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Améliorer la qualité de vie des enfants et des adultes souffrant du TDAH

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

159e Assemblée annuelle de l’American Psychiatric Association

Toronto, Ontario / 20-25 mai 2006

Il existe un vaste arsenal d’options dans le traitement du trouble déficit de l’attention/hyperactivité (TDAH) – constitué notamment des préparations de sels mixtes d’amphétamine (SMA), du méthylphénidate (MPH) et de l’atomoxétine – qui permet de transformer la qualité de vie des enfants, des adolescents et, de plus en plus, des adultes atteints de cette affection. Ces médicaments améliorent la performance à l’école, au jeu et au travail.

Selon l’auteur principal d’une méta-analyse, le Dr Stephen Faraone, SUNY-Upstate Medical University, Syracuse, New York, les stimulants semblent plus efficaces que d’autres agents comme l’atomoxétine pour traiter les symptômes du TDAH. Telle est l’une des conclusions de cette méta-analyse qui incluait 29 essais cliniques comparatifs regroupant 4464 enfants âgés de huit à 15 ans. Les études portaient sur 15 agents dont l’effet sur les symptômes du TDAH a été évalué au moyen de 17 paramètres différents. Les résultats ont montré que l’ampleur de l’effet du traitement était considérablement plus importante pour les SMA que pour tout autre type de médicament utilisé dans le traitement du TDAH ou de non-stimulant.

Même après ajustement des données pour tenir compte des différences de méthodologie entre les études, «l’ampleur de l’effet était significativement plus marquée dans le cas des stimulants à courte et à longue durée d’action que dans celui des non-stimulants ou d’autres médicaments», affirment les investigateurs. Plus précisément, l’ampleur de l’effet sur le score total des symptômes du TDAH s’établissait à 0,92 pour les SMA, comparativement à 0,80 pour le MPH et à 0,73 pour l’atomoxétine (les stimulants à courte durée d’action et les stimulants à longue durée d’action avaient pour leur part un effet de même ampleur, à en juger par les scores totaux des symptômes du TDAH).

Selon la même méta-analyse, l’ampleur de l’effet des SMA était également plus grande en ce qui avait trait aux scores d’hyperactivité-impulsivité. «Les psychostimulants sont en général significativement plus efficaces que les non-stimulants pour la prise en charge du TDAH chez les jeunes», concluent les auteurs.

Problèmes d’innocuité

Les problèmes d’innocuité demeurent une question importante, malgré l’avis de réintégration sur le marché de la préparation de SMA à libération prolongée (XR) émis l’année dernière par les autorités canadiennes. Celles-ci indiquent en effet qu’il n’y a pas lieu d’écarter les SMA XR des options de traitement dans le TDAH, pourvu que l’on procède à une anamnèse et à un examen physique approfondis afin d’exclure toute anomalie cardiaque structurelle sous-jacente – comme cela est d’ailleurs indiqué pour tous les agents utilisés dans le traitement du TDAH, stimulants et non-stimulants confondus.

De fait, dans une étude menée par l’équipe du Dr Timothy Wilens, directeur, programme sur l’abus de substances psychoactives, unité de psycho-pharmacologie pédiatrique, Massachusetts General Hospital, et professeur agrégé de psychiatrie, Harvard Medical School, Boston, on n’a observé aucun effet des médicaments pour le TDAH sur la tension artérielle systolique ou diastolique chez les adultes souffrant du TDAH et atteints d’hypertension qui recevaient ces agents. La question du risque de mort cardiaque subite prétendument associé à la prise de stimulants a également été résolue à la faveur des résultats de l’étude, selon lesquels le taux de mort cardiaque subite chez les patients recevant ces agents est en fait inférieur à celui qui est observé dans la population générale, soit un taux se situant entre 0,26 et 0,5 épisode pour 100 000 patients par année vs un taux de 0,6 à six épisodes pour 100 000 patients par année, respectivement.

