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Dépistage pharmacogénétique de l’hypersensibilité : vers une médecine personnalisée

Modalités d’emploi novatrices des antirétroviraux de base

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 4e Congrès de l’International AIDS Society sur la pathogenèse, le traitement et la prévention de l’infection à VIH

Sydney, Australie / 22-25 juillet 2007

L’étude la plus longue réalisée jusqu’à maintenant sur l’association du fosamprénavir (FPV) (1400 mg 1 f.p.j.) au ritonavir faiblement dosé (100 mg 1 f.p.j.) (FPV/r) chez des patients atteints du VIH / SIDA sans passé antirétroviral a permis de démontrer l’efficacité et l’innocuité à long terme de ce traitement. Comme l’affirment les auteurs, le ritonavir faiblement dosé augmente la concentration plasmatique du FPV pris en concomitance et l’exposition plasmatique à cet agent, puisqu’il inhibe le métabolisme du composé actif, l’amprénavir (APV), par l’isoenzyme CYP3A4, diminuant du coup la clairance de l’APV, prolongeant sa demi-vie d’élimination et intensifiant son activité antirétrovirale. Par contre, la potentialisation par le ritonavir peut donner lieu à des effets indésirables gastro-intestinaux et à des altérations lipidiques.

Optimisation des schémas de potentialisation

La prémisse de l’étude était la suivante : comme l’incidence des manifestations indésirables et des élévations lipidiques associées au ritonavir est fonction de la dose, on devrait pouvoir optimiser la tolérabilité du traitement à base de FPV potentialisé en prescrivant la dose de ritonavir la plus faible possible, qui assurera néanmoins une suppression virologique soutenue et une hausse du nombre de cellules CD4+. Les patients ont donc reçu l’association FPV/r à 1400/100 mg 1 f.p.j. pendant une période médiane de 2,4 ans; certains sujets ont été traités pendant plus de trois ans. À ce jour, ce schéma n’a jamais été soumis à une évaluation de plus de 48 semaines dans le cadre d’une étude.

Une analyse rétrospective de bases de données a été réalisée aux États-Unis, dans deux cliniques de traitement de l’infection à VIH. Les chercheurs souhaitaient connaître la réponse obtenue chez des porteurs du VIH sans passé antirétroviral qui ont entrepris, entre janvier 2004 et janvier 2006, un traitement FPV/ritonavir faiblement dosé qu’ils ont poursuivi pendant au moins six mois. Au début de l’étude, les patients devaient avoir une charge virale (CV) ³1000 copies/mL et être exempts d’infections, de complications ou de cancer liés au SIDA; aucune restriction n’était imposée quant au nombre de cellules CD4+. Les résultats présentés portaient sur 20 patients des deux sexes et de races diverses (âge médian : 48 ans, valeurs extrêmes : 27 et 65; race autre que blanche : 50 %; femmes : 25 %; durée médiane de la séropositivité à VIH : 5,3 ans; nombre médian de cellules CD4+ : 327 cellules/mm3).

Tous les patients ont obtenu et maintenu une CV <50 copies/mL. Un pourcentage plus élevé de sujets présentaient une CV <50 copies/mL après sept à neuf mois (85 %) qu’après quatre à six mois (40 %). Par rapport à la valeur de départ, les cellules CD4+ se sont accrues d’un nombre médian de 181 cellules/mm3 après 2,4 ans et de 250 cellules/mm3 après trois ans. Au chapitre du bilan lipidique à jeun, les taux médians ont varié comme suit par rapport aux valeurs de départ : hausse modérée des triglycérides (de 1,37 à 1,80 mmol/L), légère augmentation du cholestérol total (CT) (de 4,20 à 4,58 mmol/L) ainsi que du C-HDL (de 0,78 à 0,96 mmol/L) et légère baisse du C-LDL (de 2,56 à 2,48 mmol/L).

