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La rémission soutenue, un objectif réaliste dans la schizophrénie

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 19e Congrès du European College of Neuropsychopharmacology (ECNP)

Paris, France / 16-20 septembre 2006

«La rémission soutenue est une nouvelle norme dans le traitement de la schizophrénie. L’idée est d’intervenir plus tôt dans le processus morbide. La schizophrénie est une maladie destructrice et l’amélioration du pronostic est un défi énorme», affirme le Dr John Kane, directeur, service de psychiatrie, The Zucker Hillside Hospital, Glen Oaks, New York.

Le traitement précoce est pertinent parce que la majorité des patients ayant un premier épisode de schizophrénie finissent par rechuter et que les rechutes successives ne font qu’aggraver la détérioration. La rechute se définit comme la réémergence d’un tableau clinique nécessitant un changement de traitement ou, dans les cas extrêmes, l’hospitalisation, explique le Dr Kane. «L’occasion qui nous est offerte d’intervenir au début de la maladie est particulièrement importante, explique le Dr Kane. Les rechutes survenant au cours des premiers stades de la maladie sont particulièrement désastreuses.»

Chez les patients qui en sont à leur premier épisode et qui reçoivent un placebo ou ont mis fin à leur traitement, on enregistre un taux de rechute de 60 % à 72 % la première année et un taux pouvant atteindre 96 % la deuxième année, précise-t-il. Les taux de rechute sont considérablement plus faibles chez les patients qui en sont à leur premier épisode mais qui reçoivent un antipsychotique; après un an, le taux de rechute se situe entre 16 % et 46 % selon diverses études; il peut ensuite atteindre 46 % la deuxième année et 90 % après 10 ans.

Selon une étude sur plus de 100 patients qui en étaient à leur premier épisode et qui ont été suivis pendant au plus cinq ans, le risque de rechute était cinq fois plus élevé chez les patients qui mettaient fin à leur traitement que chez ceux qui le poursuivaient (Robinson et al. Arch Gen Psychiatry 1999;56[3]:241-7). «Cet effet marqué de l’abandon du traitement a été vu à la première et à la deuxième rechute. Après cinq ans, 82 % des patients avaient eu au moins une rechute», souligne le Dr Kane.

Adhésion au traitement

L’inobservance du traitement est un obstacle majeur à la prévention des rechutes. Le Dr Kane indique que les antipsychotiques injectables peuvent surmonter cet obstacle en assurant l’adhésion au traitement, d’où une plus grande probabilité de rémission, voire de rétablissement.

Selon une vaste base de données d’environ 4000 patients, d’enchaîner le Dr Kane, le traitement pourrait influer sur la rémission et en permettre le maintien au fil du temps. Lors d’une étude d’un an réalisée en ouvert chez 578 patients stables, 21 % ont obtenu une rémission complète sous l’effet de la rispéridone injectable à longue durée d’action tandis que 14 % ont eu des symptômes «bénins ou moins» sur l’échelle PANSS (Positive and Negative Syndrome Scale) (Lasser et al. Schizophr Res 2005;77[2-3]:215-27). De tous les patients en rémission complète, 85 % ont pu le demeurer jusqu’à la fin de l’étude. Une amélioration a été observée dans toutes les rubriques de l’échelle PANSS ainsi que sur les plans de la sévérité générale de la maladie et de la qualité de vie.

«Cette étude a mis en évidence une amélioration significative du score total sur l’échelle PANSS, même si les patients ne répondaient pas aux critères d’une rémission complète [c.-à-d. une amélioration soutenue pendant six mois]», commente le Dr Kane. On a aussi observé chez les patients traités une amélioration des paramètres de la qualité de vie, du fonctionnement social et de la vitalité. «Ces patients s’approchent d’une capacité fonctionnelle plus saine, poursuit le Dr Kane. Nous commençons à voir les retombées cliniques des critères de la rémission, et nous voyons que le traitement permet d’atteindre la rémission. Enfin, nous voyons que les médicaments à longue durée d’action peuvent faire une différence et qu’ils se prêtent bien à l’obtention d’une rémission.»

De l’avis du Dr Robin Emsley, département de psychiatrie, University of Stellenbosch, Le Cap, Afrique du Sud, on devrait utiliser les antipsychotiques injectables à longue durée d’action plus tôt dans l’évolution de la maladie par opposition à attendre que la maladie progresse vers un stade plus sévère. Il a cité plusieurs études montrant qu’une piètre observance du traitement est un problème «énorme» dans la pratique clinique. Il est très difficile pour les psychiatres de déterminer si le patient respecte son traitement à la lettre, d’ajouter le Dr Emsley. L’observance partielle est un problème majeur dans le traitement de la schizophrénie, car de nombreux patients ne suivent pas leur traitement les jours où ils se sentent bien.