Même dans le cas des étudiants-athlètes pratiquant des sports de compétition chez qui l’emploi de stimulants expose à un risque accru de mort cardiaque subite par rapport à des non-athlètes, les autorités n’ont pas jugé que le risque était suffisamment élevé pour justifier des considérations spéciales. Cela dit, rappelle le Dr Wilens, il est nécessaire d’évaluer les patients chez qui l’on envisage de traiter le TDAH afin de rechercher les antécédents de cardiopathie congénitale ou acquise et d’exclure tout symptôme évocateur d’une cardiopathie structurelle sous-jacente, telles des palpitations, une douleur thoracique ou une syncope, ou des antécédents familiaux de mort cardiaque prématurée.

Efficacité chez l’adulte

On estime que le TDAH est diagnostiqué chez tout au plus 10 à 20 % des adultes qui en souffrent et qu’il est traité chez seulement un ou deux adultes sur 20. Par conséquent, le diagnostic et le traitement du TDAH chez l’adulte sont nettement insuffisants.

L’étude Qu.E.S.T. (Quality of Life, Effectiveness, Safety, and Tolerability) qui est en cours et a été conçue selon un mode ouvert et prospectif vise à évaluer le traitement d’adultes atteints du TDAH par des SMA XR à une dose de 10 à 60 mg/jour, dans un contexte de pratique communautaire. Citant les résultats d’une analyse partielle des résultats à 10 semaines de cette étude, Mme Jeanne Landgraf, vice-présidente et agent scientifique en chef, Healthact, Boston, s’est attachée à démontrer – à l’instar de plusieurs autres investigateurs – combien la réponse aux SMA XR pouvait être significative, même après seulement 10 semaines de traitement.

Ayant élaboré la version destinée aux adultes d’un module d’analyse des répercussions du TDAH (AIM-A, pour ADHD Impact Module – Adult), les investigateurs ont eu recours à cet outil pour évaluer la réponse à la préparation de SMA XR chez les patients de l’étude Qu.E.S.T., stratifiés en fonction du traitement antérieur reçu : aucun traitement (n=378); traitement par un stimulant (n=272); et traitement par un non-stimulant (n=52). L’analyse en intention de traiter (IT) de cette cohorte a démontré que les patients, toutes catégories de traitement confondues, ont présenté des améliorations similaires et statistiquement significatives dans les six rubriques de la qualité de vie explorées par le module AIM-A (p<0,0001).

«Des améliorations sont apparues dans les deux semaines suivant la mise en route du traitement par les SMA XR et se sont maintenues ou se sont graduellement intensifiées jusqu’à la 10e semaine de l’étude», signalent les investigateurs. Les améliorations les plus robustes ont été observées dans les rubriques performance et fonctionnement, gêne et inquiétude, et interférence au quotidien, là encore dans tous les groupes de traitement, ajoutent-ils. La variation des scores entre l’évaluation initiale et l’évaluation finale dans d’autres rubriques du module AIM-A – y compris les dimensions vivre avec le TDAH; bien-être général; et relations avec les autres et communication – a aussi atteint le seuil de signification statistique dans tous les groupes (p<0,001). «Lorsque nous avons mis au point cet outil d’enquête, nous avons parlé à des adultes – mariés, célibataires ou divorcés, venant d’horizons différents et dont la sévérité et la durée de la maladie étaient également diverses – afin de comprendre les effets du TDAH sur leurs relations avec les autres, leur perception d’eux-mêmes et leur performance au travail, à l’école ainsi qu’avec leurs collègues, a expliqué Mme Landgraf au cours d’un entretien; or, le degré d’interférence et de gêne subi au quotidien par ces personnes en raison de leurs symptômes est phénoménal. Donc, ce que cette étude nous indique, c’est qu’il faut aller au-delà des questions d’innocuité et d’efficacité lorsqu’on traite des adultes souffrant du TDAH et comprendre que le médicament a des retombées significatives sur la vie de ces patients.»

