Comptes rendus

Lutte contre la prévalence croissante des pneumonies nosocomiales et communautaires
Développements dans le diagnostic et le traitement du rhumatisme psoriasique

Maladie de Crohn complexe : maintien de la réponse à long terme

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Conférence de 2008 sur les progrès réalisés dans les maladies inflammatoires de l’intestin

Hollywood, Floride / 4-7 décembre 2008

La corticothérapie peut conduire à une rémission complète, mais cette dernière est souvent de courte durée, puisque après un an, seulement le tiers des patients environ répondent toujours au traitement, déclare le Dr Bruce Sands, professeur agrégé de médecine, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts. Au surplus, dans une cohorte parisienne de sujets atteints de la maladie de Crohn (MC), la nécessité de recourir à la chirurgie n’a pas évolué pendant le traitement immunomodulateur.

Plus on fait appel rapidement aux inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale alpha (anti-TNF), plus on a de chances d’obtenir une réponse favorable, et les médecins en sont de plus en plus conscients. On l’a d’ailleurs démontré dans l’étude CHARM (Crohn’s Trial of the Fully Human Antibody Adalimumab for Remission Maintenance); en effet, le taux de rémission selon l’indice d’activité de la maladie de Crohn (CDAI, pour Crohn’s Disease Activity Index) a dépassé 50 % chez les sujets sous anti-TNF malades depuis moins de deux ans, mais n’a atteint que 33 % environ chez les sujets malades depuis cinq ans ou plus. «La précocité du traitement influe grandement sur le résultat clinique», confirme le Dr Sands.

Le même rapport s’est dégagé de l’essai PRECiSE (Pegylated Antibody Fragment Evaluation in Crohn’s Disease: Safety and Efficacy) 2 : 68 % des patients traités par le certolizumab pegol et malades depuis moins de un an étaient parvenus à une rémission selon le CDAI à la 26e semaine, contre environ 45 % seulement des patients malades depuis cinq ans ou plus. Fait important à souligner, dans l’étude sur la stratégie de puissance progressive vs dégressive (Step-Up vs. Top-Down), 61 % des patients atteints de la MC et soumis sans délai à un traitement biologique énergique étaient en rémission sans corticothérapie à six mois, comparativement à 41 % des patients soumis au traitement habituel.

Même si l’écart était moindre après 12 mois, il reste que 73 % des sujets soumis à la stratégie de puissance dégressive étaient toujours en rémission endoscopique complète à deux ans, par rapport à 30 % seulement des sujets sous traitement classique. «La stratégie dégressive a, semble-t-il, un énorme effet différé sur la cicatrisation de la muqueuse», fait observer le Dr Sands.

Jusqu’ici, on a hésité à recourir d’emblée aux anti-TNF par crainte de leurs effets indésirables. À cet égard, les données d’innocuité du registre TREAT (Crohn’s Therapy Resource, Evaluation and Assessment Tool) sont rassurantes. Elles indiquent, en effet, que les glucocorticoïdes et les analgésiques narcotiques sont beaucoup plus susceptibles d’entraîner des infections graves que l’infliximab, souligne le Dr Sands.

Maladie de Crohn réfractaire

Chez une proportion appréciable des patients qui répondent initialement au traitement, on doit augmenter la dose d’infliximab ou d’adalimumab, rappelle le Dr Stephen Hanauer, professeur titulaire de médecine et de pharmacologie clinique, University of Chicago Medical Center, Illinois. Ainsi, dans l’étude ACCENT (A Crohn’s Disease Clinical Trial Evaluating Infliximab in a New Long-Term Treatment Regimen) I, on a dû, afin de maintenir la réponse, porter la dose d’infliximab à 10 mg/kg chez environ 25 % des sujets traités initialement par une dose de 5 mg/kg. On assiste au même phénomène avec l’adalimumab, dont la dose doit être augmentée chez 50 % des patients, ajoute le Dr Hanauer.

La perte de la réponse à l’anti-TNF peut procéder d’une absence d’activité inflammatoire sous-jacente ou encore de la présence d’une sténose ou d’une fistule. Qui plus est, la formation d’anticorps anti-TNF est assez fréquente. Toutefois, enchaîne le Dr Hanauer, «un patient immunisé contre un anti-TNF peut fort bien répondre à un autre anti-TNF, alors il suffit de changer de traitement».

Étude WELCOME

Contrairement à l’infliximab et à l’adalimumab, le certolizumab pegol est dépourvu de fragment cristallisable (Fc) et, par le fait même, n’active pas le complément et ne provoque ni cytotoxicité à médiation cellulaire dépendante des anticorps ni apoptose in vitro.

Le Dr Hanauer a évoqué WELCOME (Vermeire et al.), essai ouvert de 26 semaines sur le bénéfice clinique et la tolérabilité du certolizumab pegol en traitement d’induction et d’entretien chez des patients atteints de la MC et ne réagissant plus à l’infliximab ou ne le tolérant plus. Au total, 539 sujets admis à la phase d’induction, menée en mode ouvert, ont reçu une injection de 400 mg de certolizumab pegol par voie sous-cutanée (s.-c.) lors des semaines 0, 2 et 4.