Le traitement a généralement été bien toléré, la plupart des effets indésirables ayant été légers et spontanément résolutifs : diarrhée (30 %, grade 1), nausées (20 %, grade 1) et vomissements (10 %, grades 1-2). On n’a déploré aucun échec virologique ni abandon pour cause d’effets indésirables.

La réponse à long terme constatée lors de cet examen rétrospectif de dossiers médicaux corrobore, selon les auteurs, les données sur l’efficacité clinique des schémas à base de FPV/r à 1400/100 mg 1 f.p.j. obtenues après 48 semaines. Les taux de CT et de triglycérides à jeun ont augmenté, certes, mais sont généralement demeurés dans les plages normales et sous les points limites du NCEP (National Cholesterol Education Program) chez la plupart des sujets, font remarquer les chercheurs. Ils ajoutent que la hausse du C-HDL, associée à une baisse du risque cardiovasculaire, a été observée dans d’autres études sur les schémas à base de FPV/r à 1400/100 mg 1 f.p.j. Comme l’explique le Dr Gary Blick, auteur principal, chef médical et directeur de recherche, Circle Medical, Norwalk, Connecticut, les patients jamais traités au préalable pourraient commencer à prendre du FPV à 1400 mg potentialisé par le ritonavir à 100 mg seulement. «Le patient a dès lors moins de comprimés à prendre, devrait éprouver moins d’effets indésirables et maintenir un bilan lipidique plus avantageux, a-t-il affirmé. Chez tous les sujets, précise-t-il, la CV a été ramenée à un niveau indécelable et s’est maintenue à <400 copies/mL pendant une durée médiane de 2,3 ans. De plus, les lymphocytes T ont affiché une progression digne de mention.» Bien que l’observance n’ait pas été évaluée, il y a lieu de croire que les patients ont fait preuve de discipline, puisque leur CV est descendue sous un seuil indécelable, souligne le Dr Blick.

Masse adipeuse et densité minérale osseuse

D’autres données sur l’efficacité de la nouvelle dose potentialisatrice ont été présentées aux congressistes. Celles-ci provenaient d’une étude relative aux effets des deux doses sur la composition corporelle.

Le ritonavir a été associé à certaines anomalies métaboliques, notamment des dyslipidémies et des troubles du métabolisme du glucose. Les auteurs de l’étude font toutefois remarquer qu’on a peu étudié jusqu’à maintenant l’effet de doses plus faibles sur la composition corporelle.

Lors de cet essai ouvert avec randomisation de 96 semaines, les chercheurs ont évalué, grâce à l’absorptiométrie biénergétique aux rayons X (DEXA) du corps entier, les effets de l’administration de FPV en association avec du ritonavir à 200 mg vs à 100 mg 1 f.p.j. sur la masse adipeuse et la densité minérale osseuse (DMO) chez 115 hommes et femmes sans passé antirétroviral. Les résultats présentés portaient sur 48 semaines.

Après randomisation, les participants ont reçu du FPV à 1400 mg 1 f.p.j. et du ritonavir à 100 mg (FPV/r100) vs du ritonavir à 200 mg (FPV/r200). Tous ont également pris une association abacavir à 600 mg/lamivudine à 300 mg (ABC/3TC) à doses fixes 1 f.p.j. En raison d’une hypersensibilité présumée à l’ABC, sept patients sont passés à l’association zidovudine/3TC. On a réalisé une DEXA du corps entier lors de l’admission à l’essai, puis après 48 semaines chez 48 patients. Les altérations de la masse adipeuse étaient considérées comme cliniquement pertinentes (éventuellement néfastes) en cas de déperdition adipeuse >20 % dans les membres et/ou de gain adipeux >20 % dans le tronc. On a comparé les groupes quant à la proportion de patients qui présentaient une déperdition adipeuse combinée >20 % dans les bras, une déperdition adipeuse combinée >20 % dans les jambes ou un gain adipeux >20 % dans le tronc.

