Comptes rendus

Protection élargie contre les infections pneumococciques grâce aux vaccins multivalents
Regard sur les INTI de fond : données actuelles à l’appui des schémas recommandés

Améliorer la qualité de vie des patientes atteintes d’un cancer du sein métastatique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 46e Assemblée annuelle de l’American Society of Clinical Oncology

Chicago, Illinois / 4-8 juin 2010

L’essai de phase III multicentrique PELICAN (Pegylated Liposomal Doxorubicin or Capecitabine as First Line Chemotherapy for Metastatic Breast Cancer) a généré des données à l’appui du choix rationnel d’un traitement de première intention dans le cancer du sein métastatique (CSM). Cet essai visait à comparer une anthracycline, la doxorubicine liposomale pégylée (DLP), avec un antimétabolite, la capécitabine, promédicament transformé en son métabolite actif, le 5-fluoro-uracile, sous l’effet de systèmes enzymatiques. D’usage courant dans le CSM, ces deux agents ont fait la preuve de leur efficacité. Comme l’avaient montré d’autres études publiées antérieurement, leurs taux d’efficacité étaient similaires, mais leurs différences au chapitre des effets indésirables se sont révélées cliniquement pertinentes.

«Dans l’ensemble, la DLP a été associée à une meilleure tolérabilité relative, mais elle différait de la capécitabine quant au type d’effets indésirables. En général, un médicament de première intention bien toléré peut élargir l’éventail d’options pour les monothérapies subséquentes. Les différences relatives observées lors de cette étude de phase III quant au type d’effets indésirables pourraient toutefois avoir des retombées sur l’individualisation du traitement», souligne la Dre Elke Jäger, médecin-chef, hémato-oncologie, Clinique médicale II, Krankenhaus Nordwest, Francfort, Allemagne. «De toute évidence, on doit tenir compte du profil d’innocuité de ces agents lorsqu’on détermine comment on traitera un cancer du sein avancé en première intention.»

Résultats de l’essai PELICAN

Lors de cette étude, 210 femmes atteintes d’un CSM qui n’avaient pas encore reçu de chimiothérapie pour leur cancer métastatique et chez qui le trastuzumab n’était pas indiqué ont été randomisées de façon à recevoir de la DLP à raison de 50 mg/m2 par voie intraveineuse tous les 28 jours ou de la capécitabine à raison de 1250 mg/m2 par voie orale deux fois par jour 14 jours sur 21. Les deux préparations ont été évaluées en fonction de divers critères d’efficacité, dont l’intervalle sans progression (ISP), l’intervalle précédant l’échec du traitement et la survie globale (SG), de même qu’en fonction de critères d’innocuité, notamment le taux relatif de signes de toxicité et la gravité de ces derniers. Aucun médicament anti-cancer concomitant n’était autorisé, et les patientes ayant des antécédents de résistance aux anthracyclines étaient exclues.

L’effectif de cette étude était typique des femmes atteintes d’un CSM chez qui une monochimiothérapie est indiquée. L’âge médian était de 62 ans, et plus de 90 % des sujets avaient un indice fonctionnel de 0 ou 1 (répartition assez égale) selon la classification de l’ECOG. Plus de 80 % des femmes étaient ménopausées, et plus de la moitié présentaient à la fois des métastases viscérales et des métastases non viscérales.

Les chercheurs n’ont observé aucune différence significative entre la DLP et la capécitabine au chapitre des critères d’efficacité évalués. La médiane de SG était de 22,4 mois pour la DLP et de 29,4 mois pour la capécitabine (p=0,44). La médiane de l’ISP se chiffrait respectivement à 6,2 et 7,1 mois (p=0,31). Les taux de réponse objective globale, tant confirmée que non confirmée, étaient similaires (p=0,64 et p=0,86, respectivement), tout comme les taux de réponse complète ou partielle et la proportion de patientes chez qui le cancer s’était stabilisé. Les taux de progression confirmée s’élevaient à 36,9 % pour la DLP et à 42,2 % pour la capécitabine; là encore, l’écart n’était pas significatif sur le plan statistique.

Au chapitre des effets indésirables (EI) graves, les profils d’innocuité différaient, mais la DLP a été mieux tolérée. Cette supériorité s’est reflétée à la fois dans le nombre d’EI graves (58 pour la DLP vs 115 pour la capécitabine; p=0,015) et le pourcentage de patientes présentant un EI grave (30 % vs 48 %, respectivement; p=0,0073). Aucun EI de grade 3 ou 4 n’a été plus fréquent sous DLP que sous capécitabine. Inversement, la diarrhée de grade 3 ou 4 (12 % vs 0 %; p=0,0002) et les événements thromboemboliques de grade 3 ou 4 (10 % vs 2 %; p=0,0186) étaient significativement plus fréquents avec l’antimétabolite. Cependant, deux EI, tous grades confondus, ont été plus fréquents sous DLP que sous capécitabine : leucopénie (25 % vs 16 %; p=0,0025) et mucite (57 % vs 29 %; p<0,0001). Les vomissements tous grades confondus étaient plus fréquents sous capécitabine, et l’écart par rapport à la DLP avoisinait la significativité statistique (29 % vs 17 %; p=0,07). Il n’y avait aucune différence entre les groupes quant au taux d’événements cardiaques, peu importe que l’on ait considéré tous les grades (9 % dans chaque groupe) ou seulement les grades 3 ou 4 (2 % pour la DLP vs 0 % pour la capécitabine).

