Comptes rendus

Mécanisme novateur dans le traitement de l’hypertension : blocage du système rénine-angiotensine en amont
Nouveaux développements dans la prise en charge de l’hémorragie intracérébrale

Taux cibles de LDL plus faibles attendus dans les lignes directrices de 2006

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 22e Colloque annuel sur la santé cardiovasculaire à Lac Louise

Lac Louise, Alberta / 26-30 mars 2006

Plusieurs questions importantes entourant les nouvelles recommandations attendues du Groupe de travail sur l’hypercholestérolémie et d’autres dyslipidémies ont fait l’objet de discussions au congrès. Les prochaines lignes directrices seront fondées sur les nouvelles données cliniques issues d’essais menés au Canada et dans d’autres pays, entre autres aux États-Unis et au Royaume-Uni. En raison du profil démographique changeant du Canada, dont une proportion élevée de personnes âgées et la prévalence croissante de l’obésité et du diabète, le Dr Jacques Genest, fils, directeur de la cardiologie, CUSM-Hôpital Royal Victoria, et professeur titulaire de médecine, Université McGill, Montréal, Québec, et ses collègues estiment que des mesures de prévention s’imposent si l’on aspire à réduire l’ampleur de la maladie cardiovasculaire (CV).

Les premières lignes directrices du Groupe de travail ont été émises en 2000. Compte de la publication de nouvelles données, une mise à jour a été publiée en 2003 (Genest et al. CMAJ 2003;168[9]:921-4). En 2006, le Groupe de travail prévoit publier une nouvelle mise à jour à la lumière d’études supplémentaires. Ces recommandations, qui font consensus chez un grand nombre de spécialistes de la santé CV, pourront guider d’autres spécialistes de la santé CV, les médecins de soins primaires et certains organismes spécialisés comme l’Association canadienne du diabète et la Société canadienne d’hypertension artérielle, pour ne nommer que ceux-là. Les taux cibles recommandés, qui sont typiquement subdivisés en fonction du niveau de risque (faible, modéré ou élevé), visent deux paramètres : le taux de C-LDL et le ratio cholestérol total (CT):C-HDL. Le ratio – qui est décrit comme un «indice du risque CV» – est un objectif secondaire du traitement.

Nouvelles recommandations attendues

«En présence d’un risque élevé, on vise un taux de C-LDL <2,0 mmol/L ou un ratio [CT:C-HDL] <4,0 mmol/L», affirme le Dr Genest. Les nouveaux taux cibles seront plus faibles que les taux recommandés dans les lignes directrices de 2003 (C-LDL <2,5 mmol/L). «Les chasseurs-cueilleurs et les nouveau-nés ont un taux de C-LDL qui varie entre 0,5 et 1,0 mmol/L, et c’est bien suffisant», dit-il.

En prévision de la publication de la mise à jour des lignes directrices sur les dyslipidémies, le Dr Genest a annoncé que ses collègues et lui-même recommanderaient un taux de C-LDL <2,0 mmol/L, lequel devrait être atteint par une combinaison de la modification des habitudes de vie et de la pharmacothérapie. Il a passé en revue quelques-uns des essais d’envergure en cours qui plaident en faveur de ces nouvelles cibles.

C’est aussi la position du Dr David Waters, professeur titulaire de médecine, University of California, San Francisco, et chef de la cardiologie, San Francisco General Hospital. «Des essais réalisés récemment chez des patients dont la maladie coronarienne était stable indiquent que le bénéfice peut être plus marqué si l’on abaisse le taux de C-LDL en deçà du taux cible traditionnel», qui était tout au plus de 2,6 mmol/L. En fait, selon des résultats d’études plus récentes, comme l’essai randomisé TNT (Treating to New Targets) qui portait sur plus de 10 000 patients répartis dans 14 pays, le Dr Waters et ses collègues estiment qu’un taux de C-LDL de 1,9 mmol/L «pourrait se traduire par un bienfait clinique supplémentaire» (Waters et al. Am J Cardiol 2004;93[2]:154-8). De même, l’étude PROVE IT-TIMI 22 (Pravastatin or Atorvastatin Evaluation and Infection Therapy-Thrombolysis in Myocardial Infarction 22) qui regroupait 4162 patients a révélé qu’un taux de C-LDL de 1,8 mmol/L était plus efficace que le taux standard de 2,6 mmol/L. Après deux ans, les chercheurs ont noté une réduction relative de 16 % du risque de survenue du paramètre principal, soit la mort, les infarctus du myocarde et les AVC. Ils ont constaté que les bienfaits du traitement devenaient apparents dans un court délai de 30 jours et qu’ils demeuraient constants au fil du temps (Rouleau J. Am J Med 2005;118[Suppl 12A]:28-35). Il est également ressorti d’autres études, comme REVERSAL (Reversal of Atherosclerosis with Aggressive Lipid Lowering), autre analyse d’envergure regroupant 34 centres et 654 patients de partout aux États-Unis, que ces taux cibles plus faibles de C-LDL sont cliniquement plus avantageux (Nissen SE. Am J Cardiol 2005;96[5A]:61F-68F).

