Comptes rendus

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Santé de la prostate : Intervention précoce et prévention chez l’homme âgé

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Urology Update 2006

Toronto, Ontario / 3-4 novembre 2006

L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) entraîne souvent l’apparition de symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) comme la miction impérieuse, la pollakiurie, le retard mictionnel, la miction incomplète et la rétention urinaire, explique le Dr John Trachtenberg, professeur titulaire de chirurgie, division d’urologie, University of Toronto, Ontario.

Comme on le recommande dans les lignes directrices canadiennes, le médecin doit évaluer objectivement les symptômes du patient à l’aide d’une échelle validée comme le score IPSS (International Prostatic Symptom Score) (Nickel et al. Can J Urol 2005;12[3]:2677-83). Le dosage de l’antigène spécifique de la prostate (PSA) devrait aussi être offert à tout homme dont l’espérance de vie est d’au moins 10 ans et chez qui un diagnostic de cancer de la prostate modifierait la stratégie de traitement. Le choix du traitement doit être dicté par la sévérité des symptômes, le degré de gêne que causent ces symptômes et les préférences du patient. Si les symptômes sont bénins, il est possible de les atténuer par une restriction de l’apport liquidien, la non-consommation de caféine, d’alcool et de diurétiques, la programmation des mictions, la rééducation du plancher pelvien et le traitement de la constipation.

Dans les cas où un traitement médicamenteux s’impose, l’un des quatre alpha-bloquants actuellement sur le marché est recommandé. Il peut être administré en concomitance avec un inhibiteur de la 5-alpha réductase, comme le finastéride ou le dutastéride, chez les patients qui présentent des SBAU et une hypertrophie avérée de la prostate.

Résultats de l’étude MTOPS

MTOPS (Medical Therapy of Prostate Symptoms) est l’étude qui a le mieux montré l’efficacité d’un alpha-bloquant et d’un inhibiteur de la 5-alpha réductase. Plus de 3000 hommes présentant des SBAU modérés à sévères secondaires à l’HBP ont reçu aléatoirement un placebo, la doxazosine seule, le finastéride seul ou l’association doxazosine-finastéride.

Après un suivi moyen de 4,5 ans, le risque de progression clinique (augmentation d’au moins quatre points du score des symptômes de l’American Urological Association par rapport au score initial), de rétention urinaire aiguë, d’incontinence urinaire, d’insuffisance rénale ou d’infections urinaires récurrentes avait baissé de 39 % dans le groupe doxazosine et de 34 % dans le groupe finastéride, par rapport au groupe placebo. Chez les patients qui recevaient l’association, le risque de progression clinique avait chuté de 66 %, ce qui représente une différence significative par rapport aux deux groupes monothérapie. Fait intéressant, le risque de progression des symptômes jusqu’à la rétention urinaire aiguë ou à l’intervention chirurgicale a baissé significativement sous l’effet du traitement d’association et du traitement par le finastéride, mais pas sous l’effet de la doxazosine en monothérapie.

«Cette étude revêt une importance capitale, car elle nous a permis de cerner quels sujets sont à risque et de comprendre comment on peut réduire le risque», observe le Dr Trachtenberg. Par exemple, trois catégories de risque se sont précisées lorsque les sujets de l’étude MTOPS ont été stratifiés en fonction du volume de la prostate ou du taux de PSA (marqueur de substitution). Les patients les moins à risque de progression clinique étaient les patients dont la prostate était de petite taille (<25 cm³). Les patients dont la prostate avait un volume compris entre 25 et 40 cm³ étaient à risque modéré de progression, alors que les patients les plus à risque étaient ceux dont la prostate mesurait >40 cm³. «Si l’on traite uniquement les patients les plus à risque, c’est-à-dire ceux dont le taux de PSA est >4 ng/mL ou dont le volume de la prostate est >40 cm³, il suffit de traiter cinq patients pour prévenir un cas de progression», d’enchaîner le Dr Trachtenberg.

Inversement, les patients dont la prostate est très petite ou dont le taux de PSA est <1,5 ng/mL «ont d’aussi bons résultats sous alpha-bloquant et n’ont pas besoin d’un traitement d’association», note-t-il. Chez un patient à risque modéré, c’est le «jugement du clinicien» qui doit dicter la conduite à tenir, estime le Dr Trachtenberg. Selon les lignes directrices, on peut mettre fin au traitement par un alpha-bloquant après six à 12 mois si le patient répond au traitement d’association.

«D’un point de vue clinique, la plus grande retombée de cet essai a été la prévention réelle de la progression jusqu’à la rétention ou à l’intervention chirurgicale grâce à l’inhibiteur de la 5-alpha réductase, souligne le Dr Trachtenberg. Il est bien évident que le patient voudra éviter la rétention urinaire ou la chirurgie.»

