Comptes rendus

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Optimisation des résultats du traitement à différents stades de la maladie de Parkinson

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 17e Congrès mondial sur la maladie de Parkinson et les troubles apparentés

Amsterdam, Pays-Bas / 9-13 décembre 2007

La biosynthèse continue de la dopamine résulte de l’hydroxylation de la L-tyrosine en lévodopa par la tyrosine hydroxylase, puis de la décarboxylation de la lévodopa. Chez les patients souffrant de la maladie de Parkinson (MP), on observe, dans le compartiment présynaptique, une perte de dopamine résultant de l’action de la monoamine oxydase de type B (MAO-B). La dopamine continue d’être synthétisée, mais n’est plus présente en concentration suffisante pour assurer une neurotransmission adéquate. Le blocage de l’action de la MAO-B se traduit par une augmentation de la concentration en dopamine; dans le cas de la rasagiline, le blocage de la MAO-B se fait par une liaison irréversible avec l’enzyme. «Le caractère irréversible de cette liaison signifie que l’action de la rasagiline est très durable», explique le Pr Fabrizio Stocchi, département de neurologie, IRCCS San Raffaele Pisana, Rome, Italie.

Traitement de la MP débutante : étude TEMPO

Ce dernier a cité l’étude TEMPO (Rasagiline Mesylate [TVP-1012] in Early Monotherapy for PD Outpatients), lors de laquelle 404 patients dont la MP débutante n’avait jamais été traitée ont reçu, après randomisation, 1 mg ou 2 mg de rasagiline ou un placebo (Parkinson Study Group. Arch Neurol 2002;59[12]:1937-43). Le paramètre principal d’évaluation de l’efficacité était la variation du score UPDRS (Unified Parkinson’s Disease Rating Scale) total entre le début et la semaine 26 de l’étude.

Le score UPDRS total moyen est demeuré essentiellement inchangé dans les deux groupes de traitement actif, mais il s’est détérioré d’environ quatre points dans le groupe placebo (p<0,001 pour la comparaison des deux groupes de traitement avec le placebo). Le traitement actif s’est aussi révélé bénéfique pour les composantes motrices et non motrices de l’échelle UPDRS et, comme le souligne le Pr Stocchi, «les symptômes isolés tels que les tremblements se sont également atténués chez les patients sous rasagiline». Aucun problème d’innocuité n’a été signalé.

Bénéfice éventuel d’un traitement précoce

Au terme de la phase comparative avec placebo de 26 semaines de l’étude TEMPO, tous les patients ont reçu le traitement actif et ont été suivis pendant une autre tranche de 26 semaines. Les patients recevaient ensuite le traitement que le médecin traitant jugeait le plus approprié, mais ils continuaient tout de même d’être suivis. Dans le cadre de ce suivi à long terme, près de la moitié des patients recevaient toujours la rasagiline en monothérapie après deux ans de traitement, ce qui témoigne une fois de plus de son efficacité pour maîtriser la maladie et de sa bonne tolérabilité.

Les chercheurs ont aussi trouvé intéressant de constater que l’effet bénéfique du traitement sur le score UPDRS total chez les patients initialement sous rasagiline s’était maintenu durant le suivi à long terme. Après six ans, ils ont noté un écart significatif de 16 % entre les deux groupes quant à la variation moyenne du score depuis le début de l’étude, ce qui pourrait indiquer un effet de la rasagiline sur l’évolution de la maladie.

L’essai ADAGIO (Attenuation of Disease Progression with Azilect Given Once-daily), qui se déroule actuellement chez plus d’un millier de patients, a été conçu pour vérifier cette hypothèse, et les résultats sont attendus en 2008. Le mécanisme qui sous-tend l’effet éventuel du médicament sur l’évolution de la maladie demeure spéculatif pour l’instant. Cela dit, le Dr Wilfried Dimpfel, Justus-Liebeg Universität, Hesse, Allemagne, et Jonathan M. Brotchie, PhD, chercheur principal, division de l’imagerie cérébrale et des systèmes comportementaux/neurosciences, Toronto Western Hospital, Ontario, ont présenté des résultats d’études sur des modèles animaux qui semblent indiquer que la rasagiline et le 1-amino-indane, son métabolite, pourraient exercer des effets antiparkinsoniens autres que l’inhibition de la MAO-B.

Traitement dopaminergique

Dans la plupart des cas, la MP progresse et le patient finit par avoir besoin d’un traitement par la lévodopa. Malgré l’administration concomitante d’un inhibiteur de la D-carboxylase pour bloquer la conversion périphérique en dopamine, les fluctuations motrices touchent 80 % des patients traités par la lévodopa et peuvent représenter une cause importante d’invalidité. À l’heure actuelle, les symptômes non moteurs comme l’anxiété, l’agitation et l’irritabilité retiennent aussi l’attention des chercheurs.

