Comptes rendus

La personnalisation du traitement au vu de l’épidémiologie changeante des mycoses invasives et des infections bactériennes communautaires
Résultats cliniques chez les transplantés rénaux : regard sur le diabète et la néphropathie à polyomavirus BK

Conservation de la fonction rénale à long terme chez les transplantés : le rôle d’un ICN à une prise par jour

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - American Transplant Congress 2009

Boston, Massachusetts / 30 mai-3 juin 2009

Jusqu’à tout récemment, on ignorait les effets à long terme des deux inhibiteurs de la calcineurine (ICN) sur la fonction rénale, et la plupart des études sur les schémas d’épargne d’ICN ne différenciaient aucunement les deux ICN à cet égard. Pourtant, affirme le Dr Nagappan Kumar, University Hospital of Wales, Cardiff, tant les études de laboratoire que les études cliniques montrent que la cyclosporine (CsA) est plus toxique que le tacrolimus pour le rein. L’étude dont il est question ici avait donc pour objectif d’évaluer l’effet à long terme des deux ICN sur la fonction rénale, sur la survie du greffon et du patient ainsi que sur l’apparition d’un diabète post-transplantation (ADPT).

L’essai comparatif initial a pris fin en 2001, et les chercheurs ont ensuite suivi la totalité des 150 patients – 76 dans le groupe CsA en microémulsion et 74 dans le groupe tacrolimus – jusqu’au 31 octobre 2008. Après un suivi d’une durée moyenne de 9,6 ans, 64 % des patients sous tacrolimus avaient toujours un greffon fonctionnel, vs 54 % des sujets sous CsA. Le débit de filtration glomérulaire estimé à l’aide de l’équation de Cockroft-Gault s’établissait à 55 mL/min/1,73 m² dans le groupe tacrolimus vs 40 mL/min/1,73 m² dans le groupe CsA (p=0,002).

«Le pourcentage de patients exempts de rejet après 10 ans était plus élevé dans le groupe tacrolimus : 63 % vs 42 % (p=0,01)», ajoute le Dr Kumar. La seule variable qui n’était pas à l’avantage du tacrolimus était l’incidence de l’ADPT, qui était significativement plus élevée que dans le groupe CsA après 10 ans (23 % vs 5 %, respectivement; p=0,002), fait-il remarquer. Au fil des 10 années de suivi, 22 patients du groupe CsA sont passés au tacrolimus, alors que quatre patients sous tacrolimus sont passés à la CsA.

«À la lumière de nos données, nous croyons que les résultats des essais sur les ICN ne devraient pas être considérés globalement. Ils devraient plutôt être présentés séparément, selon que l’essai portait sur un schéma d’épargne du tacrolimus ou sur un schéma d’épargne de la CsA», conclut le Dr Kumar.

Préparation à libération prolongée

Les études portant sur l’efficacité du tacrolimus à libération prolongée (LP) à une prise par jour indiquent que ce schéma est aussi sûr et efficace que le schéma à deux prises par jour, mais il est plus pratique du fait qu’il se prend en une dose unique le matin. Comme le soulignent les chercheurs, entre 7 et 21 % des transplantés d’organes solides développent une insuffisance rénale chronique cinq ans après la greffe, et il a été démontré que l’inobservance du traitement augmente les pertes tardives du greffon, surtout chez les jeunes adultes.

Lorsqu’elle a évalué quatre cohortes de patients qui avaient participé à des essais de phase II sur le tacrolimus à une prise par jour, la Dre Rita Alloway, directrice de la Clinique des transplantations, University of Cincinnati, Ohio, et ses collaborateurs ont suivi prospectivement deux cohortes de transplantés de novo (l’une de transplantés rénaux, l’autre de transplantés hépatiques) qui commençaient à recevoir du tacrolimus une fois par jour immédiatement après la greffe et deux cohortes de transplantés stables (l’une de transplantés rénaux, l’autre de transplantés cardiaques) qui étaient passées du tacrolimus à deux prises par jour au tacrolimus à une prise par jour.

À peu près les trois quarts de tous les patients ont été suivis pendant la totalité des 48 mois. «Les estimations de la survie des patients et des greffons excédaient 90 % après quatre ans de suivi dans toutes les cohortes», souligne la Dre Alloway. Les autres résultats étaient les suivants :

Tableau 1. Efficacité et fonction rénale à 48 mois


«Le tacrolimus administré une fois par jour est plus pratique pour les patients, et un schéma simple peut avec le temps favoriser l’adhésion au traitement et ainsi prolonger la survie globale du greffon», explique-t-elle.

La préparation à une prise par jour a également été évaluée au sein d’une cohorte distincte de transplantés hépatiques, qui avaient tous reçu du tacrolimus une fois ou deux fois par jour pendant une étude européenne de phase III de 12 mois. Au terme de l’étude, les patients étaient admis à une étude prospective dans le cadre de laquelle ils recevaient tous du tacrolimus une fois par jour, et 119 des 130 patients ont été suivis jusqu’à la fin de la deuxième année.