Ce thème a trouvé un écho dans plusieurs autres analyses partielles connexes des résultats de l’étude Qu.E.S.T, effectuées elles aussi après 10 semaines. Des données ont été recueillies auprès de la population IT de 702 participants au moyen du questionnaire abrégé SF-36 (36-item Short Form) sur la santé, et les scores ont été comparés aux données normatives américaines de 1998 s’appliquant à ce questionnaire.

Au départ, les patients atteints du TDAH avaient un score récapitulatif moyen pour les critères mentaux de un écart type de moins que la norme américaine de 1998, signalent les investigateurs. Après 10 semaines de traitement par la préparation de SMA XR, le même score récapitulatif était significativement plus élevé qu’au départ (p<0,0001) et comparable à la valeur de référence américaine. On a également relevé une amélioration significative des scores dans les sous-rubriques fonctionnement physique et santé générale par rapport aux valeurs de départ, tandis que les scores pour la douleur physique sont demeurés comparables aux valeurs initiales. Quant au score récapitulatif moyen pour les critères physiques dans le groupe à l’étude, il était comparable à la norme américaine de 1998, tant au départ qu’à 10 semaines.

Selon les investigateurs, moins de 7 % des sujets de la cohorte ont abandonné l’étude en raison d’effets indésirables au cours de la période de 10 semaines, les effets les plus fréquents étant la diminution de l’appétit, la sécheresse buccale, l’insomnie et les céphalées. «Cette étude est tout à fait étonnante quand on songe que, à l’évaluation de paramètres généraux de la qualité de vie, ces patients avaient tous un score de un écart type de moins que la norme américaine et que, après 10 semaines de traitement, ils rejoignent les scores observés dans la population normale», a commenté le Dr Declan Quinn, professeur agrégé de psychiatrie, University of Saskatchewan College of Medicine, Saskatoon, au cours d’un entretien. «Rien de comparable n’est observé pour aucun autre trouble psychiatrique; on a donc là un stimulant à action prolongée et à posologie monoquotidienne très efficace chez les adultes atteints du TDAH et qui, en outre, s’avère économique. La préparation de SMA XR est en effet moins coûteuse que le MPH à action prolongée, en particulier à doses élevées.»

Satisfaction des patients adultes

Une autre analyse des données partielles de l’étude Qu.E.S.T. compilées à 10 semaines avait pour objectif d’évaluer la satisfaction des patients à l’égard du traitement par la préparation de SMA XR. Compte tenu du problème notoire que posent l’observance à long terme du traitement au moyen de stimulants chez les patients souffrant du TDAH et ses répercussions sur la prise en charge des symptômes, la satisfaction des patients à l’égard de leur traitement devient un facteur qui est loin d’être négligeable. Comme l’expliquait au cours d’un entretien l’auteure principale, la Dre Margaret Weiss, directrice de la recherche, division de pédopsychiatrie, Children’s and Women’s Health Centre of British Columbia, Vancouver, «l’ennui avec les composés à courte durée d’action, c’est qu’un adulte doit prendre le médicament quatre ou cinq fois par jour, et cela est tout simplement trop demander, et d’autant plus si on est atteint du TDAH.»

La Dre Weiss a présenté les résultats relatifs à 77 adultes qui étaient auparavant traités par un stimulant à courte durée d’action. Ces patients sont ensuite passés à la préparation de SMA XR et ont été invités à évaluer leur degré de satisfaction à l’égard de la préparation à action prolongée par comparaison avec l’agent à courte durée d’action qu’ils recevaient auparavant.

«Après 10 semaines de traitement, 72,8 % des sujets se sont dits globalement satisfaits de la préparation de SMA XR», rapportent la Dre Weiss et ses co-investigateurs, et 87 % ont indiqué être satisfaits de la posologie monoquotidienne. Près de 88 % des patients ont également indiqué qu’ils oubliaient rarement de prendre une dose depuis leur passage au stimulant à action prolongée. Lorsqu’ils recevaient le composé amphétaminique à courte durée d’action, environ 48 % de ces adultes étaient satisfaits de la fréquence quotidienne d’administration, et 39 % oubliaient rarement une dose.

