Comptes rendus

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À l’horizon, de nouvelles options de traitement hypocholestérolémiant dans les cas où les statines ne suffisent pas à la tâche

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 36e Congrès annuel de la European Society of Cardiology (ESC)

Barcelone, Espagne / 30 août-3 septembre 2014

Rédactrice médicale en chef : Dre Léna Coïc, Montréal, Québec

Quatre essais de phase III présentés au congrès ont permis de solidement étoffer les données cliniques sur une nouvelle classe d’hypolipidémiants, les inhibiteurs de la proprotéine convertase subtilisine/kexine de type 9 (PCSK9). Les résultats de ces essais, qui portaient tous sur l’alirocumab, confirment que l’inhibiteur de la PCSK9 permet des diminutions du C-LDL sans précédent lorsqu'il est prescrit à des patients recevant déjà un traitement hypocholestérolémiant à la dose maximale tolérée et, en outre, qu’il est bien toléré. Si la diminution du risque cardiovasculaire (CV) s’avère proportionnelle à la diminution du C-LDL sous statine, ces agents représenteront un progrès clinique de taille.

«Selon nos données, l’alirocumab permettra de maîtriser le taux de C-LDL chez la majorité des patients, y compris les patients à risque CV élevé qui n'atteignent pas leurs cibles lipidiques avec une statine à la dose maximale tolérée», affirme la Dre Jennifer Robinson, directrice du Prevention Intervention Center, University of Iowa, Iowa City.

Cinq essais de phase III

À ce jour, cinq essais de phase III sur l'alirocumab faisant partie du programme de 14 essais intitulé ODYSSEY ont été présentés. Au premier essai, présenté aux Séances scientifiques 2014 de l’American College of Cardiology (ACC), se sont ajoutés les quatre essais présentés au congrès 2014 de l'ESC. L’évolocumab et le bococizumab sont au nombre des autres inhibiteurs de la PCSK9 faisant l’objet d’essais de phase III. Ces médicaments, tous des anticorps monoclonaux (AcM), diffèrent à bien des égards qui pourraient être cliniquement pertinents. Par exemple, l’alirocumab et l’évolocumab sont des AcM entièrement humains, alors que le bococizumab est un AcM humanisé. Tous injectables par voie sous-cutanée (s.-c.), ils ciblent la PCSK9, important médiateur du C-LDL circulant isolé il y a 11 ans à peine.

L'essai le plus vaste présenté au congrès de l'ESC, ODYSSEY Long-Term, regroupait 2341 patients à risque CV élevé ou très élevé randomisés de façon à recevoir selon un ratio 2:1 150 mg d’alirocumab par voie s.-c. toutes les 2 semaines ou un placebo équivalent. Tous les patients recevaient une statine à la dose maximale tolérée. Le paramètre d’évaluation de l’efficacité de l’étude – toujours en cours – dont le suivi est à ce jour d’une durée moyenne de 65 semaines était la diminution du taux de C-LDL à 24 semaines.

À 24 semaines, le taux de C-LDL avait baissé en moyenne de 61 % dans le groupe alirocumab alors qu'il avait augmenté en moyenne de 1 % dans le groupe placebo. À 52 semaines, le taux moyen de C-LDL se chiffrait à 1,4 mmol/L sous alirocumab. D’un point de vue clinique, et c'est peut-être l’aspect le plus important, la cible lipidique prédéfinie, <1,8 mmol/L en général, avait été atteinte chez 79 % des patients sous alirocumab vs 8 % des patients sous placebo. Les taux d’effets indésirables étaient généralement comparables à ceux du groupe placebo.

À en juger par ces données, les inhibiteurs de la PCSK9 sont tellement efficaces qu'ils pourraient «pratiquement éliminer le C-LDL en tant que facteur de risque», souligne la Dre Robinson. Présentant les données d’ODYSSEY Long-Term au nom de l’équipe multinationale, la Dre Robinson estime que les diminutions substantielles associées à l’alirocumab «pourraient constituer un autre progrès de taille» dans le continuum des diminutions du risque CV amorcé avec les statines.

Analyse post hoc des événements CV

Les essais devant confirmer que la baisse marquée du taux de C-LDL obtenue sous alirocumab se traduit par une diminution du risque CV comparable à la diminution observée sous statine sont en cours, mais une analyse post hoc d’ODYSSEY Long-Term plaide en ce sens. L’analyse post hoc a évalué la réduction du risque CV en comparant les groupes quant au délai de survenue du premier événement CV confirmé (décès imputable à la maladie coronarienne, infarctus du myocarde non mortel, AVC ischémique mortel ou non mortel, et angor instable nécessitant l’hospitalisation). Ce paramètre est aussi utilisé dans l’essai en cours ODYSSEY Outcomes. L’analyse post hoc a révélé que l'alirocumab était associé à une diminution de 54 % du risque CV (IC à 95 % : 0,18-0,74; p<0,01) comparativement au placebo après un suivi d’une durée moyenne de seulement 65 semaines.

«Ces résultats ne donnent qu’un aperçu, mais ils nous permettent d’espérer que la diminution du taux de C-LDL observée sous inhibiteur de la PCSK9 pourrait effectivement mener aux bénéfices cliniques souhaités», poursuit la Dre Robinson.

Une diminution marquée et durable du taux de C-LDL a été observée dans les trois autres essais de phase III ODYSSEY, dont le plan et la population différaient. Dans l'essai ODYSSEY Combo II, 720 patients à risque élevé recevant une statine à la dose maximale tolérée ont été randomisés selon un ratio 2:1 de façon à recevoir par voie s.-c. 75 mg d'alirocumab toutes les 2 semaines ou 10 mg/jour d’ézétimibe. Les deux groupes recevaient un placebo en remplacement de l’agent utilisé dans l’autre groupe. Si le C-LDL demeurait >1,8 mmol/L à 8 semaines, la dose d’alirocumab était portée à 150 mg. L’analyse intermédiaire à 52 semaines prévue au protocole de l’essai de 104 semaines, toujours en cours, a été présentée.