HBP et prostatite

Comme l’explique le Dr Curtis Nickel, professeur titulaire d’urologie, Queen’s University, Kingston, Ontario, la prostatite est monnaie courante chez les hommes en bonne santé de tout âge, mais il y a un chevauchement considérable avec l’HBP. Contrairement à l’HBP, qui se caractérise par des SBAU liés à la miction, la prostatite se caractérise surtout par la douleur, notamment une douleur ou un malaise à l’éjaculation. Le plus souvent, la prostatite chronique (PC) ou le syndrome douloureux pelvien chronique (SDPC) sont de catégorie III. Une étude réalisée récemment sous l’égide des National Institutes of Health a révélé que, chez des hommes qui présentaient des symptômes modérés à sévères de PC/SDPC depuis longtemps et qui avaient déjà reçu un alpha-bloquant, le traitement par la ciprofloxacine ou la tamsulosine, en monothérapie ou en association, ne se traduisait par aucun avantage significatif, à tout le moins après six semaines.

En revanche, les mêmes agents se sont avérés efficaces chez des patients dont le diagnostic était récent et qui n’avaient jamais reçu d’alpha-bloquant. Ces agents doivent toutefois être administrés pendant plus de six semaines pour être efficaces. Selon le seul essai randomisé et comparatif avec placebo dans lequel on a mesuré des paramètres validés de la prostatite, on a observé une légère amélioration des symptômes de la prostatite non bactérienne chronique chez 75 % des hommes traités par le finastéride vs 54 % des sujets du groupe placebo, et une amélioration modérée ou marquée chez 44 % et 27 % des patients, respectivement. «L’HBP et la PC sont des affections courantes qui sont souvent présentes simultanément chez les hommes âgés, conclut le Dr Nickel, et les alpha-bloquants, peut-être même les inhibiteurs de la 5-alpha réductase, ont un rôle à jouer dans la prise en charge des deux affections concomitantes.»

Résultats de l’étude PCPT

Du point de vue de la chimioprophylaxie, les résultats de l’étude PCPT (Prostate Cancer Prevention Trial) revêtent une grande importance. Cette étude parrainée par le National Cancer Institute – la plus vaste étude d’intervention jamais réalisée en urologie – a montré que le finastéride réduisait de 25 % le risque de cancer de la prostate décelable par rapport au placebo. L’augmentation absolue de 1,3 % de la prévalence des tumeurs de grade élevé (score de Gleason de 8 à 10) dans le groupe finastéride a ensuite fait couler beaucoup d’encre.

Parlant au nom du Groupe de consensus canadien qui a passé les données de l’étude PCPT en revue, le Dr Laurence Klotz, professeur titulaire de chirurgie, division d’urologie, University of Toronto, déclarait : «Les analyses subséquentes ont indiqué que, selon toute vraisemblance, la prévalence accrue [de tumeurs de grade élevé] tenait à un biais de détection causé par le volume moindre de la prostate chez les patients sous finastéride, par comparaison au placebo. Le deuxième point clé, poursuit le Dr Klotz, est que le dosage du PSA est en fait plus précis chez les patients qui ont reçu un inhibiteur de la 5-alpha réductase. C’est donc dire que si un traitement par un inhibiteur de la 5-alpha réductase n’abaisse pas le taux de PSA d’au moins 50 % par rapport au taux initial, il y a fort à parier que l’on a affaire à un cancer et, plus précisément, à une tumeur de grade élevé.»

Après avoir revu les données de l’étude PCPT indépendamment, les membres du Groupe de consensus canadien ont conclu que l’inhibiteur de la 5-alpha réductase est «un traitement approprié et efficace» chez les patients présentant à la fois des SBAU et une hypertrophie de la prostate (>30 cm³). Si l’on suppose l’existence d’un effet de classe, «les associations d’un alpha-bloquant et d’un inhibiteur de la 5-alpha réductase seraient toutes aussi efficaces les unes que les autres», ajoutent les chercheurs. Néanmoins, les «données les plus solides» dont on dispose pour étayer l’innocuité et l’efficacité du traitement d’association proviennent d’études sur la doxazosine et le finastéride, précisent-ils. Chez les hommes présentant des SBAU et dont la prostate est volumineuse, «on devrait envisager un inhibiteur de la 5-alpha réductase à la fois pour traiter l’HBP et réduire le risque de cancer de la prostate». Sur le plan de la prévention du cancer de la prostate, s’entendent les experts, l’étude PCPT a montré que le finastéride réduisait significativement la prévalence du cancer de la prostate objectivé à l’examen histologique. Cela dit, préviennent les membres du Groupe de consensus, «un effet de classe n’a pas encore été établi, de sorte que la conclusion ne peut pas s’appliquer d’office au dutastéride».

Par conséquent, il a été jugé «approprié» de discuter de chimioprévention par le finastéride avec les hommes qui craignent un cancer de la prostate. Il importe alors de souligner à la fois les bienfaits et les risques associés au traitement à long terme et, une fois le traitement instauré, d’être à l’affût du cancer de la prostate.

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