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Le bon usage des antibiotiques et le rôle des agents à large spectre

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 19e Congrès européen de microbiologie clinique (ECCMID)

Helsinki, Finlande / 16-19 mai 2009

L’émergence de microorganismes résistants représente un défi de taille pour tous les systèmes de santé du monde entier, et la situation exige un effort concerté de toutes les personnes concernées pour éviter l’usage inapproprié des antimicrobiens. «Au dire de nombreuses personnes, la résistance aux antimicrobiens est la plus grande menace pour la sécurité d’une nation, et l’éventualité d’une ère post-antibiotiques compromettrait les progrès médicaux actuels et futurs du traitement des maladies infectieuses», affirme le Dr Roman Kozlov, directeur, Institut de chimiothérapie antimicrobienne, École de médecine de Smolensk, Russie. Les conférenciers présents au congrès étaient d’accord pour dire que la solution ne réside pas dans la commercialisation de nouveaux antibiotiques dans un avenir prochain et que «toute personne intervenant dans la prescription d’antibiotiques doit contribuer au bon usage des antimicrobiens», ajoute-t-il.

Évaluation du bon usage des antibiotiques

Le bon usage des antimicrobiens repose sur deux piliers : l’audit prospectif de l’usage des antimicrobiens et les restrictions imposées par les listes de médicaments. Par exemple, à l’Hôpital Amphia aux Pays-Bas, où les antibiotiques sont déjà très peu utilisés, on évalue la prévalence des infections nosocomiales depuis 1990 et on consigne par écrit les antimicrobiens utilisés depuis 2001. Pour déterminer si l’usage des antimicrobiens était approprié, on a analysé les résultats de six études de prévalence distinctes regroupant 4105 patients, dont 938 étaient sous traitement antimicrobien. À l’aide d’un système de pointage conçu pour déterminer si le traitement était approprié, des chercheurs ont déterminé que 351 patients (37,4 %) recevaient un traitement inapproprié : dans 13 % des cas, le traitement était injustifiable; dans 15 % des cas, il était incorrect, et dans 10 % des cas, il avait été bien choisi, mais mal utilisé.

Il est ressorti d’analyses multivariées que «l’utilisation des quinolones était le seul facteur statistiquement significatif associé à l’usage inapproprié des antimicrobiens», fait remarquer le Dr Jan Kluytmans, professeur titulaire de microbiologie médicale et de lutte contre l’infection, Centre médical universitaire VU, Amsterdam. «Lorsque des patients en chirurgie orthopédique, en urologie ou en neurologie recevaient des quinolones, ce traitement était inapproprié dans plus de 75 % des cas.»

Le même hôpital a alors ciblé l’usage des quinolones à l’aide de diverses mesures, l’une des plus importantes étant l’éducation des prescripteurs au sein de l’établissement. Non seulement chacune des interventions successives a-t-elle donné lieu à une réduction significative de l’usage des quinolones dans l’hôpital, «mais nous avons également constaté une diminution de la résistance d’Escherichia coli, et je crois que c’est la preuve que nous pouvons atteindre nos objectifs, surtout dans le cas des quinolones», conclut le Dr Kluytmans.

Diminution de la résistance aux antibiotiques

La réduction au maximum du nombre d’antibiotiques utilisés en première intention fait partie des autres stratégies pratiques que les experts en infectiologie recommandent à titre de «sentinelles de l’antibiothérapie». Comme le souligne le Dr Lance Peterson, professeur titulaire de pathologie et de médecine, Northwestern University, Feinberg School of Medicine, Chicago, Illinois, si l’on remplace deux ou trois antimicrobiens par un agent à large spectre, on expose les bactéries à deux ou trois fois moins d’antibiotiques, ce qui diminue la pression de sélection et l’émergence résultante de souches résistantes. «On doit aussi réévaluer le traitement initial dès qu’on connaît les résultats des cultures, au plus tard le troisième jour de traitement, ajoute-t-il, et on doit traiter le moins longtemps possible pour obtenir le résultat recherché.»

Le Dr Peterson a aussi rappelé aux congressistes qu’à en juger par la littérature, les associations d’antibiotiques ne confèrent aucun avantage par rapport à la monothérapie, que l’on soit en présence d’un sepsis, d’une endocardite ou d’une neutropénie. «On doit envisager de nouveaux algorithmes d’antibiothérapie pour freiner la progression de la résistance aux antimicrobiens et voir les nouveaux agents comme un élément thérapeutique parmi d’autres dans la mise en application d’un programme de bon usage des antimicrobiens», conclut-il.

Programme de surveillance au Canada

Des études in vitro indiquent qu’une nouvelle glycylcycline, la tigécycline, est très active contre la quasi-totalité des genres et espèces bactériens, y compris les espèces résistantes, à l’exception de Pseudomonas aeruginosa.

Dans le cadre de l’essai T.E.S.T. (Tigecycline Evaluation Surveillance Trial), qui s’est déroulé au Canada entre 2004 et 2008, 25 centres participants ont recueilli 2578 isolats. Les résultats ont montré que la CMI<sub>90</sub> de cet agent (1 mg/L) était comparable à celle de l’imipénem (0,5 mg/L) et qu’elle était quatre à 64 fois meilleure que celles de l’association bêta-lactamine/inhibiteur de bêta-lactamases ou de la lévofloxacine à l’égard de toutes les entérobactéries testées. «La tigécycline, avec sa CMI<sub>90</sub> de 1 mg/L, a aussi montré une excellente activité in vitro contre les souches d’E. coli, de Klebsiella oxytoca et de K. pneumoniae productrices ou non de bêta-lactamases à spectre étendu», ajoutent les chercheurs. Ces derniers ont aussi observé une «grande activité» contre Staphylococcus aureus et S. pneumoniae, peu importe le phénotype testé.

