Comptes rendus

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Des progrès dans le traitement du psoriasis

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 17e Congrès de l’Académie européenne de dermatologie et de vénéréologie

Paris, France / 17-21 septembre 2008

Le psoriasis est une maladie chronique qui a des conséquences importantes sur la qualité de la vie et qui comporte un risque élevé de comorbidité sévère, notamment des complications cardiovasculaires, explique le Dr Jean-Paul Ortonne, service de dermatologie, Hôpital universitaire de Nice, France. Les traitements systémiques actuels ne peuvent souvent être administrés que de manière intermittente et limitée dans le temps en raison d’incertitudes quant à leur innocuité à long terme. La technologie des anticorps monoclonaux permet aux médecins de cibler des éléments spécifiques du processus pathologique à l’œuvre dans le psoriasis. Maintenant que l’on connaît l’importance de la voie des interleukines (IL) 12/23 dans la pathogenèse de cette maladie, on comprend pourquoi elle est l’une des cibles privilégiées des traitements biologiques systémiques.

Sous-unité p40 des IL 12/23

On dispose aujourd’hui de plusieurs traitements capables d’interférer avec la pathogenèse du psoriasis et de réguler à la baisse le processus inflammatoire, affirme le Dr Jörg Christoph Prinz, Université Ludwig-Maximilians, Munich, Allemagne. Les IL 12/23 étant surexprimées dans les plaques psoriasiques, elles représentent une nouvelle cible de traitement. «Nous avons vu qu’en interférant avec les IL 12/23, nous pouvons induire la rémission du psoriasis. Ceci indique clairement le rôle central des IL 12/23 dans la pathogenèse de cette maladie, rappelait le Dr Prinz aux congressistes. Ces deux cytokines favorisent l’activation et la différenciation des lymphocytes T responsables de l’inflammation et la prolifération des kératinocytes. Les anticorps monoclonaux, en bloquant la sous-unité p40 des IL 12/23, neutralisent ces deux cytokines, ce qui les rend extrêmement efficaces pour réguler l’activité de la maladie.»

Deux nouveaux anticorps monoclonaux entièrement humains, l’ustekinumab et l’ABT-874, ont été conçus et développés dans le but de se lier spécifiquement à la sous-unité p40 commune aux IL 12/23 afin d’empêcher ces cytokines de stimuler les lymphocytes T que l’on sait directement impliqués dans la pathogenèse du psoriasis. Ce mode d’action est tout à fait unique si on le compare à celui des agents biologiques dont on dispose en ce moment.

Programme PHOENIX

Le Dr Peter van de Kerkhof, directeur du service de dermatologie, Centre médical universitaire St-Radboud, Nimègue, Pays-Bas, a présenté les résultats du programme d’essais de phase III PHOENIX (Psoriasis Following Long-Term Extension) dont l’objectif était d’évaluer l’efficacité et l’innocuité de l’ustekinumab chez des patients souffrant de psoriasis en plaques modéré ou sévère.

Le paramètre principal d’évaluation, commun aux essais PHOENIX 1 et 2, était la proportion de patients qui atteignaient le critère PASI 75 (amélioration de 75 % du score PASI [Psoriasis Area and Severity Index] vs score initial) après 12 semaines de traitement.

Lors des essais PHOENIX 1 et 2, 766 et 1230 patients, respectivement, recevaient aléatoirement l’ustekinumab – 45 mg (n=255 et 409) ou 90 mg (n=256 et 411) – ou un placebo, par voie sous-cutanée, aux semaines 0 et 4, puis toutes les 12 semaines.

Après 12 semaines de traitement, le critère PASI 75 était atteint chez 67,1 % et 66,7 % des patients dans les groupes 45 mg et chez 66,4 % et 75,7 % dans les groupes 90 mg, rapporte le Dr van de Kerkhof. Par comparaison, la réponse des patients des groupes placebo était remarquablement faible : 3,1 % et 3,7 % (p<0,001 pour tous les groupes vs placebo) (Figure 1).

Au cours de l’essai PHOENIX 1, «les lésions ont été blanchies ou jugées minimes selon l’échelle PGA (Physicians Global Assessment) chez 60 % des patients du groupe 45 mg et 62 % des patients du groupe 90 mg. Le critère PASI 90 était atteint chez 42 % (45 mg) et 37 % (90 mg) des patients après les deux premières injections», précise le Dr van de Kerkhof. Dans les deux essais, la proportion de patients répondant au critère PASI 75 était stable à 28 semaines : environ 70 % dans les deux groupes 45 mg et 79 % dans les deux groupes 90 mg.

Toujours lors de l’essai PHOENIX 1, les 255 patients qui avaient reçu un placebo aux semaines 0 et 4 sont ensuite passés au traitement actif et ont reçu des injections d’ustekinumab à 12, 16 et 28 semaines. Par ailleurs, les patients sous ustekinumab qui atteignaient le critère PASI 75 à 28 et 40 semaines étaient à nouveau randomisés après 40 semaines pour recevoir un traitement d’entretien ou un placebo jusqu’à ce que la réponse disparaisse.

