Comptes rendus

Le point sur le traitement épisodique de courte durée de l’herpès
Nouvelles données sur les retombées de la maîtrise de la MPOC et de l’asthme

Puissance, tolérabilité et simplicité : ingrédients clés du succès à long terme du traitement de l’infection à VIH

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La XVIe Conférence internationale sur le SIDA

Toronto, Ontario / 13-18 août 2006

L’objectif premier du traitement de l’infection à VIH est d’obtenir une suppression maximale et durable de la charge virale (CV); autrement, la poursuite du traitement au moyen de schémas sous-optimaux ou en voie d’échec jusqu’à ce que le patient montre des signes de progression clinique – comme on est contraint de le faire dans les pays en développement – conduira inévitablement à l’apparition de mutations de résistance, affirme le Dr Joep Lange, professeur titulaire de médecine, Université d’Amsterdam, Pays-Bas. Il existe de nombreuses associations d’antirétroviraux (ARV) efficaces, mais, comme l’indique ce dernier, «ce sont les données sur les schémas à base de lopinavir/ritonavir [LPV/r] qui sont les plus probantes».

Le Dr Lange a examiné les résultats de l’analyse des sujets sous traitement de l’essai pivot 720 au cours duquel des patients n’ayant jamais reçu d’ARV ont été traités par le schéma LPV/r plus d4T et lamivudine (3TC). Les résultats à sept ans ont montré que le virus est demeuré indécelable chez presque tous les patients. Dans la même étude, l’augmentation absolue moyenne du nombre de cellules CD4+ était de 776 cellules/mm3. Cette augmentation est survenue pour toutes les strates de taux de lymphocytes CD4+, «ce qui signifie que les patients qui sont partis d’un nombre de cellules CD4+ très faible (<50 cellules/mm3) ont aussi présenté cette augmentation, fait-il observer, et la grande majorité des sujets ont eu une augmentation de plus de 500 cellules/mm3, si bien que ces patients sont presque normaux ou normaux du point de vue immunologique». En fait, les données de quatre études sur le LPV/r administré à des patients n’ayant jamais reçu de traitement antérieur indiquent que, en deçà d’une CV de plus de 300 000 copies/mL, «il n’y a pas vraiment de différence quant au taux de succès virologique, ce qui montre que nous disposons d’un schéma très robuste», confirme le Dr Lange.

Réévaluation des inhibiteurs de la protéase

L’autre découverte décisive associée aux schémas comportant un inhibiteur de la protéase (IP) potentialisé a trait à l’improbabilité de l’émergence de résistances à en juger par les observations faites à ce jour, et ce, même en cas de rebond de la virémie. Comme l’explique le Dr Charles Boucher, professeur agrégé de microbiologie médicale, Université d’Utrecht, Pays-Bas, les IP potentialisés par le ritonavir – comparativement aux IP non potentialisés – sont habituellement plus puissants et possèdent une barrière génétique plus forte vis-à-vis de la résistance. «De plus, de multiples mutations de la protéase pourraient être nécessaires pour qu’une résistance au médicament significativement clinique apparaisse», note-t-il.

Par exemple, dans l’essai 720, aucun patient n’a acquis de résistance au LPV/r ni à la d4T au cours des sept ans de l’étude, ce qui indique que la stratégie fondée sur un IP potentialisé pourrait protéger contre l’apparition de résistances aux analogues nucléosidiques également. Cela est très différent de la situation observée dans le cas des inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI) où une seule mutation peut conférer une résistance à l’ensemble des INNTI. En fait, l’émergence de résistances aux INNTI chez les patients dont l’infection est nouvellement diagnostiquée dans les pays en développement est une «tendance inquiétante» précisément pour cette raison, note le Dr Boucher. «Si on choisit des associations qui ont une barrière génétique élevée et que les patients sont capables de prendre et de tolérer, on peut maintenir le succès du traitement à long terme», soutient-il.

Viabilité à long terme

Si la puissance des ARV est un élément clé du succès à long terme du traitement, il en est de même de la tolérabilité et de la facilité d’emploi des schémas. Comme le rappelle le Dr Joseph Gathe, clinicien en médecine interne et professeur adjoint de médecine clinique, Baylor College of Medicine, Houston, Texas, la toxicité à court terme des associations d’ARV, en particulier la toxicité gastro-intestinale (GI), est responsable de la majorité des abandons du traitement au cours de la première année. Par conséquent, insiste-t-il, la réduction optimale de la toxicité est aussi un principe prédominant de la prise en charge de l’infection au VIH.

Une nouvelle préparation en comprimé du LPV/r commercialisée depuis 2005 aux États-Unis et que le Dr Gathe a utilisée considérablement dans sa pratique pourrait corriger bon nombre des lacunes des capsules de gélatine molle.

Les capsules de gélatine molle sont sensibles aux températures ambiantes élevées, «ce qui pose particulièrement problème dans ma clinique», note le Dr Gathe. Ces capsules doivent également être prises avec de la nourriture afin que la quantité de médicament disponible pour l’organisme soit maximisée. Autre aspect peut-être plus important, elles contiennent un certain nombre d’excipients, notamment de l’huile de ricin, de l’acide oléique et du sorbitol, qui sont tous individuellement associés à des effets indésirables GI.

