Comptes rendus

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Cancers de la peau non mélaniques : un traitement adjuvant aux modalités invasives

Retombées cliniques du nouveau vaccin quadrivalent contre le virus du papillome humain

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

EUROGIN 2007 Le 7e Congrès multidisciplinaire international

Monte-Carlo, Monaco / 4-6 octobre 2007

«En Europe, le cancer du col vient au deuxième rang des causes de mortalité par cancer chez les jeunes femmes, et environ 33 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année», affirme la Dre Monika Hampl, Hôpital universitaire, Düsseldorf, Allemagne. Le cancer du col est la pointe de la pyramide des lésions imputables au virus du papillome humain (VPH), environ 160 000 cas de néoplasies intraépithéliales cervicales (CIN) agressives de grade 2/3 et 500 000 cas de CIN moins agressives de grade 1 étant diagnostiqués en Europe chaque année.

Les types 16 et 18 sont à l’origine de 59 % et de 12 % des cancers du col, respectivement. Comme environ 90 % des cancers du col peuvent être attribués à une infection par le VPH, un certain nombre d’autres types – chacun étant responsable d’un petit pourcentage de cas – représentent collectivement un nombre important de cancers. La protection croisée contre ces types serait assurément un avantage supplémentaire.

Le lien avec l’infection à VPH est évident, les types 6, 11, 16 et 18 expliquant la plupart des CIN, mais le col utérin n’est pas la seule cible. En Europe, environ 2000 cancers de la vulve et du vagin sont diagnostiqués chaque année, et ces cancers découlent aussi de lésions précancéreuses. Les condylomes acuminés, communément appelés verrues génitales, constituent une autre conséquence de l’infection à VPH, plus précisément des types 6 et 11.

Grâce aux programmes de dépistage, de nombreuses CIN sont décelées avant qu’elles évoluent vers un cancer invasif, mais les tests visant à confirmer le diagnostic et le traitement peuvent être traumatisants pour les patientes, sans oublier que la récurrence est monnaie courante. «L’infection à VPH a de nombreuses autres conséquences, notamment les lésions vulvaires et vaginales de faible grade et les verrues génitales», de conclure la Dre Hampl. Il va de soi qu’un vaccin qui protège contre ces lésions serait d’un grand secours.

Vaccins contre le VPH : comment agissent-ils et pourquoi sont-ils efficaces?

Les deux vaccins contre le VPH développés à ce jour – qui sont fabriqués à partir de pseudoparticules virales (PPV) – ont fait la preuve d’une efficacité clinique et d’une mémoire immunitaire pendant cinq ans. Fait digne de mention, la protection que confèrent ces vaccins est plus grande que la protection conférée par l’infection naturelle. Au dire de la Pre Margaret Stanley, département de pathologie, University of Cambridge, Royaume-Uni, ce phénomène tient au fait que «les PPV sont injectées par voie intramusculaire, ce qui entraîne une puissante réponse anticorps par les cellules dendritiques du stroma». Dans le contexte d’une infection naturelle, en revanche, «la stratégie du virus est d’éviter tout contact avec le système immunitaire, ce qui limite la réponse immunitaire». L’immunogénicité des PPV peut être encore potentialisée par l’aluminium utilisé comme adjuvant à la fois dans le vaccin bivalent et le vaccin quadrivalent. Le vaccin bivalent renferme de l’hydroxyde d’aluminium combiné au lipide monophosphoryl A alors que le vaccin quadrivalent contient une préparation brevetée de sulfate d’hydroxyphosphate d’aluminium. «Lors d’expériences chez la souris, la réponse anticorps au [vaccin quadrivalent] est environ deux fois plus prononcée que la réponse au [vaccin bivalent]», rapporte la Pre Stanley. Elle attribue cette différence à la charge superficielle négative de l’adjuvant breveté qui vient faciliter la fixation et l’activation des PPV.

Les chercheurs se demandent par ailleurs pourquoi la vaccination semble conférer une certaine protection croisée alors que l’infection naturelle n’en confère pas. À cet égard, explique la Pre Stanley, «chaque type de virus génère une réponse prédominante, mais cette réponse n’est pas homogène». Ainsi, bien que la réponse prédominante soit dirigée contre le type spécifique, ces vaccins étant hautement immunogènes, il y a un certain degré de réponse à d’autres types apparentés. Il a aussi été démontré, lorsque les patientes recevaient une quatrième dose après cinq ans, que le vaccin quadrivalent était associé à une mémoire immunitaire. Ainsi, on croit, par extrapolation, que la protection va bien au-delà de la période de cinq ans d’efficacité clinique et de mémoire immunitaire.