Comme le rapporte le Dr Pavel Trunecka, Institut de médecine clinique et expérimentale (IKEM), Prague, République tchèque, la dose quotidienne moyenne de tacrolimus administrée une fois par jour variait entre 0,066 mg/kg au début de l’étude et 0,059 mg/kg vers la fin de l’étude. «Les concentrations minimales variaient entre 6 et 8 ng/mL», précise le Dr Trunecka, ajoutant que ces concentrations étaient «probablement appropriées» pour une monothérapie par le tacrolimus. En effet, 70 % des patients ont reçu un traitement d’entretien par le tacrolimus à une prise par jour jusqu’au terme des 24 mois, ajoute-t-il. Un patient est mort pendant le suivi, et on a répertorié cinq épisodes de rejet aigu – dont quatre très bénins – mais aucune perte du greffon n’a été causée par un rejet. «La fonction rénale est demeurée excellente au cours de l’essai», fait valoir le Dr Trunecka.

Au terme de l’essai comparatif avec randomisation (12 mois), la concentration sérique moyenne de créatinine se chiffrait à 109,3 mmol/L et elle est demeurée stable jusqu’au 24e mois, où elle s’établissait en moyenne à 108,4 mmol/L. De même, la clairance moyenne de la créatinine se chiffrait à 76 mL/min/1,73 m² au 12e mois, et on a observé peu de fluctuations jusqu’au 24e mois, la clairance moyenne de la créatinine s’établissant alors à 77,9 mL/min/1,73 m².

«Ces résultats concordent parfaitement avec ceux de toute étude sur le tacrolimus à deux prises par jour, et la conclusion la plus importante de cette étude est que la majorité des transplantés hépatiques peuvent recevoir un traitement d’entretien par le tacrolimus à LP administré une fois par jour», conclut le Dr Trunecka.

Amélioration de l’adhésion

Il ressort de résultats d’études que la proportion de greffés rénaux n’adhérant pas à leur traitement atteint parfois 55 %, et ce problème est l’une des principales causes des pertes de greffon évitables (Chisolm MA. Drugs 2002;62:567-75). Inversement, un schéma immunosuppresseur à une prise par jour, le matin, est associé à une plus grande probabilité d’adhésion comparativement au traitement biquotidien.

L’efficacité du tacrolimus à une prise par jour a été évaluée plus à fond dans le cadre du suivi de un an d’une autre étude de phase III menée chez des greffés rénaux qui avaient reçu du tacrolimus une fois par jour pendant 18 mois en moyenne. Environ 93 % des patients qui ont terminé l’étude de phase III ont aussi participé au suivi de un an jusqu’à la fin. Sur les 177 patients qui ont été admis à la phase de prolongation, 14 s’en sont retirés pour diverses raisons, fait remarquer le co-investigateur, le Dr Bernhard Krämer, professeur titulaire de médecine, Université de Bochum, Allemagne.

Après un an de suivi, 59,2 % des patients recevaient du tacrolimus une fois par jour, un corticostéroïde et du mycophénolate mofétil (MMF); 25,7 % des patients ont reçu du tacrolimus à une prise par jour et du MMF tandis que 5,2 % recevaient du tacrolimus une fois par jour et un corticostéroïde. La dose quotidienne moyenne de tacrolimus est passée de 0,84 mg/kg du 1er au 3e mois à 0,076 mg/kg du 10e au 12e mois. Les concentrations minimales dans l’organisme entier sont demeurées stables au fil du suivi de un an, la concentration minimale moyenne s’établissant à 7,8 ng/mL.

Toujours après un an de suivi, le taux de survie des greffons était excellent à 98,9 %, et 100 % des patients étaient toujours en vie. Un rejet aigu confirmé par biopsie (RACB) a été signalé chez un seul patient, pour un taux «sans RACB» de 99,5 % après un an, tandis que deux rejets chroniques sont survenus. «La fonction rénale telle que mesurée par la créatinine sérique et la clairance de la créatinine est demeurée stable tout au long de l’année de suivi», ajoute le Dr Krämer. La fonction rénale est considérée comme un meilleur prédicteur de la survie à long terme du greffon et du patient que le rejet aigu, comme on le sait depuis peu.

Parmi les effets indésirables les plus courants figuraient les troubles gastro-intestinaux (11,5 %), les infections (17,8 %) et les troubles du métabolisme et de la nutrition (28,3 %). On a signalé une hyperglycémie chez 6 % des patients présentant un trouble du métabolisme glucidique préexistant, un nouveau diabète non insulinodépendant chez 6 % des patients et un diabète insulinodépendant chez 4,2 % des patients. Des néoplasies bénignes et des tumeurs malignes n’ont été signalées que très rarement.

«Ces données de suivi confirment l’innocuité et l’efficacité à long terme d’un schéma simplifié par le tacrolimus à une prise par jour chez des greffés rénaux, concluent les auteurs, et les résultats de cette étude sont semblables à ceux auxquels on s’attend d’un traitement biquotidien par le tacrolimus.»

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