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ONTARGET : résultats encourageants pour les patients à risque élevé d’événement cardiovasculaire

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Les 57es Séances scientifiques annuelles de l’American College of Cardiology

Chicago, Illinois / 29 mars-1er avril 2008

L’étude ONTARGET (Ongoing Telmisartan Alone and in Combination with Ramipril Global Endpoint Trial) était fondée sur deux grandes hypothèses. La première – qui s’est vérifiée – voulait que le telmisartan, antagoniste des récepteurs de l’angiotensine (ARA), administré à raison de 80 mg une fois par jour soit aussi efficace que le ramipril administré à raison de 10 mg une fois par jour selon le paramètre mixte regroupant la mortalité d’origine cardiovasculaire (CV), l’infarctus du myocarde (IM), l’accident vasculaire cérébral (AVC) ou l’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. Après un suivi d’une durée médiane de 56 mois, la proportion de patients ayant été victimes de l’un ou l’autre événement était numériquement et statistiquement presque identique dans les deux groupes (16,5 % vs 16,7 %) (intervalle de confiance [IC] à 95 %, 0,94-1,09; p=0,8). La seconde hypothèse voulait que l’association de cet ARA et de cet inhibiteur de l’ECA soit supérieure au ramipril seul selon le même paramètre mixte. Cette hypothèse n’a pas été corroborée; dans les faits, la proportion de patients ayant subi l’un des événements primaires était essentiellement la même dans le groupe qui recevait le traitement d’association (16,3 %) que dans les deux autres groupes, qui recevaient du telmisartan ou du ramipril en monothérapie (IC à 95 %, 0,92-1,07; p=0,8), mais le taux d’effets indésirables était plus élevé dans le premier groupe. Il n’en reste pas moins que l’équivalence du telmisartan et du ramipril fait date.

«De nombreux omnipraticiens qui ont participé à l’étude estiment qu’il s’agit là d’un résultat important parce qu’il les rassure quant à leur utilisation du telmisartan», souligne l’investigateur principal de l’étude ONTARGET, le Dr Salim Yusuf, Population Health Research Institute, McMaster University, Hamilton, Ontario. Chez les patients hypertendus en particulier, fait remarquer le Dr Yusuf, les médecins «préféreraient commencer par le telmisartan [plutôt que par un inhibiteur de l’ECA] parce qu’il abaisse la tension artérielle [TA] de façon plus marquée et qu’il est mieux toléré».

Lors de cette étude, 25 620 patients âgés de 55 ans ou plus qui souffraient d’une maladie coronarienne, vasculaire périphérique ou vasculaire cérébrale ou de diabète avec atteinte des organes cibles ont été randomisés dans l’un des trois groupes suivants : telmisartan à 80 mg une fois par jour (n=8542), ramipril à 10 mg une fois par jour (n=8576) ou association du telmisartan et du ramipril aux mêmes posologies (n=8502). Au départ, 85 % des sujets souffraient d’une maladie CV, 69 % étaient hypertendus et 38 % étaient diabétiques. Les options de traitement à l’étude étaient évaluées au sein d’une population bénéficiant déjà d’un traitement énergique. Plus de 60 % des sujets recevaient une statine; plus de 80 % recevaient un antiplaquettaire; plus de 50 % recevaient un bêta-bloquant; et près de 30 % recevaient un diurétique. Cette population – dont l’âge moyen était de 66,5 ans – était composée de femmes à 27 %. Parmi les plus de 25 000 sujets de l’étude ONTARGET répartis dans 40 pays, environ 5000 ont été recrutés par plus de 70 investigateurs du Canada.

Les taux d’événements primaires ont été presque identiques dans les trois groupes de traitement, mais le telmisartan a été associé à des taux plus faibles de toux (1,1 % vs 4,2 %; p<0,001) et d’angio-œdème (0,1% vs 0,3 %; p=0,01) que le ramipril. Les symptômes d’hypotension ont été plus fréquents chez les sujets sous telmisartan que chez les sujets sous ramipril (2,6 % vs 1,7 %; p<0,001), mais le taux de syncope, peut-être la plus incommodante des manifestations de l’hypotension, était identique dans les deux groupes (2,0 %).

L’étude ONTARGET a enfin répondu à la question que l’on se posait : un ARA peut-il être aussi avantageux que le ramipril l’avait été dans l’étude phare HOPE (Heart Outcomes Protection Evaluation)? Lors de l’étude HOPE, en effet, cet inhibiteur de l’ECA avait autorisé une diminution de la mortalité CV indépendamment de la baisse des chiffres tensionnels du fait de sa capacité à inhiber le système rénine-angiotensine (SRA). La population de l’étude ONTARGET s’apparentait à celle de HOPE, et les chercheurs ont opté pour le telmisartan précisément pour déterminer si un autre mécanisme d’inhibition du SRA pouvait donner lieu aux mêmes bénéfices qu’un inhibiteur de l’ECA. Cet agent était considéré comme un comparateur idéal en raison de sa demi-vie au moins deux fois plus longue que celle de plusieurs autres ARA d’usage courant et de son affinité marquée pour le récepteur de l’angiotensine II.