Figure 1. PASI 75 à 12 semaines : Paramètre principal des études PHOENIX 1 et PHOENIX 21,2


Un intervalle de 12 semaines entre chaque dose semble être le schéma optimal, note le Dr van de Kerkhof. «Le traitement d’entretien est efficace avec ce rythme d’injections puisque le taux de réponse au critère PASI 75 restait élevé après 76 semaines de traitement alors qu’il ne cessait de diminuer chez les patients placés en deuxième intention dans le groupe placebo, la rechute (perte de la réponse au critère PASI 75) étant survenue au bout d’une durée médiane de 15 semaines.

Sur le plan de l’innocuité, les données recueillies pendant toute la durée de la phase d’entretien n’ont pas révélé de différence significative entre le traitement actif et le placebo. Les effets indésirables, tous d’intensité légère, incluaient des infections des voies respiratoires supérieures, des rhinopharyngites et des céphalées. Cependant, fait remarquer le Dr van de Kerkhof, le taux d’arthralgies était plus élevé chez les patients qui sont passés du traitement actif au placebo. «Ceci soulève une question : que pourrait vraiment apporter l’ustekinumab dans le traitement du rhumatisme psoriasique?»

Le Dr van de Kerkhof a répondu à cette question en rapportant les résultats d’un essai de phase II, mené par la Dre Alice Gottlieb, Tufts Medical Center, Boston, Massachusetts, qui regroupait des patients souffrant de rhumatisme psoriasique traité par l’ustekinumab. Le paramètre principal de l’étude – la réponse au critère ACR 20 à la 12e semaine – a été bien plus souvent atteint dans le groupe ustekinumab (42,1 %) que dans le groupe placebo (14,3 %) (p<0,001). «Un schéma identique à celui que l’on utilise pour le traitement d’attaque du psoriasis en plaques peut donc également être efficace dans le rhumatisme psoriasique», souligne-t-il.

L’ustekinumab injecté par voie sous-cutanée à raison de 45 mg ou de 90 mg toutes les 12 semaines est efficace dans le psoriasis modéré ou sévère. En effet, «la majorité des patients répondent au critère PASI 75 rapidement et de manière soutenue, et cette réponse peut être maintenue en toute sécurité avec seulement quatre injections par an», conclut le Dr van de Kerkhof.

Étude ACCEPT

«Les études qui compareraient directement les agents biologiques entre eux font actuellement défaut et c’est uniquement parce que l’on utilise couramment le même paramètre, à savoir le score PASI 75, que l’on est en mesure [de comparer les résultats des différentes études]», explique le Dr Christopher Griffiths, directeur, Greater Manchester Dermatology Centre, Royaume-Uni.

L’étude ACCEPT (A Study of the Safety and Effectiveness of CNTO 1275 [ustekinumab] Compared to Etanercept for the Treatment of Moderate to Severe Plaque Psoriasis) est la première à comparer directement deux agents biologiques dans le traitement du psoriasis.

L’étanercept, antagoniste du TNF-alpha, a été choisi, car c’est l’agent biologique le plus utilisé dans le traitement du psoriasis, et donc le traitement de référence auquel les autres doivent être comparés, affirme le Dr Griffiths.

Les patients recevaient aléatoirement l’ustekinumab (45 mg [n=209] ou 90 mg [n=347]) aux semaines 0 et 4, ou l’étanercept (5 mg [n=347]) deux fois par semaine, par injection sous-cutanée, pendant 12 semaines. Plusieurs des paramètres d’évaluation reposaient sur la proportion de patients ayant atteint différents critères à la 12e semaine, comme le critère PASI 75, le score PGA «blanchiment des lésions» ou «lésions minimes», ou le critère PASI 90.

Selon les résultats préliminaires à 12 semaines, les réponses au traitement du psoriasis modéré ou sévère, évaluées en fonction des critères PASI 75 et 90 et du score PGA, étaient significativement meilleures dans les deux groupes ustekinumab que dans le groupe étanercept. «Je suis certain que la comparaison directe entre les traitements sera la norme dans les prochaines études et qu’elle aura d’importantes retombées cliniques sur la prise en charge du psoriasis sévère», conclut-il.

Résumé

Les anticorps dirigés contre les IL 12/23 constituent une option thérapeutique prometteuse dans la prise en charge du psoriasis. Des résultats d’études de phase III récemment publiés ont en effet objectivé leur rapidité d’action, leur efficacité et leur innocuité à long terme chez des patients souffrant d’une forme modérée ou sévère de cette maladie.

Pour voir le symposium satellite intégral, veuillez accéder au site https://www.eadv2008.info/archived_event, puis entrer le mot de passe suivant : EADV2008.

Nota : Au moment de la mise sous presse, l’ustekinumab n’était pas commercialisé au Canada.

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