Comptes rendus

Évaluation du risque, prise en charge de l’ischémie, prévention des hémorragies, protection à long terme : les piliers du traitement des SCA
Sclérose en plaques : regard sur les résultats des études récentes

Mise en contexte des IECA et des ARA : données sur l’importance relative du système rénine-angiotensine

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Congrès canadien sur la santé cardiovasculaire 2007

Québec, Québec / 20-24 octobre 2007

Deux essais à très grande échelle, probablement déterminants pour l’orientation de la prise en charge du risque, se termineront bientôt. Le premier, qui comporte deux volets, s’intitule ONTARGET/TRANSCEND (Ongoing Telmisartan Alone and in Combination with Ramipril Global Endpoint Trial et Telmisartan Randomized Assessment Study in ACE Intolerant Subjects with Cardiovascular Disease) et regroupe plus de 31 000 patients répartis dans 40 pays. Le volet ONTARGET (N=25 620) vise à déterminer si, de trois options – le telmisartan, un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine (ARA); le ramipril, un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA); et ces deux agents en association – l’une est supérieure à l’autre pour la prévention d’événements cardiovasculaires (CV) chez des patients à risque élevé non hypertendus. Le deuxième essai, dont la portée s’annonce tout aussi considérable, cette fois dans la prévention des AVC, s’intitule PRoFESS (Prevention Regimen for Effectively Avoiding Second Strokes). Suivant un plan factoriel 2 x 2, plus de 20 000 sujets ont été randomisés de façon à recevoir l’un de deux traitements antiplaquettaires en concomitance avec le telmisartan ou un placebo. Les deux essais arrivent à échéance dans quelques mois.

«Beaucoup de résultats insolites se dégagent des essais randomisés, et c’est pourquoi nous devons faire ce type de comparaisons directes avant de tirer des conclusions», commente le Dr Marc A. Pfeffer, Brigham and Women’s Hospital, Harvard Medical School, Boston, Massachusetts.

Étant donné que les ARA et les IECA bloquent tous deux le système rénine-angiotensine (SRA), on leur a généralement supposé des effets très similaires, voire identiques. Selon diverses données présentées par le Dr Pfeffer, ce serait une erreur et les résultats de ONTARGET seraient difficiles à prévoir. Dans les essais indépendants, les ARA et les IECA ne se sont pas révélés interchangeables pour des paramètres tels que le risque d’infarctus du myocarde (IM) et d’AVC, et on a de bonnes raisons de croire qu’une association de ces deux types d’agents serait supérieure à l’un ou l’autre utilisé seul.

Évaluation du bénéfice sans égard à la baisse tensionnelle

Si, dans le volet TRANSCEND, les patients intolérants aux IECA sont randomisés dans un groupe telmisartan ou placebo, la population de l’essai ONTARGET est quant à elle semblable à celle de l’essai HOPE (Heart Outcomes Protection Evaluation) mené antérieurement (N Engl J Med 2000;342:145-53). Dans l’essai HOPE, le ramipril à 10 mg a réduit de 22 % (p<0,001) l’incidence des événements CV majeurs chez des patients à risque élevé sans insuffisance cardiaque (IC), et ce, malgré de très modestes réductions de la tension artérielle (TA). ONTARGET – le plus vaste essai clinique comportant un ARA jamais réalisé – porte sur une population similaire qui a été randomisée en vue de recevoir le telmisartan à 80 mg, le ramipril à 10 mg, ou ces deux agents en association. À l’admission, les patients ne présentaient pas d’hypertension (ou avaient une hypertension maîtrisée), de sorte que les bénéfices associés à ces divers schémas devraient être indépendants de la réduction de la TA. Le paramètre d’évaluation principal regroupe les AVC, les IM, la mortalité d’origine CV et les hospitalisations pour IC. Les paramètres secondaires comprennent l’incidence des événements suivants : IC, gestes de revascularisation, apparition d’un diabète, néphropathie, apparition d’une fibrillation auriculaire et hypertrophie ventriculaire gauche.

«Cela va nous permettre de cerner beaucoup mieux la force respective de ces stratégies d’inhibition du SRA», soutient le Dr Pfeffer en faisant remarquer que les ARA et les IECA entravent les effets de la stimulation du SRA par des mécanismes distincts. Plus précisément, les IECA bloquent l’une des enzymes responsables de la production d’angiotensine II, alors que les ARA bloquent l’angiotensine II au niveau de ses récepteurs, réalisant probablement ainsi une inhibition plus complète de l’angiotensine, en particulier au niveau des récepteurs des tissus cibles. De plus, le blocage du récepteur AT1 accroît la quantité d’angiotensine II disponible pour stimuler les récepteurs AT2, qui sont associés à une activité antiproliférative.

La perception de l’étude ONTARGET – à savoir, la comparaison d’un ARA et d’un IECA – n’est peut-être pas appropriée. Dans les essais d’envergure comme HOPE, le ramipril est le seul IECA que l’on a évalué quant au bénéfice apporté sans égard à la réduction de la TA chez des patients à risque élevé. Le telmisartan, en revanche, possède des caractéristiques qui le distinguent des autres ARA. Ainsi, sa demi-vie, qui est de 24 heures, est au moins deux fois plus longue que celles du valsartan et du candésartan, différence potentiellement importante sur le plan de la constance de la protection conférée entre chaque prise. Le telmisartan semble en outre améliorer le métabolisme glucidique et lipidique grâce à l’activité qu’il exerce sur des récepteurs nucléaires et que ne possèdent pas les autres ARA. Plusieurs comparaisons monocentriques documentent l’amélioration plus marquée du métabolisme glucidique associée au telmisartan par rapport aux autres ARA. Il est donc probable que l’applicabilité des résultats de l’essai ONTARGET aux autres ARA soit controversée.