La nouvelle préparation en comprimé ne contient aucun de ces excipients et devrait donc être associée à des fréquences plus faibles de troubles GI. Elle n’a pas non plus à être conservée au réfrigérateur et peut se prendre avec ou sans nourriture, permettant donc une exposition constante au LPV/r sans égard aux repas, précise le Dr Gathe. De plus, le fait que le nombre de comprimés à prendre soit moins élevé que le nombre de capsules de gélatine molle – quatre par jour au lieu de six – allège le fardeau médicamenteux chez les patients n’ayant jamais reçu d’ARV. «Nous voulons simplifier le traitement et donner au patient une plus grande marge d’erreur», rappelle-t-il.

Simplification des schémas au moyen de stratégies de monothérapie

L’une de ces stratégies grâce à laquelle les médecins pourront simplifier radicalement les schémas de traitement consiste à administrer le LPV/r seul à titre de traitement d’entretien ou de traitement initial. Au cours d’une série d’études présentées au congrès, les investigateurs ont démontré que ce schéma autorise une maîtrise virologique efficace et soutenue chez la majorité des patients, seuls de faibles taux de rebonds virologiques ayant été signalés. Dans l’une de ces études, le Dr William Cameron, Université d’Ottawa, Ontario, et ses collègues de plusieurs centres ont randomisé 104 patients n’ayant jamais été traités antérieurement dans un groupe devant recevoir le schéma LPV/r plus zidovudine (ZDV) et 3TC pendant au moins 24 semaines, suivi d’une monothérapie d’entretien par le LPV/r une fois atteinte et stabilisée une CV <50 copies/mL; 51 autres patients ont été randomisés dans un groupe traité par le schéma éfavirenz (EFV)/ZDV/3TC pendant les 96 semaines de l’étude. Environ 70 % des patients de chaque groupe de traitement ont terminé l’étude. «Le paramètre principal d’évaluation était la proportion de patients de la population en intention de traiter [IT] ayant maintenu une CV <50 copies/mL jusqu’au terme des 96 semaines», rapporte le Dr Cameron.

À 96 semaines, «on n’observait aucune différence significative pour ce paramètre», poursuit le Dr Cameron, 61 % des patients du groupe LVP/r en monothérapie ayant une CV restée indécelable au terme de l’étude vs 50 % dans le groupe trithérapie. On ne relevait pas non plus de «différences discernables» quant au taux de rebond de la CV à des seuils plus élevés. Un plus grand nombre de patients du groupe monothérapie ont certes présenté un échappement virologique lorsque celui-ci était défini comme une CV >50 copies/mL. Toutefois, fait-il observer, «dans la plupart des cas, l’échappement virologique était de faible ampleur et transitoire». Les patients qui ont présenté un échappement virologique de faible ampleur sont aussi spontanément redevenus avirémiques au seuil de 50 copies/mL, ajoute-t-il, et ceux qui présentaient un échappement virologique plus important le sont redevenus après la réintroduction de l’association ZDV/3TC.

Le Dr José Arribas, Hospital La Paz, Madrid, Espagne, a présenté une autre étude multicentrique dont les résultats à 48 semaines ont démontré la non-infériorité du LPV/r administré seul comme traitement d’entretien par rapport à la stratégie consistant à poursuivre le traitement par le LPV/r plus deux INTI. Étaient admissibles à cette étude les patients qui n’avaient pas d’antécédents d’échec virologique sous traitement comportant un IP et deux INTI et dont la CV était demeurée <50 copies/mL pendant plus de six mois. Le paramètre principal d’évaluation était le pourcentage de patients sans échec thérapeutique, défini comme une CV >500 copies/mL.

À 48 semaines, 94 % des patients du groupe LPV/r et 90 % des patients du groupe trithérapie avaient une CV <500 copies/mL, et le nombre de patients dont la CV était demeurée <50 copies/mL était très similaire dans les deux groupes. Quatre patients ayant présenté un rebond confirmé après la monothérapie par le LPV/r ont à nouveau reçu les INTI comme traitement d’induction, et leur CV est demeurée faible durant le reste de l’étude. «Nous estimons qu’environ 85 % des patients n’ont pas besoin de poursuivre le traitement par deux INTI pour maintenir la charge virale <50 copies», indique le Dr Arribas, ajoutant toutefois qu’une diminution de plus de 10 % de l’observance anéantit la suppression virale.

Résumé

Les lignes directrices actuelles recommandent la trithérapie lors de l’instauration d’un schéma ARV. Cela dit, les problèmes tels que la toxicité, le coût et la complexité des trithérapies stimulent la recherche d’options plus simples. Il appert des données récentes présentées au congrès qu’une stratégie axée sur la monothérapie – utilisée d’entrée de jeu ou après l’obtention d’une avirémie chez des patients n’ayant jamais reçu d’ARV – pourrait simplifier la prise en charge. De plus, les préparations améliorées d’agents existants contribuent à la mise au point de schémas simplifiés et efficaces.

Nota : Au moment où le présent article a été mis sous presse, l’indication du lopinavir/r en monothérapie n’était pas homologuée au Canada.

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