Comptes rendus

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Intervention en temps opportun : les progrès du traitement de la sclérose en plaques rémittente

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 22e Congrès du European Committee for Treatment and Research in Multiple Sclerosis (ECTRIMS)

Madrid, Espagne / 27-30 septembre 2006

Lorsque la sclérose en plaques (SEP) progresse au-delà d’un certain seuil d’incapacité, il est de plus en plus clair que le traitement n’a essentiellement aucun effet sur le déclin subséquent. La prise en charge de la SEP doit donc être axée prioritairement sur la mesure précise des marqueurs pronostiques et sur l’administration précoce d’agents qui préviennent efficacement les poussées et la progression de l’incapacité. L’interféron bêta (IFNß) demeure un outil puissant dans l’arsenal thérapeutique de la SEP, mais son efficacité est limitée. Le natalizumab, anticorps anti-intégrine alpha-4, est doté d’un mode d’action novateur dans le traitement de la SEP. Les résultats publiés récemment d’essais cliniques de phase III de longue durée ont permis de constater que cet agent offre une grande efficacité dans le traitement de la SEP rémittente.

Repérer les patients à risque de poussée et de progression de l’incapacité

Aux premiers stades de la SEP, le cerveau est très en mesure de réparer les dégâts causés par la démyélinisation. Cependant, explique le Dr Hans-Peter Hartung, Université Heinrich Heine, Düsseldorf, Allemagne, «de solides données montrent qu’au-delà d’un certain seuil de compensation, la perte axonale s’accompagne toujours d’une progression constante et inexorable de l’incapacité clinique; il est donc impératif de prévenir cette perte dans le traitement de la SEP».

Les études IRM longitudinales en cours dans plusieurs centres montrent que le nombre et le type de lésions sont annonciateurs de l’apparition subséquente de signes cliniques de la maladie. Le profil IRM permet aussi de prédire le moment où surviendront les poussées subséquentes, précise la Dre Mar Tintoré, Hôpital universitaire Vall d’Hebron, Barcelone, Espagne. L’IRM permet donc de repérer les patients exposés au risque d’apparition de la maladie à brève échéance. En pareils cas, il est d’autant plus important d’intervenir tôt que les facteurs de risque clinique de la progression de l’incapacité s’appliquent uniquement pendant la phase précoce de la maladie où surviennent des poussées. Lorsque la cote EDSS (Expanding Disability Status Scale) d’un patient dépasse 4, c’est-à-dire lorsque le patient a du mal à marcher sans toutefois avoir besoin d’une canne, la progression devient indépendante du tableau initial de la maladie. Il est donc essentiel d’administrer sans délai un traitement efficace qui prévient les poussées et la progression.

Résultats d’essais cliniques

Le natalizumab, anticorps monoclonal, inhibe la migration des leucocytes dans le tissu parenchymateux du cerveau en se fixant aux intégrines alpha-4 à la surface de ces cellules. Il en résulte un blocage de la fixation de ces récepteurs à la molécule VCAM-1 (molécule d’adhésion aux cellules vasculaires-1) sur les cellules endothéliales, ce qui prévient la migration des leucocytes circulants dans le système nerveux central.

Le Dr Howard S. Rossman, directeur médical, Centre de SEP, Michigan Institute for Neurological Disorders, Farmington Hills, a décrit les essais de phase III de 120 semaines AFFIRM (Natalizumab Safety and Efficacy in Relapsing Remitting Multiple Sclerosis) et SENTINEL (Natalizumab in Combination with Interferon Beta-1a in Patients with Relapsing Remitting Multiple Sclerosis), qui représentent plus de 3800 années-patients. «Ce programme de recherche est le plus vaste et le plus rigoureux de toutes les études sur les agents approuvés dans le traitement de la SEP.»

Lors de l’essai AFFIRM (monothérapie vs placebo), la fréquence annualisée des poussées avait baissé de 68 % après un an de traitement actif, et cette baisse se maintenait à deux ans (p<0,001). Lorsqu’elles survenaient, les poussées étaient moins sévères, puisque les chercheurs ont enregistré une baisse de 69 % du taux d’utilisation de stéroïdes par rapport au groupe placebo. De l’avis du Dr Rossman, c’est donc dire «que les poussées n’étaient pas aussi sévères et que les patients étaient plus nombreux à ne pas prendre de stéroïdes». Sur une période de deux ans, le risque de progression de l’incapacité a été abaissé de 42 % (p<0,001), lorsque le critère était le maintien d’une diminution de la cote EDSS pendant 12 semaines. Lorsque le critère était le maintien de cette diminution pendant 24 semaines, la réduction du risque atteignait 54 % (p<0,001), de sorte que plus le critère était strict, plus le bénéfice était important, note-t-il. Fait très important, l’anticorps monoclonal a réduit de 67 % le risque de progression vers le point tournant qu’est la cote EDSS de 4. Les paramètres IRM positifs étaient notamment une réduction de 92 % des lésions prenant le gadolinium (Gd+) à un et à deux ans (p<0,001) et une réduction de 83 % du nombre moyen de lésions en T2 nouvelles ou en expansion à deux ans, par rapport aux valeurs de départ (p<0,001).