«Nous avons constaté avec satisfaction que la dose potentialisatrice de 100 mg semblait au moins aussi efficace que la dose de 200 mg», d’annoncer l’un des coauteurs de l’étude, le Dr Charles Hicks, professeur agrégé de médecine, division des maladies infectieuses, Duke University Medical Center, Durham, Caroline du Nord. «Sur le plan virologique, le ritonavir faiblement dosé a amené des résultats un peu plus avantageux», souligne le médecin. En effet, on a mesuré une CV <400 copies/mL chez 84 % des sujets sous ritonavir à 100 mg par rapport à 67 % des sujets sous ritonavir à 200 mg (analyse en intention de traiter, patient manquant équivalant à un échec). Par ailleurs, 79 % des patients présentaient une CV <50 copies/mL dans le groupe ritonavir à 100 mg comparativement à 63 % dans le groupe ritonavir à 200 mg.

Discipline thérapeutique et bilan lipidique

«Au début, nous redoutions que la dose de 100 mg n’ait pas l’effet potentialisateur souhaité, mais il semble que nos craintes n’étaient pas fondées, commente le Dr Hicks. Nous avons constaté avec étonnement que la dose la plus faible donnait de meilleurs résultats. En y regardant de plus près, nous avons conclu que les patients traités par la faible dose observaient sans doute mieux leur traitement.»

Le Dr Hicks fait remarquer que dans les données des 48 premières semaines, il est difficile de percevoir une différence entre les deux doses de ritonavir au chapitre du bilan lipidique et de la masse adipeuse. Au total, 88 patients ont subi une DEXA de départ, puis une autre après 48 semaines. Les résultats correspondent aux variations par rapport à la valeur de départ dans les groupes FPV/r100 (n=44) vs FPV/r200 (n=44). Les variations adipeuses médianes (g) sont les suivantes : +7,0 % vs +7,2 % dans les membres supérieurs (p=0,86), +3,1 % vs +9,9 % dans les membres inférieurs (p=0,37) et +6,3 % vs +7,0 % dans le tronc (p=0,80). Quant à la variation médiane de la DMO du corps entier (g/cm2), elle s’est établie à -0,60 % vs -0,95 % (p=0,09). On a observé des variations cliniquement pertinentes de la masse adipeuse dans les membres supérieurs, les membres inférieurs et le tronc chez 11 % vs 16 %, 9 % vs 14 % et 18 % vs 32 % des patients, respectivement.

La variation des taux de glucose et d’insuline, négligeable, est comparable d’un groupe à l’autre. Le ratio CT/C-HDL médian a diminué de 0,25 dans les deux groupes. Le taux médian des triglycérides à jeun est passé d’environ 1,35 à 1,92 mmol/L dans le groupe ritonavir à 100 mg et d’environ 1,35 à 1,69 mmol/L dans le groupe ritonavir à 200 mg. Les auteurs ont conclu que les amas graisseux médians dans les membres et le tronc avaient augmenté dans des proportions semblables, que le FPV ait été associé au ritonavir à 100 mg ou à 200 mg. Les variations adipeuses pertinentes sur le plan clinique ont été moins fréquentes dans le groupe FPV/r100. Dans les deux groupes, les variations totales de la DMO étaient faibles, sans écart significatif. Cependant, après 48 semaines, l’association FPV/r100 s’était montrée plus efficace.

«Selon moi, les constatations sur le cholestérol et les triglycérides sont valables, parce que ces changements interviennent habituellement en six mois environ; si la différence entre les deux doses était significative, nous le saurions déjà, avance le Dr Hicks. Par contre, ajoute-t-il, la morphologie corporelle met souvent plus de temps à se modifier, parfois jusqu’à deux ans.» La faible dose de ritonavir pourrait atténuer les problèmes adipeux et lipidiques, mais on devra attendre les résultats finaux de l’étude, après 96 semaines, pour confirmer cette hypothèse, de conclure le Dr Hicks.

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