Comptes rendus

L’asthme chez l’enfant : stratégies pour une meilleure adhésion au traitement
En quête de l’association d’INTI optimale dans le traitement de première intention de l’infection à VIH : le pour et le contre des choix actuels

Forces relatives et utilisation clinique des inhibiteurs de l’entrée par le corécepteur CCR5

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La XVIIIe Conférence internationale sur le SIDA (IAS)

Vienne, Autriche / 18-23 juillet 2010

Chez les patients dont le système immunitaire perd du terrain aux mains de l’infection à VIH, les associations d’antirétroviraux (ARV) doivent continuer d’être administrées sans interruption ou presque pour maîtriser l’infection. L’association de deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) et d’un inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse (INNTI) est largement recommandée et utilisée en première intention en raison de sa grande efficacité et de sa grande innocuité, mais on doit sélectionner avec prudence les schémas de deuxième intention et subséquents qui s’imposent en cas d’intolérance ou de résistance afin d’avoir en réserve le plus d’options de traitement possible. Ordinairement, les nouvelles classes, qui sont généralement efficaces en présence de multiples mutations de résistance, sont réservées aux cas les plus avancés, mais cette approche est en train de changer.

Profil de résistance et efficacité

Comme le souligne le Dr Jürgen Rockstroh, chef de la clinique VIH ambulatoire, Universität Bonn, Allemagne, «les options actuelles nous donnent beaucoup plus de latitude pour l’individualisation du traitement. Il y a des situations où il est logique d’utiliser un nouvel ARV plus tôt. Lorsque la résistance croisée n’est pas un obstacle, d’autres facteurs peuvent déterminer la séquence des traitements.» L’utilisation clinique des antagonistes du corécepteur CCR5 (anti-CCR5) illustre clairement ce virage. Bien que l’anti-CCR5 actuellement sur le marché, le maraviroc (MVC), soit doté d’un profil de résistance unique, il semble plus approprié en première ou en deuxième intention qu’en dernier recours en raison des caractéristiques virales changeantes qui réduisent la proportion de patients susceptibles d’y répondre lorsque l’infection est avancée.

Dans le cadre d’une série de cas présentés durant un symposium dont l’objectif était de déterminer le meilleur moment et la meilleure façon de sélectionner les patients à qui conviennent les inhibiteurs de l’entrée, le MVC a à maintes reprises été qualifié de solution de rechange séduisante dans les cas d’intolérance à l’éfavirenz, un INNTI, ou à l’un des inhibiteurs de la protéase potentialisés par le ritonavir (IP/r), par exemple l’atazanavir (ATV) ou le lopinavir. Comme d’autres nouveaux ARV, il a d’abord été évalué comme traitement de sauvetage et a d’ailleurs fait la preuve de son efficacité dans ce contexte lorsqu’il était associé à au moins un autre agent actif. Une série subséquente d’études réalisées chez des patients encore jamais traités a aussi objectivé une grande efficacité de même qu’un profil d’innocuité exceptionnellement favorable. L’étude clé MERIT-ES a révélé que l’anti-CCR5 était aussi efficace que l’éfavirenz lorsque les deux étaient associés à deux INTI et que le tropisme CCR5 du virus avait d’abord été confirmé.

Selon les résultats de l’étude MERIT-ES, qui ont amené la Food and Drug Administration (FDA) américaine à homologuer le nouvel ARV comme traitement de première intention, la proportion de patients ayant une charge virale indécelable (<50 copies de l’ARN du VIH /mL) à 96 semaines était d’environ 60 % dans les deux groupes. En outre, l’intervalle précédant la perte de la réponse virologique et la proportion de patients demeurés sous traitement étaient statistiquement comparables dans les deux groupes.

Tropisme CCR5

Une analyse antérieure de l’étude MERIT n’avait pas confirmé la non-infériorité de l’anti-CCR5 par rapport à l’éfavirenz, mais on a ensuite démontré que ce résultat tenait au manque de sensibilité du test de tropisme CCR5 utilisé. C’est l’importance du virus à tropisme CCR5 qui fait de ce nouvel ARV un choix plus approprié en première ou en deuxième intention qu’en dernier recours.

Comme l’explique le Dr Daniel Kuritzkes, directeur de la recherche sur le SIDA, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, Boston, «le MVC tient le VIH en échec en l’empêchant d’interagir avec le récepteur de chimiokines CCR5 sur la cellule hôte. Lorsque l’infection est causée par un virus à tropisme CCR5, ce mode d’action est hautement efficace.» Il est crucial de reconnaître l’importance du tropisme CCR5 pour comprendre le rôle de cette classe d’ARV. Chez environ 80 % des patients naïfs au traitement, le virus utilise le récepteur CCR5 exclusivement pour entrer dans le lymphocyte alors que chez les autres patients, il utilise exclusivement le seul autre corécepteur, CXCR4, ou il utilise les deux récepteurs. Dans les cas avancés, la proportion d’infections où le virus utilise le corécepteur CCR5 est plus faible, de sorte que 50 à 70 % des patients sont susceptibles de répondre à l’inhibiteur de l’entrée par le CCR5. Une efficacité moindre serait attendue dans les infections D/M ou X4, qui sont la portion restante des infections.

Stratégie en première et en deuxième intention

De l’avis de la Dre Annemarie Wensing, consultante principale en virologie clinique, Centre médical universitaire, Utrecht, Pays-Bas, «le MVC n’est pas un médicament qu’on a intérêt à administrer en tout dernier lieu». Dans l’établissement où elle exerce, les anti-CCR5 s’avèrent hautement efficaces contre les infections avancées causées par un virus à tropisme CCR5 exclusif, précise la Dre Wensing. D’ailleurs, le test de tropisme est maintenant monnaie courante dans son établissement, même lorsque l’infection est peu avancée. Ce test donne une meilleure idée des options et permet de mieux planifier le traitement si l’option subséquente échoue pour cause d’intolérance ou de manque d’efficacité, souligne-t-elle.