Bien que ce composé n’ait pas fait l’objet d’une comparaison directe avec d’autres agents utilisés dans le traitement de la SEP, la fréquence des poussées qui lui est associée se compare favorablement à la réduction d’environ un tiers associée aux IFNß. Cette plus grande efficacité du traitement se traduit par d’importants avantages sur le plan de la qualité de vie. «La qualité de vie est l’un des paramètres les plus importants aux yeux de nos patients», fait valoir le Dr Rossman, ajoutant que le natalizumab «est le premier agent évalué dans un essai clinique de phase III sur la SEP à permettre une amélioration importante de la qualité de vie selon le questionnaire SF-36, tant pour les paramètres physiques et mentaux que cognitifs. C’est une première.»

La constance de l’effet du traitement au cours de la première et de la deuxième année est une observation frappante qui se dégage de tous les paramètres mesurés lors des essais. Cette constance se maintient aussi sur de plus longues périodes de traitement. Le Dr Paul O’Connor, St. Michael’s Hospital, Toronto, Ontario, a présenté les données de 250 sujets de l’étude de prolongation qui ont reçu le natalizumab pendant trois ans au total. La fréquence des poussées se chiffrait à 0,23 au cours de la troisième année, comme durant la deuxième année. «Il est assez clair que l’effet du traitement est constant [...] et qu’il est à la fois évident et robuste», poursuit-il. L’étude de prolongation a aussi permis de constater que la protection contre les poussées se maintenait pendant deux à trois mois après l’arrêt du traitement et qu’il n’y avait aucun signe d’effet rebond.

Il est par ailleurs encourageant de voir que les patients dont la SEP était cliniquement plus active ont bénéficié encore plus du traitement. Les patients de ce sous-groupe avaient subi au moins deux poussées avant le début de l’étude ou présentaient au moins une lésion Gd+ à l’examen IRM initial. Chez ces patients, la fréquence annualisée des poussées a baissé de 81 % sous l’effet du natalizumab; selon le paramètre rigoureux du maintien de la diminution de l’incapacité pendant 24 semaines, la réduction du risque passait à 64 %. Cet agent «est efficace chez tous les types de patients, mais le bénéfice semble encore plus grand dans les cas où la maladie est cliniquement plus active», de préciser le Dr Rossman.

L’innocuité passe par une surveillance clinique appropriée

Les données d’innocuité des essais cliniques ne font ressortir aucune différence significative entre les patients traités et les patients non traités quant aux taux d’infections, aux réactions d’hypersensibilité, aux tumeurs malignes ou à la tolérabilité. La plupart des effets indésirables étaient bénins, et le risque est demeuré stable pendant les deux années des essais. En février 2005, le fabricant a suspendu volontairement la commercialisation du natalizumab à la suite de la déclaration de trois cas (dont deux chez des patients souffrant de SEP) de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LMP), infection virale rare qui, en général, n’accompagne pas la SEP. L’anticorps est maintenant indiqué en monothérapie aux États-Unis et en Europe, et on estime le risque actuel de LMP à 1 sur 1000 par période de huit mois. Les autorités et les neurologues s’entendent sur la nécessité de réduire ce risque au minimum grâce à une sélection appropriée des patients et à une surveillance clinique appropriée des symptômes évocateurs d’une LMP. Comme l’expliquent le Dr Frank Fazekas, École de médecine de Graz, Autriche, et le Dr Ludwig Kappos, Hôpital universitaire de Bâle, Suisse, il est recommandé de vérifier l’immunocompétence du patient avant le traitement, de surveiller les lésions caractéristiques de la LMP à l’examen IRM et, dans l’éventualité où des doutes subsistent, de procéder à une PCR (réaction en chaîne par polymérase) du liquide céphalorachidien pour confirmer l’infection. En parallèle, insiste le Dr Kappos, il est essentiel de toujours bien informer les patients des bienfaits et des risques de leur plan de traitement.

Résumé

Le traitement de la SEP exige une intervention opportune si l’on aspire à prévenir la progression subséquente de la maladie au-delà du seuil où l’incapacité progresse de façon inexorable. La surveillance des lésions sur les clichés IRM permet de repérer les patients à risque d’une progression rapide, et l’anticorps monoclonal a un rôle à jouer chez ces patients. Les conférenciers du congrès s’entendaient pour dire que cet agent représente un ajout sûr et très efficace à l’arsenal actuel des traitements de la SEP. Le Dr O’Connor estime que «le natalizumab peut être utile chez les patients dont les poussées sont réfractaires aux IFNß et qu’il pourrait aussi être utilisé en première intention dans les cas où la maladie s’installe brutalement et où le tableau clinique est sévère d’emblée».

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