Comptes rendus

Vaccination de l’adulte : prévention primaire des névralgies post-zostériennes
Nouvelle préparation pour de meilleurs résultats dans le cancer du sein

Nouvelles normes dans le traitement du cancer du sein précoce HER2+

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 6e Congrès européen sur le cancer du sein

Berlin, Allemagne / 15-19 avril 2008

Selon la Dre Martine Piccart-Gebhart, Institut Jules Bordet, Université libre de Bruxelles, Belgique, «c’est à nous qu’il incombe de vérifier la possibilité d’une surexpression de la protéine HER2 ou d’une amplification du gène codant pour HER2 dans chaque tumeur mammaire primitive. C’est ce qui se dégage des résultats remarquables de quatre essais de phase III d’envergure – multicentriques, ouverts et randomisés – qui regroupaient plus de 13 000 femmes atteintes d’un cancer du sein précoce HER2+.»

Gain de survie

Les essais auxquels la Dre Piccart-Gebhart faisaient référence sont HERA (Herceptin Adjuvant trial), NASABP B-31 (National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project B-31), NCCTG N9831 (North Central Cancer Treatment Group N9831) et BCIRG 006 (Breast Cancer International Research Group 006).

Ces essais ont montré que, chez les femmes atteintes d’un cancer du sein précoce HER2+, l’administration du trastuzumab, anticorps monoclonal (AcM) humanisé recombinant anti-HER2, en concomitance avec la chimiothérapie standard ou après celle-ci peut réduire le risque de récidive de 33 % à 52 % et le risque de mortalité de 34 % à 41 %. Les essais pivots menés chez des femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique HER2+ ont révélé que l’administration du trastuzumab en association avec un taxane peut accroître la survie globale (SG) de 37 % à 40 %.

«Il n’est pas étonnant qu’un groupe comme celui de St-Gall souligne dans ses lignes directrices l’importance de prescrire aux patientes souffrant d’un cancer du sein HER2+ un traitement adjuvant par le trastuzumab de un an en plus d’une chimiothérapie adjuvante, et d’une hormonothérapie adjuvante si la tumeur exprime également des récepteurs hormonaux [RH]», affirme la Dre Piccart-Gebhart, investigatrice principale de l’essai HERA.

Lors de l’essai HERA, plus de 5000 patientes, qui présentaient un cancer du sein HER2+ avec atteinte ganglionnaire ou un cancer du sein à risque élevé sans atteinte ganglionnaire après une chimiothérapie néoadjuvante ou adjuvante standard, ont été réparties aléatoirement dans trois groupes : traitement de un an ou de deux ans par le trastuzumab ou observation. HERA était un essai unique du fait que les patientes pouvaient recevoir au moins quatre cycles d’un vaste éventail de protocoles de chimiothérapie, avec ou sans radiothérapie, avant le traitement par le trastuzumab. Le tiers des patientes présentaient un cancer sans atteinte ganglionnaire, et la moitié des cancers exprimaient des RH.

La Dre Piccart-Gebhart, qui rapportait les résultats de HERA après un suivi d’une durée médiane de un an, note que le trastuzumab a prolongé la survie sans récidive (SSR) de manière significative par comparaison à la seule observation, le risque de récidive ayant baissé de 46 % , ce qui correspond à un gain absolu de SSR de 8,4 % après deux ans, et cet avantage a été observé dans tous les sous-groupes. Le traitement a aussi prolongé la SG, le risque de mortalité ayant été réduit du tiers.

Les bienfaits l’emportent sur les risques

«Des bienfaits aussi remarquables s’obtiennent toujours au prix d’un risque quelconque, mais le prix à payer n’est vraiment pas trop élevé dans le cas du trastuzumab, fait valoir la Dre Piccart-Gebhart. Le risque d’insuffisance cardiaque [IC] sévère variait entre 0,4 % et 3,8 % dans les quatre essais d’envergure. L’incidence d’IC de classe III/IV selon la New York Heart Association était faible également, 0,5 % chez les patientes sous trastuzumab et 0 % dans le groupe en observation. Un seul décès d’origine cardiaque a été enregistré dans le groupe en observation.»

La Dre Piccart-Gebhart a décrit diverses options de chimiothérapie pour les femmes atteintes d’un cancer du sein HER2+. À son avis, deux facteurs clés devraient dicter l’individualisation du traitement : l’estimation du risque cardiaque fondée sur les facteurs de risque de la cardiotoxicité observés dans les essais cliniques – comme l’âge de la patiente et une faible fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) en début de traitement – et le risque de récidive précoce, qui est particulièrement élevé en présence d’une atteinte ganglionnaire ou d’un cancer sans RH. «Si l’on tient compte de ces deux facteurs, on opterait par exemple pour un protocole à base d’un platine et d’un taxane, sans anthracycline, chez les femmes exposées à un risque élevé de récidive précoce ET de cardiotoxicité, poursuit-elle. Il serait aussi possible d’opter pour le protocole séquentiel que l’on a évalué dans le cadre de l’essai HERA et qui a été conçu pour les femmes exposées à un risque légèrement plus faible de récidive précoce.»

Même si le trastuzumab augmente le risque de dysfonction cardiaque, le problème est généralement réversible et traitable, note la Dre Piccart-Gebhart. «La crainte d’un trouble cardiaque imputable au trastuzumab ne doit pas éclipser les bienfaits importants [qui lui sont associés]», prévient-elle.