Il importe ici de souligner que plus du tiers des patientes avaient déjà été exposées à une anthracycline. L’exposition aux anthracyclines n’était pas un motif d’exclusion, pour autant que l’exposition cumulative n’excédaît pas 360 mg/m2 de doxorubicine ou l’équivalent (p. ex., 600 mg/m2 d’épirubicine). Sur le plan de la médiane de l’ISP, il n’y avait aucune différence lorsque les patientes sous DLP étaient stratifiées d’après leurs antécédents d’exposition à une anthracycline. Cependant, les patientes sous capécitabine s’en sortaient mieux si elles n’avaient pas encore été exposées à une anthracycline (ISP de 9,0 mois) que si elles l’avaient été (ISP de 4,8 mois; p=0,02 vs aucune exposition antérieure).

Type de préparation et exposition antérieure au médicament

La non-influence d’une exposition antérieure à une anthracycline sur l’efficacité et l’innocuité de la DLP – y compris l’innocuité cardiaque – ajoute à la pertinence de la pégylation et de l’encapsulation liposomale. Les liposomes empêchent le médicament de pénétrer dans les tissus sains aux capillaires à jonctions serrées, comme le cœur et le tube digestif, tout en favorisant le dépôt dans les tumeurs dont les vaisseaux sont perméables. La pégylation stabilise les liposomes, ce qui augmente le temps de séjour du médicament dans le sang, améliore l’efficacité et réduit au minimum le risque de toxicité. La DLP est de plus en plus utilisée dans les cancers qui répondent aux anthracyclines en raison de cet avantage sur le plan de l’innocuité, en particulier un faible risque relatif d’EI grave, comme la cardiotoxicité, et d’EI qui minent la qualité de vie, comme la diarrhée et les nausées et vomissements.

Le faible risque relatif d’EI grave associé à la DLP qui s’est dégagé de cet essai avec randomisation est une donnée utile, parce que l’un des avantages de la capécitabine par rapport à de nombreuses autres options, dont les anthracyclines traditionnelles, est précisément un profil de tolérabilité favorable.

Après avoir analysé les résultats colligés de trois études sur la capécitabine dans le CSM, les chercheurs ont conclu que la capécitabine demeurait hautement active en première intention, même chez les patientes déjà exposées à une anthracycline ou à un taxane. Les trois études considérées étaient une étude monocentrique regroupant 225 patientes, une étude multicentrique de phase II regroupant 161 patientes et une étude d’observation allemande regroupant 542 patientes sous capécitabine en monothérapie.

«Dans ces trois études, jusqu’à 48 % des patientes avaient déjà été exposées à une anthracycline et 25 %, à un taxane, mais la médiane de l’intervalle précédant l’échec du traitement ne différait pas selon que les patientes avaient déjà reçu ces agents ou non», explique la Dre Friederike Siedentopf, Centre de pathologies mammaires, DRK-Kliniken, Berlin, Allemagne. Les médianes, qui se comparent à celles qu’a rapportées la Dre Jäger pour l’essai sur la DLP, étaient de 8,9 mois pour les femmes ayant déjà reçu une chimiothérapie et de 8,3 mois pour celles qui n’en avaient pas encore reçu, et l’écart n’était pas significatif.

À la lumière des données montrant que la DLP et la capécitabine sont d’efficacité similaire à titre de monothérapie de première intention dans le CSM, l’innocuité supérieure de la DLP est importante, mais on doit tout de même tenir compte des différences d’innocuité entre les deux dans le choix du traitement. La DLP est une option séduisante parce qu’elle permet d’éviter les effets indésirables de grade 3 ou 4, indique la Dre Jäger, mais les facteurs de comorbidité présents chez chaque patiente pourraient en définitive influer sur le choix du traitement. Par exemple, le taux plus élevé de mucite sous DLP que sous capécitabine, bien que l’écart ne soit pas significatif dans le cas des mucites de grade 3 ou 4 (8 % vs 3 %), pourrait être une donnée utile à connaître dans les cas où cet effet indésirable particulier est source d’anxiété. Cela dit, ce ne sont pas seulement les risques immédiats, mais aussi le fardeau que représentent les EI graves durant le cours de la maladie que l’on doit envisager.

«Dans le CSM, lorsqu’on choisit une monochimiothérapie de première intention, il importe, entre autres, de voir en quoi ces deux agents influent sur le choix des traitements subséquents si l’on aspire à prolonger la survie», précise la Dre Jäger. Sur cette base, la DLP pourrait être un choix approprié pour de nombreuses patientes.

Résumé

Une étude de phase III – dans laquelle on comparait deux monochimiothérapies d’usage courant dans le traitement du CSM – a révélé que la DLP et la capécitabine étaient associées à une activité et à des résultats similaires, mais que l’anthracycline liposomale pégylée avait été mieux tolérée. En particulier, elle a été associée à une incidence significativement moindre de diarrhée et d’événements thromboemboliques de grade 3 et 4 sans pour autant être associée à une incidence plus élevée d’autres EI de grade 3 ou 4. Les différences entre les profils d’EI de ces deux agents que l’on a observées lors de cette étude avec randomisation peuvent guider le choix du traitement en première intention.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.