Comptes rendus

Intervention en temps opportun : les progrès du traitement de la sclérose en plaques rémittente
Mise à jour sur la neuromodulation et les nouvelles options dans l’incontinence urinaire d’effort

Redéfinir la pression intraoculaire

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Congrès mondial d’ophtalmologie 2006

São Paulo, Brésil / 19-24 février 2006

«Pendant de nombreuses années, le glaucome à angle ouvert [GAO] a été défini comme une maladie d’hyperpression oculaire, mais nous croyons maintenant qu’il s’agit d’une neuropathie optique», affirme le Dr Harry Quigley, directeur, service du glaucome, Wilmer Institute, Johns Hopkins University, Baltimore, Maryland. Des spécialistes éminents définissent désormais le glaucome comme une atteinte de la papille optique, que l’on peut reconnaître à deux indices. Le premier signe est un ratio excavation/papille anormal qui est présent seulement chez 2,5 % de la population. «Si l’on combine cet indice avec un critère d’altération du champ visuel, qui est également quantitatif, cela signifie que nous disposons finalement d’un moyen pour confirmer l’existence d’une atteinte en présence d’un certain degré d’excavation et d’une certaine altération du champ visuel», explique-t-il.

La pression intraoculaire (PIO) a longtemps été le paramètre définissant le glaucome, y compris sur le plan du traitement. «Pourquoi, donc, avons-nous décidé d’écarter ce critère de la définition de l’atteinte glaucomateuse dans le GAO?», lance le Dr Quigley. Parce que des études ont montré que «de nombreuses personnes atteintes d’un GAO typique ont une pression oculaire qui est toujours normale, précise-t-il. Nous devons cesser d’utiliser le chiffre magique de 21 [mmHg] comme critère pour définir le glaucome.»

PIO cible définie individuellement

La PIO ne fait plus partie de la définition, mais elle demeure un important facteur, note le Dr Quigley. «La PIO ne permet pas de dépister le glaucome, mais elle détermine la gravité de la maladie et sa vitesse de progression, explique-t-il. Nous savons maintenant, à la lumière des résultats d’essais cliniques, que la réduction de la PIO joue son rôle — elle ralentit la progression de la maladie.»

Les médecins doivent définir la PIO cible appropriée pour chaque patient, souligne le Dr Quigley. «Le facteur de risque du GAO n’est pas l’hyperpression oculaire, c’est le niveau de pression oculaire chez chaque patient, dit-il. Nous devons déterminer le seuil de pression oculaire auquel la maladie apparaît chez chaque personne et établir une valeur pressionnelle cible inférieure à ce seuil.» Dans ce contexte, «le terme “glaucome à basse pression” perd son sens», car il existe seulement divers niveaux pertinents de PIO pour différents patients. «Il appert aujourd’hui que le glaucome à basse pression est une notion caduque, indique le Dr Quigley. Nous devrions parler [seulement] de GAO.»

Le Dr Paul F. Palmberg, professeur titulaire d’ophtalmologie, University of Miami School of Medicine, Floride, a approfondi ce thème de la personnalisation de la PIO cible. «Quand j’ai inventé ce terme de “pression cible” en 1989 — non pas le concept, qui existe depuis très longtemps, mais l’expression elle-même — je faisais référence à la meilleure estimation possible du niveau de pression qui serait assez faible pour prévenir la survenue de lésions dépendantes de la pression», indique-t-il. Le Dr Palmberg a analysé plusieurs études qui ont exploré les niveaux de pression cibles. «Après six essais cliniques et des coûts de 100 millions de dollars, nous constatons aujourd’hui que le Dr Paul Chandler avait vu juste en 1960», lance-t-il. Le Dr Chandler disait que des globes oculaires atteints de glaucome avancé devaient garder un niveau de pression inférieur à la normale pour demeurer stables, et que des globes oculaires qui présentaient une excavation limitée de la papille optique, restreinte à un seul pôle, pouvaient mieux tolérer la pression. «Une pression de 15 à 17 mmHg peut être convenable, pour autant que cela corresponde à une baisse d’environ 30 %. En présence d’une hypertension oculaire marquée, on peut probablement faire un suivi de la maladie glaucomateuse en s’autorisant un niveau de pression allant jusqu’à 30 mmHg, et cela peut être tout à fait adéquat. Examinez la papille et jugez, de là, de l’intensité du traitement à mettre en œuvre. À quel point la maladie a-t-elle été agressive? Il faut décider d’une intervention en proportion de cette donnée», explique le Dr Palmberg.