Le paramètre principal était la réponse clinique (diminution d’au moins 100 points du CDAI à la sixième semaine) ou la rémission (diminution d’au moins 150 points du CDAI). La sixième semaine, 62,2 % des sujets de l’analyse en intention de traiter avaient répondu au traitement et près de 40 % étaient en rémission. On a observé une réponse clinique ou une rémission dès la deuxième semaine chez 33,4 % et 18 % des sujets, respectivement, ce qui laisse supposer que la majorité des patients ne réagissant plus à l’infliximab répondront assez rapidement au nouvel anti-TNF sans fragment Fc.

Les résultats des études PRECiSE corroborés

Lors d’une prolongation inscrite dans le programme PRECiSE, soit l’étude PRECiSE 4, on a réuni des sujets qui ne répondaient plus au traitement actif. «Au lieu de porter la dose à 400 mg toutes les deux semaines, nous avons été autorisés à administrer une seule injection supplémentaire, pour ensuite continuer le suivi des patients dans le cadre du même essai», explique le Dr Hanauer. Grâce à cette seule dose supplémentaire de 400 mg s.-c. du nouvel anti-TNF, «la réponse a été restaurée et s’est maintenue jusqu’au terme de l’étude chez environ la moitié des sujets, ce qui signifie que la réponse au traitement d’entretien par le certolizumab pegol peut parfois être rétablie de façon durable au moyen d’une seule injection supplémentaire», note le médecin.

Présence de fistules

Dans un exposé distinct, le Dr Hanauer a présenté les résultats d’analyses exploratoires des données de PRECiSE 2 ayant trait uniquement aux sujets porteurs d’une fistule au début de l’étude. Précisons que ces derniers avaient tous répondu au traitement actif pendant la phase ouverte de l’étude, puis avaient, après randomisation, poursuivi le traitement actif ou reçu un placebo. Chez les patients porteurs d’une fistule en début d’étude, la réponse correspondait à une fermeture d’au moins 50 % de la fistule lors de deux visites consécutives ou à une fermeture complète à la 26e semaine. Cinquante-huit sujets ayant répondu à la perfusion initiale du nouvel anti-TNF ont été répartis de façon aléatoire, 30 dans le groupe placebo et 28 dans le groupe anti-TNF.

Au total, 53,6 % des sujets sous traitement d’entretien actif ont obtenu une réponse (fermeture d’au moins 50 % de la fistule lors de deux visites consécutives), contre 43,3 % des témoins sous placebo. En outre, la proportion de patients ayant conservé ce degré de fermeture à la 26e semaine était beaucoup plus élevée dans le groupe sous traitement actif que dans le groupe placebo, soit 73,3 % vs 38,5 %. À 26 semaines, la fistule était complètement refermée chez 66,7 % des patients sous traitement actif, comparativement à 30,8 % des patients sous placebo.

De même, les taux de réponse et de rémission à 26 semaines, déterminés par le CDAI, étaient beaucoup plus élevés dans le groupe anti-TNF que dans le groupe placebo, soit 71,4 % contre 33,3 % pour la réponse, et 53,6 % contre 20 % pour la rémission. En outre, la variation moyenne du score IBDQ (Inflammatory Bowel Disease Questionnaire) entre le début de l’étude et la 26e semaine était nettement plus grande chez les sujets sous traitement actif, soit 36,7 points, que chez les témoins sous placebo, soit 20,7 points, ce qui témoigne d’une amélioration de la qualité de vie dans le groupe anti-TNF sans fragment Fc. Enfin, l’efficacité et la tolérabilité de ce nouvel agent semblent durables.

Comme l’ont souligné Sandborn et ses collègues, 141 patients traités par le certolizumab pegol dans l’étude PRECiSE 2 sont passés à l’étude PRECiSE 3, et 73 % d’entre eux étaient en rémission au début de l’étude. Après 12, 18, 24 et 30 mois de traitement ininterrompu, les taux de rémission atteignaient respectivement 62,4 %, 55,3 %, 49,6 % et 39,7 %. Le pourcentage de sujets soumis aux évaluations et parvenus à la rémission est demeuré stable tout au long de l’étude : 74,1 % au tout début de PRECiSE 3, 73,3 % après 12 mois, 81,3 % après 18 mois et 77,8 % après 30 mois.

Les sujets ont bien toléré le médicament, annoncent les auteurs, aucune douleur au point d’injection ni nouvel effet indésirable n’ayant été signalé au cours des 30 mois de traitement.

Les auteurs d’une seconde étude sur l’innocuité à long terme de ce même anti-TNF, qui réunit celle-là 2166 patients exposés au médicament pendant une période atteignant 3,5 ans, rapportent sept cas de tumeur solide; cependant, aucun lymphome n’avait été signalé en juillet 2007.

Des infections opportunistes autres que la tuberculose ont été signalées chez trois patients. Bref, il semble qu’aucun effet indésirable inattendu ne se soit encore manifesté pendant le traitement au long cours par ce nouvel anti-TNF exempt de fragment Fc.

Nota : Au moment de la mise sous presse, le certolizumab pegol n’était pas commercialisé au Canada.

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