NOAH : en quête d’une réponse complète pathologique

L’essai NOAH (Neoadjuvant Herceptin) avait pour objectif d’évaluer le trastuzumab administré en néoadjuvant avec une chimiothérapie dans le cancer du sein localement avancé HER2+. Dans le cadre de cet essai, 228 patientes ont reçu aléatoirement trois cycles de doxorubicine/paclitaxel, quatre cycles de paclitaxel et trois cycles du protocole CMF avec ou sans trastuzumab en concomitance (dose d’attaque de 8 mg/kg, puis 6 mg/kg toutes les trois semaines pendant un an) avant la chirurgie. En tout, 99 patientes atteintes d’un cancer du sein HER2- ont reçu le même protocole de chimiothérapie. Auparavant, Gianni et al. (ASCO 2007, résumé 532) avaient rapporté que chez les femmes atteintes d’un cancer du sein HER2+, l’ajout du trastuzumab augmentait significativement le taux de réponse complète pathologique (RCp), celle-ci étant passée de 23 % à 43 % (p=0,002) (Figure 1).

Figure 1. Taux de RCp lors de l’essai NOAH


Lorsqu’il a fait le point sur l’essai NOAH, le Dr Wolfgang Eiermann, Clinique de la Croix-Rouge pour les femmes, Munich, Allemagne, a fait état d’une analyse multivariable des facteurs prédictifs de la RCp. Les résultats ont révélé que l’ajout du trastuzumab et l’absence de récepteurs de progestérone (RPg) étaient les deux seules variables annonciatrices d’une RCp chez les patientes atteintes d’un cancer du sein HER2+. Chez les patientes qui n’avaient pas reçu de trastuzumab, le statut de HER2 n’a aucunement influé sur les résultats; par contre, le statut des RPg était un prédicteur important de la RCp. «Ces données soulignent la pertinence d’un lien entre les RH et le récepteur HER2 dans la modulation de la réponse au trastuzumab», conclut-il. Optimisation de l’issue du traitement néoadjuvant

Selon la première analyse de l’efficacité et de l’innocuité du traitement évalué dans l’essai allemand GeparQuattro que présentait le Dr Michael Untch, HELIOS Klinikum, Berlin, Allemagne, l’administration de l’association trastuzumab/chimiothérapie standard avant et après la chirurgie a permis d’éliminer la tumeur complètement chez 45,5 % des femmes atteintes d’un cancer du sein précoce HER2+. Il s’agit là d’un résultat remarquable, précise-t-il, car la proportion de femmes chez qui la tumeur peut être éliminée complètement par la seule chimiothérapie standard est inférieure à 30 %.

L’essai GeparQuattro, le plus vaste à ce jour sur le traitement néoadjuvant du cancer du sein HER2+, portait sur 1510 femmes atteintes d’un cancer du sein, dont 453 présentaient une tumeur surexprimant le récepteur HER2. Les patientes recevaient quatre cycles de l’association épirubicine/cyclophosphamide, après quoi elles étaient randomisées de façon à recevoir soit quatre cycles de docetaxel seul (traitement de référence), soit quatre cycles de docetaxel/capécitabine (traitement concomitant), soit quatre cycles de docetaxel suivis de quatre cycles de capécitabine (traitement séquentiel). En outre, les patientes présentant une tumeur HER2+ recevaient du trastuzumab à raison de 6 mg/kg toutes les trois semaines en concomitance avec n’importe quelle chimiothérapie néoadjuvante (avant l’intervention chirurgicale) et pendant un maximum de un an après la chirurgie.

À 15 mois, les chercheurs n’ont repéré aucune trace de cancer dans les seins de 41,3 % des femmes atteintes d’un cancer du sein HER2+ qui avaient reçu à la fois la chimiothérapie et le trastuzumab, alors que le taux de RCp n’était que de 19,5 % chez les femmes qui n’avaient pas reçu l’AcM (p<0,001). Par contre, ils n’ont pas noté de différence significative quant aux taux de chirurgie mammaire conservatrice selon que les patientes avaient reçu ou non du trastuzumab : 61,8 % vs 63,1 %, respectivement.

La toxicité observée chez les patientes qui ont reçu une chimiothérapie et du trastuzumab en néoadjuvant n’était pas plus prononcée que chez celles qui ont reçu seulement une chimiothérapie néoadjuvante, affirme le Dr Untch. «Chez 97 % des patientes présentant un cancer HER2+ et 96 % des patientes présentant un cancer HER2-, la FEVG était supérieure à 55 %, et la FEVG n’a chuté sous le seuil de 45 % chez aucune patiente. Aucun cas d’IC ni décès d’origine cardiaque n’a été signalé.» Sur le plan de l’innocuité cardiaque, l’administration concomitante ou séquentielle d’une anthracycline n’a même soulevé aucune crainte.

«Il est très rassurant que l’essai GeparQuattro ait confirmé les gains appréciables observés sous l’effet du trastuzumab dans d’autres essais comme NOAH, car nous savons maintenant que l’on peut obtenir de bons résultats en l’administrant avec divers protocoles de chimiothérapie à différentes populations de patientes», conclut-il.

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