Comptes rendus

Importance d’une maîtrise globale du diabète de type 2
Regard pragmatique sur la maîtrise de l’asthme au moyen de corticostéroïdes pour inhalation

Améliorer le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 20e Congrès annuel de la European Respiratory Society

Barcelone, Espagne / 18-22 septembre 2010

Lors d’un symposium sur la mise en application des recommandations publiées conjointement par la European Society of cardiology (ESC) et la European Respiratory Society (ERS) sur l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) (Galiè et al. Eur Heart J 2009;30:2493-537), on a grandement insisté sur la nécessité d’améliorer le traitement et de développer de nouveaux traitements. Le Pr Andrew Peacock, Service des maladies vasculaires pulmonaires, Western Infirmary, Glasgow, Écosse, Royaume-Uni, faisait remarquer que le traitement de l’HTAP n’avait pas beaucoup progressé depuis quelques années. «Avant 1992, lorsqu’il n’y avait aucun traitement efficace pour cette maladie, la survie à 2 ans était inférieure à 50 %. Le taux est passé à 75 % entre 1992 et 1999, mais depuis, il n’y a pas eu d’augmentation majeure, précise-t-il. De toute évidence, nous devons tenter d’améliorer la situation actuelle.» Il a insisté sur l’importance d’un diagnostic précoce pour que l’HTAP puisse être traitée précocement et que les patients puissent jouir d’une meilleure qualité de vie, mais les symptômes sont généralement détectés assez tardivement. En 1987, la base de données des National Institutes of Health (NIH) aux États-Unis a révélé qu’il s’écoulait 2 ans en moyenne entre les premiers symptômes et le diagnostic de la maladie (Rich et al. Ann Intern Med 1987;107:216-23). «Malheureusement, cet intervalle est resté à peu près inchangé», affirme-t-il.

Démarche axée sur un objectif thérapeutique

Dans leurs recommandations, l’ESC et l’ERS préconisent l’individualisation des objectifs du traitement de l’HTAP. Les cibles thérapeutiques – dont la mesure doit être non invasive, facile à exécuter et reproductible – doivent avoir une importance pronostique, affirme la Dre Ioana Preston, Tufts Medical Center, Boston, Massachusetts.

De nombreuses études de cohorte ont montré que la classe fonctionnelle (CF) était un excellent facteur prédictif de l’issue clinique dans l’HTAP, note-t-elle. La plus récente (Humbert et al. Circulation 2010;122:156-63) a révélé qu’à 36 mois, le taux de survie des patients de CF II s’élevait à 80 % comparativement à 60 % pour les patients de CF III et à 40 % pour ceux de CF IV (Figure 1). Le test de marche de 6 minutes est non invasif et facile à répéter lors des visites au cabinet. Un patient capable de parcourir >350 m au départ a de bien meilleures chances à long terme que le patient qui parcourt une distance moindre, précise la Dre Preston. Cette dernière souligne également l’importance d’une épreuve d’effort cardiopulmonaire, un VO2 max >10,4 mL/kg/min et une tension artérielle systolique >120 mm Hg durant l’exercice étant associés à de meilleurs résultats (Wensel et al. Circulation 2002;106:319-24).

Figure 1. Estimation de la survie (Kaplan-Meier) chez les patients atteints d’HTAP idiopathique, familiale ou iatrogène (anorexigènes) d’après la CF initiale selon la classification de l’OMS


Bien qu’aucun marqueur sérologique spécifique de l’HTAP n’ait été validé, le taux de BNP (peptide natriurétique de type B) a été corrélé avec le profil hémodynamique et le résultat du test de marche de 6 minutes. Ainsi, un taux initial de BNP =150 pg/mL semble de plus mauvais pronostic qu’un taux moindre (Nagaya et al. Circulation 2000;102:865-70). De plus, un taux de BNP <180 pg/mL après 3 mois de traitement, comparativement à un taux =180 pg/mL, est associé à un meilleur taux de survie à 2 ans. Par ailleurs, un taux de NT-proBNP (fragment N-terminal du précurseur du BNP) inférieur à 1400 pg/mL est aussi associé à un meilleur pronostic à 2 ans (Fijalkowska et al. Circulation 2006;129:1312-21). Les paramètres échocardiographiques sont prédictifs de la survie, et la surveillance continue du patient est essentielle dans le cadre d’un traitement axé sur l’atteinte d’objectifs, insiste la Dre Preston.

Atteinte de la CF II de l’OMS : enseignements de l’essai EARLY

Comme l’HTAP demeure incurable, il est réaliste de vouloir la détecter dès les premiers stades et de mettre le traitement en route sans délai afin que les patients en CF II se maintiennent ou s’améliorent (régression à la CF I) ou encore, que ceux en CF III ou IV s’améliorent (régression à la CF II), note le Dr Marius Hoeper, École de médecine de l’Université de Hanovre, Allemagne.