Combler l’écart

Il y a souvent un écart entre ce que la recherche démontre comme étant souhaitable et la réalité clinique. On parle souvent d’écart thérapeutique ou d’écart entre la théorie et la pratique pour désigner le fossé qui sépare les recommandations issues de la recherche de la pratique clinique. En effet, une étude a révélé que, parmi 23 129 patients sondés au Canada, seulement 37 % des patients hypertendus (au moins 140/90 mmHg) non traités savaient qu’ils étaient atteints d’hypertension et «74 % des patients non traités savaient qu’un diagnostic d’hypertension nécessiterait un traitement médicamenteux». Les auteurs en ont conclu qu’il existe «un écart majeur quant à la maîtrise de l’hypertension» (Kahn HS. BMC Cardiovasc Disord 2005;5:26). Cette conclusion est renforcée par le fait que, même s’il existe des «agents hypocholestérolémiants pour la prévention primaire ou secondaire de la maladie coronarienne», les études montrent que «les cardiologues et d’autres cliniciens les sous-utilisent» (Siegel D. Prev Cardiol 2000; 3[4]:167-71).

Faisant référence à la nécessité de combler cette lacune et aux résultats de l’étude CALIPSO (Canadian Lipid Study–Observational), le Dr Genest et ses collègues précisent que «de nombreux patients traités n’atteignent pas les taux cibles de C-LDL», d’où la recommandation voulant que «des stratégies soient mises en œuvre pour promouvoir l’atteinte des cibles lipidiques chez les patients à risque élevé» (Bourgault et al. Can J Cardiol 2005;21[13]:1187-93). L’étude transversale CALIPSO – qui ne portait que sur les statines – regroupait 3721 patients de partout au Canada. Cette étude a révélé que 68 % des patients traités par une statine étaient à risque élevé de maladie coronarienne selon les lignes directrices canadiennes de 2003. Elle a aussi permis de repérer la majorité des affections concomitantes souvent associées à la maladie coronarienne : 46,4 % des patients souffraient d’une maladie CV établie, 33,9 %, d’un diabète et 59,5 %, d’hypertension. En outre, les résultats de l’étude ont permis de constater que plus de 36 % des patients à risque élevé de maladie coronarienne n’avaient même pas réussi à atteindre le taux cible de C-LDL encore plus modeste de 2,5 mmol/L.

Nouvelles stratégies de traitement des dyslipidémies

Ces résultats soulignent la nécessité de nouveaux agents ou de traitements d’association qui aideront les patients à atteindre les taux cibles souhaités de C-LDL. Comme l’ont précisé des chercheurs canadiens, une «minorité substantielle» de patients dyslipidémiques a besoin d’un traitement d’association reposant sur un chélateur des acides biliaires, comme la cholestyramine ou le colestipol, ou sur un agent de la nouvelle famille des inhibiteurs de l’absorption du cholestérol, comme l’ézétimibe (Genest et al. CMAJ 2003; 169[9]:publication en ligne 1-10). L’ézétimibe semble «mieux toléré que les chélateurs des acides biliaires», et on a démontré qu’il est «sûr et peut abaisser le taux de C-LDL de 10 à 20 % de plus». Les inhibiteurs de l’absorption du cholestérol, seuls ou en association avec une statine, peuvent être utiles pour contribuer à abaisser le taux plasmatique de C-LDL (Yatskar et al. Clin Cardiol 2006;29[2]:52-5). Ces agents, qui représentent une nouvelle classe de composés hypolipidémiants, peuvent réduire l’absorption intestinale du cholestérol biliaire et alimentaire (Jublanc et al. Presse Med 2006;35[3 Pt 2]:487-94). Chez les patients qui ne peuvent pas tolérer les statines fortement dosées en raison d’une hépatotoxicité ou d’une myotoxicité, ces agents – qui agissent principalement dans la lumière du tube digestif – pourraient être indiqués (Toth et al. Curr Drug Targets Cardiovasc Haematol Disord 2005;5[6]:455-62).

Résumé

«Il ne fait aucun doute que la maladie coronarienne est multifactorielle» et qu’elle tient en partie à des facteurs comme l’obésité, le tabagisme et le stress, affirme le Dr Genest. Cependant, souligne-t-il, «plus on abaisse le taux de C-LDL, de 1 ou 2 mmol/L en termes absolus, plus la réduction du risque d’événement CV est marquée». Chaque médecin doit se servir de son jugement clinique pour déterminer les options thérapeutiques qui conviennent à son patient. «Il n’y a pas de seuil en deçà duquel la baisse du taux de C-LDL n’est plus efficace», de conclure le Dr Genest.

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