L’un des plus grands avantages du MVC est sa tolérabilité, et c’est d’ailleurs ce qui explique qu’il soit utilisé aux premiers stades, affirme le Dr Rockstroh. Cet ARV n’exerce aucun des effets neurotoxiques de l’éfavirenz et il est neutre sur le plan métabolique, ce qui le différencie de plusieurs IP/r. Les essais MOTIVATE ont démontré qu’il n’y avait aucune différence cliniquement significative entre le MVC et le placebo au chapitre de l’innocuité. Cet avantage – qui en fait un choix logique en deuxième intention chez les patients qui ne tolèrent pas bien le schéma initial – a motivé la tenue d’études visant à l’évaluer dans le cadre de schémas novateurs conçus expressément pour réduire le risque de complications.

Le plus important des essais récents, dont les résultats prometteurs ont été présentés lors d’une séance de dernière heure au congrès, était une étude pilote visant à évaluer le MVC dans le cadre d’une bithérapie ARV sans INTI. Cette étude, à l’instar d’une autre étude publiée récemment qui portait sur le MVC, le raltégravir et l’étravirine (Nozza et al. AIDS 2010;24:924-8), témoigne des efforts que l’on déploie actuellement pour éviter les effets indésirables possibles des INTI.

Résultats de l’étude A4001078

«En définitive, cette étude a pour but de nous aider à trouver un schéma à une prise par jour qui nécessite peu de comprimés et qui n’a pas la toxicité des INTI», explique le Dr Simon Portsmouth, consultant et médecin-chef en médecine VIH, St. Mary’s Hospital, Londres, Royaume-Uni. Le MVC a plusieurs attributs, poursuit-il; entre autres, il pénètre bien dans le liquide céphalorachidien et les compartiments génitaux, et il entraîne peu de mutations qui confèrent la résistance à d’autres ARV en cas d’échec.

Lors de cette étude ouverte de phase IIb, intitulée A4001078, 121 patients jamais traités ont été randomisés de façon à recevoir 150 mg de MVC 1 fois/jour ou un schéma standard, soit 300 mg de ténofovir et 200 mg d’emtricitabine administrés avec une dose usuelle d’ATV/r. Le paramètre principal était la proportion de patients ayant une charge virale indécelable (<50 copies/mL). Lorsqu’il a présenté les résultats partiels à 24 semaines, le Dr Portsmouth a rapporté que les caractéristiques initiales étaient semblables dans les deux groupes.

À 24 semaines, la proportion de patients ayant une virémie indécelable – au moins 80 % dans chaque groupe – était statistiquement identique dans les deux groupes. Comme lors des études antérieures, l’augmentation médiane du nombre de cellules CD4+ était beaucoup plus marquée dans le groupe MVC que dans le groupe de comparaison (190 vs159 cellules/mm3). Bien que le taux d’effets indésirables de grade 3 ou 4 ait été plus élevé dans le groupe MVC (33,3 % vs 21,3 %), le taux d’abandon pour cause d’effets indésirables n’était que légèrement plus élevé (3 % vs 0 %).

Le MVC est typiquement administré 2 fois/jour, mais il a été évalué dans un schéma à une prise par jour dans cette étude en raison de données montrant que le traitement par un IP augmente les concentrations de l’anti-CCR5. Lorsqu’il a présenté les résultats de l’étude satellite sur la pharmacocinétique, le Dr Portsmouth a souligné que les concentrations de MVC étaient demeurées plusieurs fois supérieures à la concentration cible tout au long de l’étude. Aucun changement n’a été observé dans le tropisme selon le test phénotypique, ce qui donne à penser que lors de cette étude, comme lors des essais antérieurs, le MVC n’a pas entraîné de pression sélective vers un virus à tropisme CXCR4. Sur la foi de ces résultats partiels, et compte tenu de l’importance de mettre au point de schémas sans INTI, «on prévoit maintenant une étude de phase III», ajoute le Dr Portsmouth.

La plus forte probabilité de réponse optimale au MVC en début de traitement semble indiquer que cet ARV devrait être administré aux premiers stades plutôt qu’à un stade ultérieur de l’infection à VIH. Il se pourrait toutefois que d’autres agents nouveaux soient poussés à l’avant-scène à mesure qu’avancent nos connaissances sur la façon de conserver et de maximiser les options subséquentes tout en offrant des traitements bien tolérés aux patients. À l’instar du MVC, le raltégravir, un inhibiteur de l’intégrase, par exemple, n’a pas d’effet sur le bilan lipidique, si bien qu’il pourrait être plus logique de l’administrer à un stade plus précoce de la maladie, au lieu d’un IP/r, chez les patients déjà exposés à un risque cardiovasculaire élevé. Ces virages dans le traitement ARV font actuellement l’objet d’essais cliniques.

Résumé

L’expérience clinique acquise à ce jour avec un antagoniste du corécepteur CCR5 illustre comment de nouveaux ARV viennent modifier la séquence traditionnelle des traitements chez les patients dont l’infection à VIH progresse. Par le passé, les agents dotés d’un mode d’action novateur étaient en général utilisés exclusivement en dernier recours, mais le MVC semble faire exception à la règle. D’ailleurs, l’approche traditionnelle pourrait également ne pas être appropriée pour d’autres nouveaux agents dans certains contextes cliniques bien précis. La façon dont on utilise les ARV les uns par rapport aux autres continuera fort probablement d’évoluer.

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