Comptes rendus

Prophylaxie et traitement des thrombo-embolies veineuses : de nouveaux besoins
Manipulations thérapeutiques pour prolonger la survie en présence de tumeurs cérébrales malignes : résultats d’études de phase II et III

Prise en charge globale du patient glaucomateux

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 8e Congrès de la Société européenne du glaucome

Berlin, Allemagne / 1er-6 juin 2008

Comme le rapporte le Dr Antonio Martinez, Institut galicien d’ophtalmologie, La Corogne, Espagne, des données indiquent que le dorzolamide – inhibiteur de l’anhydrase carbonique (IAC) – associé au timolol est efficace non seulement pour abaisser la pression intraoculaire (PIO), mais également pour limiter ou retarder la dégradation du champ visuel chez les patients atteints de glaucome primitif à angle ouvert (GPAO). Cet avantage découle fort probablement de ses effets bénéfiques sur l’hémodynamique oculaire, soit l’accélération du débit sanguin et l’amélioration de l’irrigation de la rétine et du nerf optique, explique-t-il.

À l’aide de mesures effectuées par échographie Doppler couleur, le Dr Martinez a établi une corrélation entre la vitesse de dégradation du champ visuel et les variations du débit sanguin dans l’artère ophtalmique et les artères ciliaires courtes postérieures. Il a ainsi constaté que la dégradation était cinq fois plus rapide lorsque l’indice de résistance (IR) calculé par Doppler couleur avait une valeur considérée comme pathologique dans une artère, et près de huit fois plus rapide lorsque les deux types d’artères présentaient des valeurs anormales. Son équipe a également mis en évidence une accélération du débit sanguin et une diminution de l’IR des artères choroïdienne et centrale de la rétine qui étaient «très probablement» liées à des variations du champ visuel, précise-t-il. En outre, après avoir comparé l’association fixe dorzolamide/timolol avec le latanoprost chez des patients souffrant de GPAO, ils ont constaté que, même si les deux traitements avaient autorisé une baisse similaire de la PIO, seule l’association fixe avait amélioré la perfusion sanguine oculaire dans les vaisseaux rétrobulbaires. Le latanoprost a eu un effet non significatif sur l’hémodynamique rétrobulbaire, souligne-t-il.

Le Dr Martinez a récemment comparé l’effet à long terme du dorzolamide à celui du brinzolamide – tous deux ajoutés au timolol – sur la vitesse du débit sanguin rétrobulbaire, la PIO et la dégradation du champ visuel dans le cadre d’une étude à l’insu, randomisée et prospective d’une durée de 60 mois qui regroupait 146 patients atteints de GPAO. «Alors que le dorzolamide associé au timolol a diminué significativement l’IR de l’artère ophtalmique, le brinzolamide n’a provoqué aucune variation de l’hémodynamique rétrobulbaire lorsqu’il était ajouté au timolol. Au cours de cette étude, le traitement par l’association dorzolamide à 2 % et timolol à 0,5 % a réduit le risque de dégradation du champ visuel de 47 % comparativement à l’association fixe comportant du brinzolamide, note-t-il. On a calculé un taux de survie de 71,4 % dans le groupe dorzolamide/timolol vs 46,1 % pour les yeux traités par le brinzolamide/timolol [p=0,0019].»

Aucun écart statistiquement significatif n’a été observé entre les deux groupes de traitement quant à la réduction de la PIO, et l’association brinzolamide/timolol n’avait entraîné aucune variation de l’hémodynamique rétrobulbaire après 60 mois. On a donc postulé que la différence marquée de l’effet des deux IAC sur la progression des atteintes glaucomateuses était probablement imputable à l’activité vasculaire du dorzolamide, lequel a augmenté significativement la vitesse télédiastolique dans l’artère ophtalmique (p<0,0001), les artères ciliaires courtes postérieures de la zone temporale (p<0,0001) et l’artère centrale de la rétine (p<0,0001). Le dorzolamide associé au timolol a en outre réduit significativement l’IR de ces mêmes artères (p<0,0001, p=0,0037 et p=0,0028, respectivement).

Les investigateurs ont conclu que l’association dorzolamide à 2 % et maléate de timolol à 0,5 % administrée deux fois par jour semble un traitement plus efficace que le latanoprost ou le brinzolamide pour limiter et retarder la progression des déficits du champ visuel chez les patients atteints de GPAO.

Maîtrise de la PIO sur 24 heures

Comme le glaucome est une affection circadienne et que les fluctuations de la PIO sur 24 heures amplifient notablement le risque de progression du glaucome, le Pr Anastasios Konstas, professeur agrégé d’ophtalmologie, Université Aristote de Thessalonique, et chef de l’unité du glaucome, Hôpital universitaire AHEPA, Grèce, a souligné l’importance de maîtriser la PIO tout au long du nycthémère. L’association fixe dorzolamide/timolol procure une maîtrise constante de la PIO sur 24 heures, affirme-t-il.

«Dans la pratique actuelle, le suivi du glaucome repose généralement sur une mesure isolée de la PIO à chaque consultation, mais en ne réalisant qu’une seule mesure, nous ne pouvons pas préciser ses caractéristiques sur 24 heures, comme les fluctuations diurnes et nocturnes et les pics pressionnels, fait-il valoir. Une évaluation de la PIO circadienne peut fournir un tableau plus complet de l’efficacité réelle de toutes les options du traitement antiglaucomateux.» Ainsi, lors de l’une des premières études sur la maîtrise de la PIO sur 24 heures, la prise en compte de toutes les mesures de la courbe pressionnelle diurne a fait ressortir un avantage d’environ 0,6 mmHg en faveur du dorzolamide/timolol utilisé deux fois par jour par rapport au latanoprost administré le soir en une dose, ce qui représentait une amélioration significative, fait-il observer. On peut raisonnablement supposer qu’une meilleure maîtrise de la PIO tout au long du nycthémère améliorera le pronostic du glaucome chez les patients atteints de GPAO et d’hypertension oculaire, indique-t-il.