La glycylcycline a aussi été associée à une CMI<sub>90</sub> très faible (0,5 mg/L) à l’égard de Haemophilus influenzae, et la présence de bêta-lactamases n’a exercé aucune influence. Des entérocoques résistants à la vancomycine étant présents dans un grand nombre de pays, il importe ici de souligner que, de tous les agents comparés, la tigécycline a affiché la plus faible CMI<sub>90</sub> à l’égard de toutes les souches d’Enterococcus faecium et d’E. faecalis, qu’elles aient été sensibles ou résistantes à la vancomycine.

Commentant les données de l’essai T.E.S.T., Jack Johnson, International Health Management Associates (IHMA) de Schaumburg, Illinois, qui a analysé tous les résultats des épreuves in vitro, précise que le résultat le plus important est l’activité du médicament contre les souches de S. aureus résistantes à la méthicilline (SARM). Le SARM n’est pas si répandu au Canada, mais «si jamais il se répand, un antibiotique comme la tigécycline serait une option réelle». Ce serait aussi le cas dans l’éventualité de souches du genre Acinetobacter résistantes aux carbapénems.

Données européennes parallèles

Selon d’autres données générées par le groupe IHMA à partir des isolats cliniques de 320 centres européens, la CMI<sub>90</sub> de la tigécycline à l’égard de toutes les entérobactéries testées (1 mg/L) était équivalente à celle de l’imipénem et huit à 64 fois meilleure que celles de l’association bêta-lactamine/inhibiteur de bêta-lactamases et de la lévofloxacine. Son activité contre les isolats cliniques européens concordait avec ce que l’on a observé dans le cadre de l’essai canadien T.E.S.T., ce qui n’est probablement pas étonnant. Là encore, son activité n’a pas été diminuée par le phénotype résistant à la méthicilline, par les souches de S. pneumoniae résistantes à la pénicilline ni par les souches de H. influenzae productrices de bêta-lactamases.

«In vitro, ce médicament est actif contre un grand nombre d’agents pathogènes résistants. Bien sûr, ce sont des données in vitro et non in vivo, mais elles montrent néanmoins que la tigécycline est un agent prometteur dans le traitement des infections graves causées par les agents pathogènes les plus répandus en milieu communautaire et hospitalier», affirme Robert Badal, IHMA.

Des éclosions de Clostridium difficile ont déjà été signalées au Canada, et il arrive que cet agent pathogène ne réponde pas aux agents traditionnels. À l’aide de 258 isolats européens, on a comparé la tigécycline aux agents souvent utilisés pour le traitement des infections à C. difficile, notamment la clindamycine, le méropénem, le métronidazole, les pénicillines et l’association pipéracilline/tazobactam. Les résultats ont révélé qu’elle avait la plus faible CMI<sub>90</sub> parmi les six agents testés (0,06/0,25 mg/dL). C’est donc dire que les médecins auraient une autre option si les agents traditionnels comme le métronidazole leur faisaient faux bond.

Du laboratoire à la clinique

La tigécycline a récemment été homologuée pour le traitement de la pneumonie d’origine communautaire (PC), en partie sur la foi de son excellente activité in vitro contre les agents pathogènes généralement en cause. Dans le cadre d’une évaluation mondiale de l’activité de la tigécycline contre les agents pathogènes responsables des infections respiratoires d’origine communautaire, plus de 9200 isolats cliniques ont été testés de 2006 à 2008.

Comme l’expliquent Douglas Biedenbach, JMI Laboratories, North Liberty, Iowa, et ses collaborateurs, 100 % des isolats de S. aureus sensibles à la méthicilline et de SARM se sont révélés sensibles à cet agent, et la CMI<sub>90</sub> était <u><</u>0,25 mg/L dans la quasi-totalité des cas. Tous les isolats de S. aureus testés dans le cadre de la même évaluation mondiale étaient aussi sensibles à cette glycylcycline à la valeur-seuil établie de <u><</u>0,5 mg/L. Cela dit, insistent les chercheurs, l’activité in vitro d’un agent n’est pas nécessairement représentative de son activité clinique. Des données à l’appui de l’efficacité clinique de la tigécycline revêtent donc une importance capitale.

Selon une analyse groupée de huit essais cliniques de phase III portant sur des patients chez qui on a diagnostiqué une bactériémie secondaire à une infection intra-abdominale compliquée, à une infection de la peau et des tissus mous compliquée ou à une PC, 76,6 % des patients sous tigécycline ont bénéficié d’une guérison clinique vs 77,1 % des témoins recevant un agent de comparaison. Les effets indésirables digestifs étaient plus fréquents dans le groupe tigécycline, alors que la toux et les phlébites étaient plus fréquentes dans le groupe témoin.

«Quels que soient le foyer infectieux ou l’agent pathogène en cause, l’efficacité clinique de la tigécycline s’apparentait à celle des agents de comparaison, et aucune différence n’a été mise en évidence quant aux taux d’échecs en présence de souches sensibles selon les critères par rapport aux CMI de définies par la FDA», concluent les chercheurs.

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