L’importance d’amorcer le traitement lorsque le patient est en CF II a été démontrée lors de l’essai EARLY (Endothelin Antagonist Trial in Mildly Symptomatic Pulmonary Arterial Hypertension Patients), à ce jour le seul essai avec randomisation et placebo qui regroupait uniquement des patients en CF II au départ (Galiè et al. Lancet 2008;371:2093-100). Ces patients ont peu de symptômes et semblent en bonne santé, mais leur pronostic est assez sombre faute de traitement, souligne le Dr Hoeper. Lors de l’essai EARLY, on a observé une détérioration en 6 mois chez 13 % des sujets non traités. En général, après 1 an, la détérioration clinique est évidente chez le tiers des sujets, ajoute-t-il.

Dans leurs recommandations conjointes, l’ESC et l’ERS suggèrent (niveau de preuve 1A) d’amorcer le traitement par un antagoniste des récepteurs de l’endothéline (ARE) (bosentan ou ambrisentan) ou un inhibiteur de la PDE-5 (sildénafil) chez les patients de CF II. «Les données les plus concluantes à l’appui d’un ralentissement de la progression de la maladie proviennent des ARE», poursuit le Dr Hoeper. Lors de l’essai EARLY, le bosentan, comparativement au placebo, a été associé à une incidence significativement plus faible de détérioration de la CF; en outre, durant les 6 mois de l’essai, le traitement par le bosentan a été associé à la stabilisation ou à l’amélioration de la CF chez 97 % des patients, à un ralentissement significatif de la progression de l’HTAP et à une tendance à la hausse de la distance parcourue lors du test de marche de 6 minutes.

Lorsque le patient est déjà en CF III ou IV au moment du diagnostic, l’ESC et l’ERS préconisent un ARE, un inhibiteur de la PDE-5 ou un prostanoïde. Dans les cas où aucune amélioration ne résulte de la monothérapie, l’association doit être envisagée. Les associations ARE + inhibiteur de la PDE-5, ARE + prostanoïde et prostanoïde + inhibiteur de la PDE-5 se sont toutes révélées bénéfiques.

Lorsque la réponse à une bithérapie orale se révèle insuffisante, l’ajout d’époprosténol en intraveineux (i.v.) serait peut-être la meilleure option, estime le Dr Hoeper. Les premières données obtenues chez des patients ayant déjà atteint la dose cible de bosentan et recevant du sildénafil à forte dose ont montré que l’ajout d’époprosténol i.v. améliorait considérablement les paramètres hémodynamiques et les résultats du test de marche de 6 minutes, la distance parcourue étant passée de 375±113 m à 467±85 m (p<0,02) (Negro et al. Am J Respir Crit Care Med 2009;179:A3372). Cela dit, la durée moyenne de survie de ces patients n’est toujours que de 2 à 3 ans, ce qui souligne la nécessité de nouveaux traitements et l’importance des essais en cours sur des stratégies thérapeutiques prometteuses.

Monothérapie en première intention

Une étude rétrospective présentée au congrès par le Dr Wouter Jacobs, Université libre d’Amsterdam (VU), Pays-Bas, a révélé que la distance parcourue au test de marche de 6 minutes avait augmenté davantage chez les patients atteints d’HTAP idiopathique à qui on avait administré de l’époprosténol i.v. en première intention que chez ceux qui avaient reçu du bosentan, également en première intention (Jacobs et al. J Heart Lung Transplant; publié en ligne avant impression, juin 2010). Cela dit, la survie et l’intervalle sans progression étaient similaires pour les deux traitements.

Ses collaborateurs et lui-même ont étudié les résultats à long terme de l’HTAP chez des patients hospitalisés dans leur établissement entre 1998 et 2006. Avant 2003, les patients recevaient d’emblée de l’époprosténol i.v., mais à partir de 2003, le bosentan oral nouvellement homologué a pris le relais. Afin de prendre la sévérité de la maladie en compte, les chercheurs ont réparti les patients en deux cohortes de 16 tandems de patients appariés selon le débit cardiaque et la distance parcourue au test de marche de 6 minutes au départ, peu importe leur CF initiale. L’amélioration médiane (IC à 95 %) de la distance parcourue au test de 6 minutes après 1, 2 et 3 ans se chiffrait respectivement à +66 m (-9; 109), +78 m (-37; 161) et +98 m (-123; 182) sous bosentan et à +110 m (12; 265), +180 m (63; 327) et +142 m (116; 242) sous époprosténol i.v. Selon la méthode de Kaplan-Meier, le nombre de patients dont la maladie n’avait pas progressé après 1, 2 et 3 ans a été estimé à 75 %, 60 % et 43 % sous bosentan vs 81 %, 63 % et 50 % sous époprosténol i.v. La survie à 1, 2 et 3 ans se chiffrait à 100 %, 92 % et 92 % (ARE) vs 100 %, 88 % et 88 % (époprosténol i.v.).

«Ces résultats confirment que le traitement de première intention est efficace, mais qu’on ne doit pas conclure à une prolongation de la survie sur la base d’une amélioration plus marquée de la capacité d’effort mesurée par le test de marche de 6 minutes», fait valoir le Dr Jacobs. Cependant, «n’oublions pas qu’il s’agissait d’une étude d’observation et que la prudence s’impose lorsqu’on tire des conclusions de pareilles données», dit-il en terminant.

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