Le même problème pourrait se poser pour l’interprétation des résultats de l’étude PRoFESS, dans laquelle sont comparées des stratégies de prévention secondaire des AVC. Suivant un plan factoriel 2 x 2, les sujets ont été randomisés de façon à recevoir du dipyridamole à libération prolongée plus AAS ou du clopidogrel, en association avec du telmisartan ou un placebo. Il s’agit de la plus vaste étude jamais réalisée sur la prévention secondaire des AVC, chaque combinaison de traitement étant évaluée chez quelque 5000 patients (N=20 233). Par le passé, tant l’association dipyridamole plus AAS que le clopidogrel se sont montrés plus efficaces que l’AAS seul pour prévenir les AVC, mais c’est la première fois que ces stratégies sont comparées directement. Quant aux ARA, ils se sont révélés supérieurs aux autres antihypertenseurs, tels les inhibiteurs calciques, dans la prévention secondaire des AVC. Cela dit, la longue demi-vie du telmisartan est un atout particulièrement intéressant pour prévenir la forte augmentation de l’incidence des AVC associée à la hausse matinale de la TA.

«Le paramètre principal de PRoFESS est la prévention d’un nouvel AVC. Les paramètres secondaires comprennent d’autres événements vasculaires, tels que l’IM et l’apparition ou l’aggravation d’une IC», indique le Dr Philip Teal, professeur titulaire de neurologie, British Columbia Centre for Stroke and Cerebrovascular Diseases, Vancouver. L’effet protecteur contre l’apparition d’un diabète, que l’on a antérieurement associé aux ARA, sera également examiné, précise-t-il.

Importance de la détection précoce de la protéinurie

L’utilité d’un agent à action prolongée tel que le telmisartan pour prévenir les complications dans n’importe quel lit vasculaire renforce la preuve d’une interdépendance. Analysant ce phénomène, le Dr George L. Bakris, directeur, Hypertensive Diseases Center, University of Chicago, Illinois, a indiqué, données à l’appui, que la protéinurie est un prédicteur très puissant du risque d’AVC et d’événements CV chez les diabétiques et que la néphropathie chronique majore la morbimortalité CV, même en l’absence de diabète. Il est dès lors important, souligne le Dr Bakris, de surveiller la fonction rénale chez les sujets hypertendus afin de détecter précocement une éventuelle protéinurie et, le cas échéant, d’instaurer un traitement apte à contrecarrer ce risque. Une série d’études menées sur les ARA chez des diabétiques de type 2 démontrent que la réduction de la protéinurie à six mois est un bon prédicteur du pronostic CV et rénal.

«La néphropathie est un tueur silencieux. Il est classique de ne pas observer de signes cliniques jusqu’à ce que plus de 70 % de la fonction rénale soit perdue. Pourtant, une perte de 50 % double le risque d’événement CV par rapport à la population générale», fait valoir le Dr Bakris. Selon ce dernier, l’importance de reconnaître précocement l’atteinte rénale, notamment par la recherche des signes de microalbuminurie, recueille maintenant un consensus de plus en plus large, les faits montrant hors de tout doute qu’il est de loin plus efficace de préserver la fonction rénale que de traiter la néphropathie et de prévenir les complications CV.

Prise en considération d’autres sous-fractions lipidiques

Les recherches sur les autres facteurs de risque, comme l’hypercholestérolémie, connaissent aussi une évolution rapide. Selon le Dr Lawrence A. Leiter, chef, division de l’endocrinologie et du métabolisme, St. Michael’s Hospital, Toronto, Ontario, on tente de consolider la réduction du risque associée à la baisse du C-LDL en s’intéressant notamment à d’autres sous-fractions lipidiques. Bien qu’on n’ait pu démontrer l’effet protecteur du torcétrapib, un agent qui augmente le taux de C-HDL, et que ce résultat soit décevant, le Dr Leiter ne croit pas que cet échec réfute l’hypothèse selon laquelle il est bénéfique d’augmenter le C-HDL. Diverses stratégies d’augmentation sont d’ailleurs à l’étude et des données seront disponibles sous peu.

Résumé

Bien que le traitement optimal des patients exposés à un risque CV soit en constante évolution, les cliniciens pourront compter sur une manne de nouvelles informations à bref délai. Les études ONTARGET et PRoFESS devraient avoir des retombées immédiates sur la médecine factuelle pratiquée chez les patients à risque élevé, pour la première, et la prévention secondaire des AVC, pour la seconde, tandis que d’autres innovations en néphrologie et en lipidologie semblent également imminentes. Tous ces développements promettent une évolution des normes de soins.

D’après la séance approuvée par la SCC et le CCSC figurant ci-dessous :

« Maximiser les bienfaits des stratégies de prévention de la maladie cardiovasculaire », samedi 20 octobre, 18 h à 21 h, salle 200C, 2e étage.

Dans le cadre du programme de Maintien du certificat du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada, ce symposium est une activité de formation collective agréée admissible à la section 1 des options de la charpente des activités de développement professionnel continu, et la participation à ce symposium donne droit à des unités de formation.

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