Déterminer le niveau de pression cible

Pour déterminer un niveau de pression cible individualisé, le médecin doit tenir compte des facteurs de risque comme le fardeau lésionnel initial, l’âge, les antécédents familiaux de cécité et la vitesse de progression de la maladie. «Si vous constatez qu’un patient a perdu cinq décibels depuis que vous l’avez examiné l’année précédente, vous prendrez peut-être des mesures plus énergiques que vous ne l’auriez fait si vous ne connaissiez pas ses antécédents», fait valoir le Dr Palmberg, ajoutant que les médecins doivent procéder graduellement pour atteindre la PIO cible du patient. «Je recommanderais d’essayer d’atteindre la pression cible en faisant d’abord appel à des mesures simples et sûres, suggère-t-il. Il se peut que vous deviez recourir à la chirurgie, mais il s’agit d’une décision thérapeutique complexe et pas seulement de la détermination d’un niveau de pression cible.»

Résultats d’études sur le flux sanguin et la réduction de la PIO

Le Dr Alon Harris, directeur, Glaucoma Research and Diagnostic Center, Indiana University School of Medicine, Indianapolis, et ses collègues s’apprêtent à publier un article dans une revue majeure qui démontre, pour la première fois chez l’humain, l’association entre des variations du débit sanguin engendrées par différentes conditions physiologiques et la saturation réelle en oxygène. Ces données confortent l’argument selon lequel «l’oxymétrie, reflet du véritable produit final des variations du débit sanguin, pourrait avoir une certaine importance clinique à court terme», indique le Dr Harris.

Ce dernier souligne que des études à long terme doivent être menées pour établir l’association entre le débit sanguin et la fonction visuelle dans le glaucome. Cela dit, il a attiré l’attention des congressistes sur les résultats prometteurs d’une étude de suivi post-diagnostic de sept ans effectuée en Europe selon lesquels «le flux diastolique est plus rapide [et] l’index de résistance, plus faible, chez les patients dont le champ visuel est stable que chez ceux dont le champ visuel se détériore. Découverte plus importante, le risque de détérioration du champ visuel était environ six fois plus élevé quand l’index de résistance était de 0,78 ou plus, par comparaison avec les patients présentant un faible index de résistance» (Galassi et al. Arch Ophthalmol 2003;121[12]:1711-5).

Dans une autre présentation donnée dans le cadre des séances scientifiques du congrès, le Dr Colm O’Brien, professeur titulaire d’ophtalmologie, chirurgien ophtalmologiste consultant et investigateur, University College Dublin and Mater Misericordiae Hospital, Dublin, Irlande, a fait une revue des études menées au cours des 15 dernières années. «Nous savons maintenant qu’il existe une association significative proche de la corrélation entre le débit sanguin et l’atteinte glaucomateuse, affirme-t-il. L’ennui concernant ces études, c’est qu’elles ont été réalisées en mode croisé et qu’elles ne permettent pas de discerner ce qui se présente en premier lieu : la réduction du flux sanguin oculaire résulte-t-elle des lésions, de la destruction de tissu nerveux ou est-ce un événement primaire qui conditionne l’apparition d’une partie des lésions nerveuses? C’est la question qu’il nous faut explorer.»

Selon le Dr Harris, certains traitements se révèlent à la fois capables de réduire la PIO et, par un mécanisme indépendant, d’améliorer la circulation. «À cet égard, les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique [IAC] ont montré une remarquable constance, note-t-il. Cela n’est pas si étonnant car on a aussi observé ces résultats dans le cerveau. Les données récentes dont on dispose indiquent que l’association d’un IAC avec un autre agent, comme un bêta-bloquant, a abaissé la pression, comme il le fallait, et a également maintenu son effet sur le flux sanguin.»

Le Dr Cengaver Tamer, Université Mustafa Kemal, faculté de médecine, ophtalmologie, Antakya, Turquie, et ses collègues ont comparé les mesures de la PIO sur une période de 24 heures après l’ajout du dorzolamide ou du maléate de timolol au schéma de traitement de patients atteints d’un GAO primaire et chez qui le latanoprost en monothérapie n’avait pas suffisamment abaissé la PIO. Les associations latanoprost/dorzolamide et latanoprost/timolol ont toutes deux semblé réduire efficacement la PIO, mais la baisse a été plus marquée sous l’effet du premier schéma, «en particulier la nuit, qui est une période très critique pour les patients glaucomateux», concluent les investigateurs.

Commentaires

Nous vous serions reconnaissants de prendre 30 secondes pour nous aider à mieux comprendre vos besoins de formation.