueront de le faire longtemps.

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