Premier épisode

Selon une étude canadienne, 39 % des patients qui en étaient à leur premier épisode cessaient de prendre leur médicament au cours de la première année de traitement et 20 % ne le prenaient qu’à temps partiel. «Ces patients sont sujets soit à une rechute, soit à une rechute partielle, car la plupart des rechutes et la majeure partie de la détérioration surviennent au début de la maladie», note le Dr Emsley. Les raisons qui expliquent l’inobservance sont complexes, mais les médicaments injectables à longue durée d’action constituent un moyen utile d’administrer l’antipsychotique et d’assurer l’adhésion au traitement, dit-il.

Le Dr Emsley et ses collaborateurs ont étudié 522 patients qui en étaient à leur premier épisode et ont comparé le délai de réponse à la rispéridone injectable à longue durée d’action avec le délai de réponse à la rispéridone orale qui avait été obtenu dans une étude randomisée antérieure dont l’objectif était de comparer cette dernière à l’halopéridol oral chez des patients qui en étaient à leur premier épisode. Selon l’analyse partielle à un an de l’étude de deux ans, 76 % des patients recevaient toujours l’antipsychotique injectable, vs 53 % des sujets de l’étude sur le traitement oral. Le traitement à longue durée d’action s’est révélé plus efficace que l’agent oral dans toutes les rubriques de symptômes. Le Dr Emsley a attribué les résultats à l’observance du traitement antipsychotique injectable plutôt qu’à des différences réelles d’efficacité entre les préparations orale et injectable. Le taux de rechute était moindre chez les patients qui recevaient le médicament injectable. Comme il s’agit d’une analyse partielle dans le cadre d’une étude en ouvert, prévient-il, l’interprétation de ces résultats commande la prudence. Cela dit, il semble que la préparation injectable à longue durée d’action soit sûre et efficace et qu’elle puisse être utilisée tôt dans l’évolution de la maladie pour assurer la libération fiable et soutenue de l’agent actif. «Nous devons intervenir aussi tôt et efficacement que possible et ne pas considérer la stabilisation [c.-à-d., des symptômes à bas bruit] comme une fin en soi. Une fois la rémission atteinte, nous pouvons nous concentrer sur le maintien de celle-ci», affirme le Dr Emsley.

Antipsychotiques atypiques et traditionnels

Une étude de prolongation à double insu de trois ans – dont les résultats ont été présentés par le Dr Antony Loebel, New York, New York, et ses collaborateurs – étaye la théorie voulant que la rémission complète soit possible chez les patients atteints de schizophrénie et que les antipsychotiques atypiques soient plus efficaces que les antipsychotiques traditionnels.

Dans une population de 186 patients, deux schémas posologiques de ziprasidone – 80 à 160 mg 2 fois par jour (f.p.j.) et 80 à 120 mg 1 f.p.j. – ont été comparés avec l’halopéridol à raison de 5 à 20 mg/jour. Les deux schémas de ziprasidone étaient plus susceptibles que l’halopéridol d’induire la rémission et une amélioration soutenue de la qualité de vie, indiquent les auteurs. Au cours des six premiers mois de l’étude, la ziprasidone 2 f.p.j. a été associée à une augmentation significative du taux de rémission (p<0,05) par rapport à l’halopéridol, tout comme la ziprasidone 1 f.p.j., qui a également autorisé un taux de rémission plus élevé que l’halopéridol. Après trois ans de traitement, les deux schémas de ziprasidone étaient significativement plus efficaces que l’halopéridol quant au taux de rémission (p<0,05) et aux scores de la qualité de vie (p<0,05).

Programme de services concertés

Aux Pays-Bas, un programme offrant des services concertés aux patients atteints de schizophrénie a permis d’augmenter le taux de rémission, par comparaison à la prestation usuelle de services fragmentés par diverses agences sociales. La démarche concertée a été présentée par le Dr Jim van Os, département de psychiatrie et de neuropsychologie, Université de Maastricht, Pays-Bas.

La probabilité de rémission – qui était de 19 % avant la mise sur pied de ce programme – est passée à 31 % après coup. Le Dr van Os et ses collaborateurs ont constaté que la présence d’une toxicomanie – qui est le lot de 40 % à 50 % des patients schizophrènes – diminuait la probabilité de rémission soutenue. Ils ont aussi vu que les patients qui en sont à leur premier épisode peuvent être intégrés avec succès dans le programme de services concertés, d’où une baisse des frais associés à certains soins de santé mentale pour ce groupe particulier de patients à risque élevé. De plus, une analyse des retombées du programme après quatre ans a révélé que l’association d’agents traditionnels et atypiques n’était pas plus avantageuse que la seule utilisation d’agents atypiques.

Résumé

La rémission est maintenant un objectif reconnu dans le traitement de la schizophrénie. Selon les nouveaux critères, les symptômes doivent relever de la catégorie «bénins ou moins», et cette amélioration doit se maintenir pendant au moins six mois. Il a été démontré que les antipsychotiques atypiques permettent d’atteindre la rémission ainsi définie. Le principal obstacle à l’atteinte de la rémission est une piètre observance du traitement. Or, l’administration d’un antipsychotique injectable à longue durée d’action est une stratégie qui permettrait d’assurer l’observance du traitement et d’augmenter les chances de rémission.

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