Si les chercheurs s’attendaient à ce que le telmisartan soit aussi efficace que le ramipril, ils ont par contre été fort étonnés de constater que l’association ARA/inhibiteur de l’ECA ne conférait pas d’avantage supplémentaire. Dans les faits, le taux d’événements enregistré dans le groupe recevant le traitement d’association était comparable aux taux observés dans l’un ou l’autre groupe recevant l’ARA ou l’inhibiteur de l’ECA en monothérapie. De surcroît, le taux d’effets indésirables était plus élevé chez les sujets qui recevaient les deux traitements. Par comparaison au ramipril, le traitement d’association a donné lieu à des taux plus élevés de symptômes d’hypotension (4,8 % vs 1,7 %; p<0,001), de syncope (0,3 % vs 0,2 %; p=0,03) et de dysfonctionnement rénal (13,5 % vs 10,2 %; p<0,001). Aucune réduction du risque d’événement n’a été mise en évidence malgré la baisse supplémentaire de 2 ou 3 mmHg.

«Cette baisse supplémentaire des chiffres tensionnels devrait être annonciatrice d’une diminution de 4 à 5 % de l’incidence d’événements; or, l’étude n’avait pas la puissance statistique nécessaire pour faire ressortir une telle diminution. Elle était plutôt conçue pour objectiver un bénéfice clinique supplémentaire résultant d’une inhibition accrue du SRA indépendamment des variations de la TA, et ce bénéfice n’a pas été décelé», explique le Dr Yusuf. Cela dit, poursuit-il, ce résultat n’exclut pas que la double inhibition du SRA soit bénéfique dans divers sous-groupes, par exemple les insuffisants cardiaques ou rénaux.

Facteurs à considérer dans les sous-groupes

L’évaluation des sous-groupes de l’étude ONTARGET générera une grande abondance de données au cours des prochaines années. Diverses études satellites – les principales visant à évaluer les effets relatifs des trois stratégies de traitement sur le rein et le système cérébrovasculaire – pourraient bien faire ressortir des avantages relatifs différents dans certaines populations de patients. Là encore, les propriétés du telmisartan, comme sa longue demi-vie et ses effets sur les récepteurs nucléaires, pourraient être particulièrement bénéfiques pour les organes cibles. Dans le cadre d’une étude comparative préalable intitulée PRISMA II (Prospective Randomized Investigation of the Safety and Efficacy of Micardis Versus Ramipril Using ABPM), le telmisartan s’est révélé plus efficace que le ramipril pour abaisser la TA durant la totalité du nycthémère, même le matin où l’on observe un pic tensionnel, ce qui pourrait avoir des retombées sur les événements diurnes. C’est essentiellement en raison des propriétés particulières et uniques du telmisartan que l’efficacité comparable du telmisartan et du ramipril observée dans l’étude ONTARGET ne peut pas être extrapolée à d’autres ARA.

«Si l’on applique les principes de la médecine factuelle, on devrait s’en tenir aux agents et aux doses qui se sont révélés bénéfiques dans le cadre de l’essai clinique [c.-à-d., 10 mg de ramipril une fois par jour et 80 mg de telmisartan une fois par jour]. Si ce n’est pas ce que vous faites, je ne peux pas affirmer que vous avez tort, mais il est possible que ce soit le cas», lance le Dr Yusuf, qui insiste sur le fait qu’il met lui-même en pratique ce qu’il prône à cet égard. Sur la foi de données probantes, il qualifie maintenant le telmisartan de «solution de rechange» aux inhibiteurs de l’ECA. Le choix du telmisartan ou du ramipril est «une préférence personnelle du médecin et du patient». Par contre, l’association de deux inhibiteurs du SRA n’est pas une pratique recommandée en général, quoique cette stratégie puisse encore se révéler viable pour certains groupes de patients.

Résumé

De l’avis du Dr Yusuf, il se dégage un message bien simple des résultats de l’étude ONTARGET, le plus vaste essai clinique sur un ARA à ce jour. Le telmisartan est un ARA qui a fait la preuve de son efficacité comme solution de rechange acceptable à un inhibiteur de l’ECA chez les patients qui souffrent d’une maladie vasculaire ou d’un diabète à risque élevé sans insuffisance cardiaque. Chez les sujets de l’étude ONTARGET, qui étaient exposés à un risque élevé d’événement CV, il a conféré une protection d’ampleur comparable à celle du traitement de référence contre le risque combiné de mortalité d’origine CV, d’IM, d’AVC et d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, mais il a été mieux toléré.

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