Comme le fait valoir la Dre Weiss, «ce que l’on constate ici – et ces résultats sont statistiquement significatifs à tous les niveaux – c’est que les patients ont trouvé le médicament à action prolongée plus facile à prendre; leur observance était meilleure; ils étaient satisfaits de la durée de l’effet; et ils étaient également contents de l’effet du médicament sur leur comportement. Donc, les deux médicaments ont peut-être une efficacité similaire, mais, si l’on considère leur retentissement sur l’observance et la poursuite du traitement de même que sur l’estime de soi, on peut nettement entrevoir des retombées plus importantes des stimulants à plus longue durée d’action comme les SMA XR que des stimulants à courte durée d’action.»

Résultats à des examens simulés de conduite automobile

Il a été démontré que la préparation de SMA XR améliore significativement à la fois le temps de réaction et la justesse des réactions chez des adolescents et de jeunes adultes durant un examen simulé de conduite automobile, mené dans le cadre d’une évaluation croisée avec inversion de traitement. Les patients ont reçu le traitement actif et un placebo selon l’une des deux séquences. «Ce qui est intéressant dans cette étude, c’est que lorsque les sujets sont passés au placebo, ils n’ont pas reculé au niveau observé lors de leur performance sous placebo; il semble donc qu’ils aient retiré un avantage qui allait au-delà d’un effet de familiarisation [dérivé du premier examen] puisque nous n’avons pas observé un tel effet de familiarisation chez les sujets qui avaient commencé par le placebo», a indiqué le Dr Gary Kay, président, Washington Neuropsychological Institute, et professeur agrégé de clinique en neurologie, Georgetown University School of Medicine, Washington, DC, lors d’un entretien. «Nous ignorons la durée de cet effet, mais nous savons que, au moins trois semaines plus tard, les sujets jouissaient toujours d’un avantage.»

Développements

Le Dr Wilens a brièvement présenté quelques-unes des options en voie de commercialisation pour le traitement du TDAH, dont une nouvelle préparation transdermique de MPH. Ce timbre est approuvé aux États-Unis pour une utilisation de neuf heures, pendant laquelle la dose estimative de principe actif reçue se situe entre 10 et 30 mg selon la taille du timbre.

Le précurseur amphétaminique NRP-104, qui semble comparable à la préparation de SMA XR aux points de vue de l’effet et de la durée de l’effet, est métabolisé en médicament actif après administration orale. De même, le comprimé pelliculé de modafinil – un modulateur du système d’éveil (à l’étude en vue de l’homologation aux États-Unis) – donne lieu à un taux de réponse qui serait de l’ordre de 50 à 60 %, bien que l’on puisse observer un léger retard de la pleine action du médicament chez les patients qui ont déjà répondu au modafinil, note le Dr Wilens.

Questions et réponses

La question et la réponse qui suivent sont tirées d’un entretien avec la Dre Margaret Weiss, directrice de la recherche, division de pédopsychiatrie, Children’s and Women’s Health Centre of British Columbia, Vancouver.

Q : Une fois que le TDAH est diagnostiqué, comment déterminez-vous le traitement qui convient le mieux au patient?

R : Au Canada, les médicaments recommandés en première intention pour le traitement du TDAH sont les SMA XR, le MPH et l’atomoxétine. Les trois agents sont mis sur le même rang dans les lignes directrices, lesquelles précisent seulement que le médicament optimal dépend des besoins individuels du patient. Si le patient éprouve des problèmes surtout le matin, les SMA XR pourraient présenter un avantage par opposition au MPH qui libère davantage de principe actif vers la fin de la journée. Lorsque les troubles se manifestent surtout en fin d’après-midi, il est peut-être alors préférable de choisir le MPH; toutefois, si un patient est anxieux, a des tics et que le problème [des parents] se limite surtout à l’heure tardive du coucher, l’atomoxétine est peut-être plus indiquée. Chacun de ces médicaments a donc un profil légèrement différent que l’on peut expliquer aux patients afin de leur permettre de prendre part au choix du traitement.

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