Le Pr Konstas a également exploré les effets hypotenseurs de ces deux traitements sur la PIO circadienne. Lors d’une étude qui comportait des évaluations après deux et six mois de traitement réalisées chez 39 patients atteints de GPAO et 14 patients atteints d’hypertension oculaire, il a constaté les résultats suivants : bien que les deux traitements aient réduit la PIO à 2 mois par rapport aux valeurs de départ, l’association fixe a autorisé une réduction significative (p=0,002) de la pression moyenne sur 24 heures comparativement au latanoprost, réduction qui tenait surtout à des différences significatives à 10 h (p<0,0001) et à 22 h (p<0,0001). À six mois, on n’a pas relevé d’écart significatif entre les deux groupes de traitement quant à la pression moyenne sur 24 heures, ce qui évoque une efficacité clinique à long terme similaire de l’association fixe et du latanoprost au chapitre de la réduction de la PIO.

Traitement d’association

La dernière étude menée par le Pr Konstas avait pour objet d’évaluer l’efficacité sur 24 heures de trois options de traitement de deuxième intention utilisées à titre adjuvant dans une cohorte de sujets porteurs d’un GPAO ou d’un glaucome exfoliatif chez qui le latanoprost n’apportait pas une maîtrise suffisante. Précisons que l’essai n’incluait aucun non-répondeur à quelque antiglaucomateux que ce soit.

Au total, 32 patients ont été randomisés en vue de recevoir le dorzolamide/timolol en association fixe deux fois par jour, le latanoprost/timolol en association fixe le soir ou le latanoprost associé au dorzolamide/timolol, pendant trois mois; au terme de cette période, tous les patients changeaient alternativement de traitement et leur PIO était mesurée en position assise toutes les quatre heures pendant une journée. «Au chapitre de la réduction de la PIO, aucun écart significatif n’a été observé entre les deux associations fixes dorzolamide/timolol [19,9 ± 3,2 mmHg] et latanoprost/timolol [19,5 ± 3,1 mmHg], mais les deux ont autorisé une maîtrise de la PIO sur 24 heures significativement meilleure que le latanoprost en monothérapie, signale le Pr Konstas. Le schéma dorzolamide/timolol plus latanoprost a toutefois donné lieu à la courbe de pression circadienne de loin la plus favorable. En effet, comparativement au latanoprost en monothérapie, c’est la stratégie alliant le dorzolamide/timolol et le latanoprost qui a été associée aux valeurs les plus basses pour la PIO sur 24 heures moyenne [16,5 ± 2,8 mmHg] [p<0,0001] de même que pour chacune des mesures de la PIO réalisées au cours de la journée [p<0,0032]», poursuit-il.

Données canadiennes

Le Pr Konstas a cité une étude canadienne de phase IV menée par le Dr Mark Lesk, directeur, unité de recherche en ophtalmologie, Université de Montréal, Hôpital Maisonneuve-Rosemont, Québec, à laquelle ont pris part 350 patients n’ayant pas atteint la PIO cible après quatre semaines ou plus de traitement par le latanoprost seul, contrairement à l’effectif de sa propre étude qui ne comprenait aucun non-répondeur. L’objectif de l’étude était d’évaluer l’efficacité et l’innocuité de l’association fixe dorzolamide/timolol utilisée seule ou avec le latanoprost pour réduire la PIO dans un contexte de pratique réelle. Les chercheurs ont ajouté l’association fixe au latanoprost chez 280 patients atteints de GPAO ou d’hypertension oculaire et ont fait passer les 70 autres patients du latanoprost à l’association fixe. Les paramètres d’évaluation étaient la variation absolue et en pourcentage de la PIO à six et à 12 semaines par rapport aux valeurs de départ et la proportion de répondeurs.

Après 12 semaines de traitement, 186 des 280 patients (66,4 %) du groupe dorzolamide/timolol ajouté au latanoprost avaient obtenu une réponse au traitement – définie comme une baisse >20 % de la PIO par rapport aux valeurs de départ – comparativement à 37 des 70 patients (52,9 %) du groupe étant passé du latanoprost à l’association fixe. En outre, la réduction obtenue était >30 % pour 116 patients (41,4 %) du premier groupe et 21 patients (30 %) du second groupe. Aucun effet indésirable grave relatif aux médicaments à l’étude n’a été signalé. Au vu des résultats de cette étude de phase IV, l’association dorzolamide/timolol, utilisée seule ou en concomitance avec le latanoprost, se révèle une option sûre et efficace pour abaisser la PIO et produire une réponse thérapeutique.

Comme l’a déjà indiqué le Pr Konstas, des trois options évaluées au cours de sa propre étude, c’est l’ajout du dorzolamide/timolol au latanoprost qui a autorisé la PIO la plus basse, que l’on considère la PIO moyenne sur 24 heures [16,5 ± 2,8 mmHg] [p<0,0001] ou la PIO mesurée à différents moments de la journée [p<0,0032]. Selon les résultats de cette étude, les associations fixes dorzolamide/timolol et latanoprost/timolol et le schéma dorzolamide/timolol plus latanoprost ont tous réduit significativement la PIO sur 24 heures comparativement au latanoprost seul, mais ce dernier schéma a fait mieux que les deux autres.

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