Études cliniques sur le vaccin quadrivalent

À ce jour, le vaccin quadrivalent a fait l’objet de trois essais pivots randomisés et comparatifs visant à évaluer son efficacité chez près de 21 000 femmes âgées de 16 à 26 ans en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. D’autres études sont en cours, l’objectif étant de déterminer si le vaccin est efficace chez des femmes plus âgées (jusqu’à 45 ans) et s’il permet de prévenir l’infection chez de jeunes hommes âgés de 16 à 26 ans. De l’avis de la Pre Anna Giuliano, département d’oncologie interdisciplinaire, University of South Florida, «la vaccination de ce [dernier] groupe est la voie de l’avenir pour alléger le fardeau de morbidité global».

Les paramètres d’évaluation de l’efficacité des études pivots étaient l’incidence des lésions de grade élevé liées aux types 6, 11, 16 et 18 au niveau du col utérin, de la vulve et du vagin (néoplasies intraépithéliales de grade 2/3 et adénocarcinomes in situ), qui sont des marqueurs de substitution des cancers invasifs. Des données ont aussi été recueillies sur les lésions de faible grade, les verrues génitales et les infections persistantes. Les analyses principales de l’efficacité ont été effectuées auprès de tous les sujets qui ont terminé l’étude, c’est-à-dire ceux qui ont reçu les trois doses et qui ne présentaient pas d’infection à VPH active pendant le calendrier de vaccination. «Les résultats obtenus dans cette population sont très comparables aux résultats auxquels on s’attend en vaccinant les adolescentes avant le début de la vie sexuelle», précise la Pre Giuliano.

Au cours des trois années de suivi, les chercheurs ont signalé une lésion cervicale de grade élevé au sein de la cohorte vaccinée, contre 85 au sein de la cohorte témoin, ce qui représente une efficacité vaccinale de 99 % (intervalle de confiance [IC] à 95 % : 93 % à 100 %). Dans le cas des lésions vaginales et vulvaires de grade élevé qui étaient liées aux types 16 et 18 du VPH, l’efficacité du vaccin était de 100 %. Les analyses des sous-groupes de femmes latino-américaines et européennes – dont les résultats ont fait l’objet de présentations distinctes – ont révélé que le vaccin était aussi très efficace pour prévenir les lésions de grade élevé, ce qui souligne la solidité des analyses globales et la possibilité d’utiliser le vaccin dans des contextes très différents.

Protection croisée et retombées sur la pratique clinique

Une analyse secondaire de deux des études pivots (n=9291) a permis de constater que l’efficacité du vaccin quadrivalent contre les 10 types les plus oncogènes, excluant les types 16 et 18, était de 38 % (IC : 6 % à 60 %). Cette protection était maximale pour les espèces dites A9 (qui incluent le type 16) et un peu moins marquée pour les espèces A7 (qui incluent le type 18). Selon la Dre Luisa Villa, Institut Ludwig de recherche en oncologie, São Paulo, Brésil, «il s’agit là de la première démonstration d’une protection croisée contre les lésions précancéreuses de grade élevé conférée par un vaccin anti-VPH».

«La vaccination ne remplace pas les cytologies de dépistage», prévient toutefois la Pre Christine Clavel, CHU, Reims, France. Les femmes vaccinées doivent continuer d’être suivies étant donné que ni l’un ni l’autre des vaccins actuellement disponibles ne peut conférer de protection complète contre tous les types oncogènes. Bien qu’on ne sache pas exactement de quelle façon les programmes de dépistage seront modifiés, ils seront moins intensifs. En effet, poursuit le Dr Eduardo Franco, département d’oncologie, CUSM-Université McGill, Montréal, Québec, «si nous commençons à analyser la question intelligemment, nous réussirons peut-être à neutraliser certains coûts du programme de vaccination».

L’un des faits saillants du congrès a été la présentation des grandes lignes d’un consensus de pratique clinique. Les participants, qui étaient tous des experts en la matière, ont eu du mal à expliquer que, vu la nouveauté de ces vaccins, ce consensus relève davantage d’un plan de travail pour orienter la recherche future que d’une série de lignes directrices. Le consensus sera publié intégralement d’ici la fin de 2007. L’essentiel est que les cliniciens doivent faire leur possible pour vacciner tous les sujets ciblés contre le VPH. La surveillance est un autre aspect important, en particulier pour confirmer les preuves actuelles d’une protection durable.

Bien que nous ayons encore beaucoup de pain sur la planche, la protection contre le VPH aura des retombées positives substantielles sur la santé des femmes dans les années à venir.

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