 77 % des sujets atteignent le taux cible exigeant de C-LDL

«L’alirocumab a permis à 77 % des patients à risque élevé recevant le traitement de référence à base d'une statine à la dose maximale tolérée d'atteindre un taux <1,8 mmol/L», affirme le Dr Christopher P. Cannon, Harvard Clinical Research Institute, Boston. Le C-LDL a baissé en moyenne de 50.6 % sous alirocumab vs 20,7 % sous ézétimibe. Cette différence a été objectivée malgré le fait que seulement 18,4 % des patients sous alirocumab étaient passés à la dose supérieure après 12 semaines.

Dans les essais de phase III ODYSSEY FH I et FH II, présentés ensemble, l’objectif était d'évaluer l’efficacité hypolipidémiante de l’alirocumab chez des patients atteints d’hypercholestérolémie familiale (HF) hétérozygote. Dans les essais FH I et FH II, 486 et 249 patients, respectivement, ont été randomisés selon un ratio 2:1 de façon à recevoir de l’alirocumab ou un placebo selon la même progression posologique que dans ODYSSEY Combo II.

La réduction moyenne du taux de C-LDL par rapport au placebo était semblable dans les deux études (57,9 % dans une et 51,4 % dans l’autre), à 24 semaines. Dans le groupe placebo, le C-LDL a augmenté de façon comparable au cours de la même période dans les deux essais. Sous alirocumab, 72 % des sujets d'une étude et 81 % des sujets de l'autre ont atteint le taux cible de C-LDL recommandé.

«Nous savions déjà qu’une statine ne permet pas d’atteindre le taux cible chez 80 % des patients atteints d’HF; ces résultats sont donc très encourageants», estime le Dr Michel Farnier, Point Médical, Dijon, France.

Des questions de fond toujours sans réponse

Au congrès de l'ESC, aucune nouvelle donnée n’a été présentée sur l’évolocumab – le seul autre inhibiteur de la PCSK9 pour lequel des données de phase III ont été publiées –, mais celles dont on dispose déjà sont encourageantes. Lors d’un essai de phase III de 52 semaines publié plus tôt cette année (Blom et al. N Engl J Med 2014;370:1809-19), 901 patients ont d’abord été stratifiés d’après leur catégorie de risque, après quoi on leur attribuait l’un des traitements hypolipidémiants de fond suivants : mesures diététiques seules ou associées à 10 mg d'atorvastatine, à 80 mg d’atorvastatine ou à 80 mg d’atorvastatine plus 10 mg d’ézétimibe. Après au plus 12 semaines de rodage, les patients dont le taux de C-LDL était de 1,9 mmol/L ou plus recevaient aléatoirement de l’évolocumab ou un placebo. À 52 semaines, la réduction moyenne du taux de C-LDL par rapport au taux initial, après soustraction de l’effet placebo, se chiffrait à 57 %.

«Les agents de cette classe pourraient être les plus efficaces que nous n'ayons jamais eus pour abaisser le taux de C-LDL», estime le Dr Evan A. Stein, Metabolic and Atherosclerosis Research Center, Cincinnati, Ohio. Dans une présentation où il résumait les données à l’appui de chaque inhibiteur de la PCSK9 ayant atteint divers stades de la recherche clinique, le Dr Stein a expliqué que des baisses constantes du C-LDL avaient été obtenues chez des volontaires sains, des patients déjà sous statine, des patients intolérants aux statines, et des patients atteints d'HF.

Cela dit, il nous faudra élucider plus à fond plusieurs questions clés avant que ces traitements puissent être prescrits, estime le Dr Shaun Goodman, codirecteur de la division de cardiologie, St Michael’s Hospital, Toronto. D’abord, il faudra démontrer que la diminution marquée du taux de C-LDL obtenue sous inhibiteur de la PCSK9 se traduit par une protection CV, mais il faudra aussi confirmer l’observance du traitement à long terme. Les inhibiteurs de la PCSK9 sont offerts dans un dispositif d’injection jetable – comparable à ceux qu’utilisent efficacement les patients diabétiques pour s’auto-injecter de l'insuline – et le taux d'observance à 1 an était de 85 % dans ODYSSEY Long-Term, mais la normalisation du bilan lipidique n’est peut-être pas perçue comme une nécessité aussi impérieuse que celle de la glycémie.

Pourtant, une option de traitement plus efficace que les statines viendrait combler un vide thérapeutique important, plus de 40 % des patients à risque élevé ayant un taux de C-LDL supérieur au taux cible, enchaîne le Dr Goodman, citant à l’appui de son dire une méta-analyse publiée récemment (Boekholdt et al. J Am Coll Cardiol 2014;64:485-94). C’est précisément pour cette population que les inhibiteurs de la PCSK9 pourraient représenter un progrès de taille.

Conclusion

Les inhibiteurs de la PCSK9 permettront à la grande majorité des patients à risque élevé d'atteindre les taux cibles, à en juger par quatre essais multicentriques de phase III sur l'alirocumab présentés au congrès de l'ESC. Si la réduction du taux de C-LDL obtenue avec cette classe thérapeutique donne lieu à une diminution proportionnelle du risque CV comme on l’a observé avec les statines et d'autres traitements hypolipidémiants, ces agents sont appelés à représenter un progrès clinique majeur et pourraient influer sur la pratique clinique. 

Nota : Au moment de la mise sous presse, les inhibiteurs de la PCSK9 n'étaient pas commercialisés au Canada.

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