Deux essais pivots d’envergure ont été réalisés sur l’utilisation de la rasagiline comme adjuvant à la lévodopa. L’étude PRESTO visait à comparer les doses de 1 mg/jour et de 0,5 mg/jour de rasagiline avec un placebo (Parkinson Study Group. Arch Neurol 2005; 62[2]:241-8), tandis que l’étude LARGO visait à comparer la rasagiline avec l’entacapone ou un placebo (Rascol et al. Lancet 2005; 365[9463]:947-54). Lors de ces deux études, le traitement actif a raccourci les périodes «off» (piètre fonction motrice) et prolongé les périodes «on» de façon notable par rapport au placebo. «Fait encore plus intéressant, enchaîne le Pr Stocchi, la rasagiline s’est révélée aussi efficace qu’un médicament bien établi comme l’entacapone pour prolonger les périodes “on”.» De plus, selon une analyse supplémentaire de la sévérité des périodes «off» le matin, avant l’administration de la première dose, les patients recevant la rasagiline se portaient mieux que ceux des groupes entacapone ou placebo, phénomène que le Pr Stocchi a attribué à la liaison irréversible à la MAO-B. Selon une analyse regroupant ces deux études, la fréquence des effets indésirables était semblable dans les groupes placebo et rasagiline, même chez les patients de plus de 70 ans, ce qui donne à penser que le traitement est sûr chez les patients âgés.

Pratique clinique au quotidien

À la lumière des résultats encourageants de l’étude TEMPO, les lignes directrices de la MDS (Movement Disorder Society) et de l’EFNS (European Federation of Neurological Societies) indiquent que la rasagiline en monothérapie est efficace pour combattre les symptômes et celles du National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) préconisent les inhibiteurs de la MAO-B dans le traitement de première intention de la MP débutante. Les résultats des études PRESTO et LARGO ont aussi incité le NICE à recommander dans ses lignes directrices que les inhibiteurs de la MAO-B soient administrés en première intention dans la MP avancée. Par ailleurs, il est précisé dans les lignes directrices de l’AAN (American Academy of Neurology) et de l’EFNS que la rasagiline peut réduire les périodes «off» en présence de complications motrices.

La simplicité de la posologie de la rasagiline est un point important. De l’avis du Pr Heinz Reichmann, directeur du département de neurologie, Carl Gustav Carus Universität, Dresde, Allemagne, «l’adhésion au traitement est médiocre dans la MP, peut-être à cause des schémas de traitement rigides et difficiles. La posologie simple de la rasagiline à une prise par jour devrait toutefois améliorer l’adhésion.»

Le Pr Reichmann a également présenté les résultats d’une étude réalisée après la commercialisation du produit dans un contexte de pratique clinique au quotidien. En tout, 754 patients recrutés auprès de neurologues ont été évalués au départ, puis après quatre semaines et quatre mois. L’analyse des patients qui recevaient le traitement adjuvant a révélé que le score total et le sous-score des signes moteurs classiques de la Columbia University Rating Scale dénotaient une amélioration au moment de la dernière évaluation. «Le sous-score des signes non moteurs s’est aussi amélioré : les patients ont rapporté moins de sialorrhée; ils avaient plus de facilité à passer à la station debout; et même leur posture s’était améliorée», rapporte le Pr Reichmann. Chez certains patients, l’amélioration n’a été perceptible qu’après quatre semaines, fait-il valoir. «J’affirme habituellement que l’amélioration se voit au cours des quatre premières semaines et je ne m’attends à aucune amélioration subséquente, mais peut-être n’est-ce pas vrai et devrions-nous administrer la rasagiline plus longtemps avant de prendre une décision finale.»

Le Pr Murat Emre, département de neurologie, École de médecine d’Istanbul, Turquie, a présenté une série de cas cliniques qui illustrent son utilisation clinique dans la pratique. Il a cité en exemple le cas d’une femme de 55 ans qui présentait une douleur à l’épaule gauche depuis un an et dont les antécédents médicaux ne montraient rien de pertinent. La douleur avait été attribuée à une tendinite, mais n’avait pas cédé à un traitement anti-inflammatoire ni à la physiothérapie. La patiente avait également rapporté une légère perte de dextérité lorsqu’elle cousait, et sa fille avait remarqué un léger tremblement intermittent de la main gauche au repos. L’examen a révélé un ralentissement minime du tapotement des doigts, mais aucune rigidité n’était apparente. Un tremblement minime était perceptible au repos lorsque la patiente effectuait une opération mentale. La démarche était normale, si ce n’est l’amplitude légèrement moins marquée du ballant du bras gauche. Le Pr Emre a diagnostiqué une MP débutante au niveau du cortex prémoteur et a prescrit de la rasagiline à la patiente. Après trois mois, le tremblement et la douleur à l’épaule s’étaient atténués. «Récemment, j’ai revu cette patiente après six mois de traitement, et elle allait bien», ajoute-t-il. Dans ce cas, le diagnostic de MP débutante lui avait semblé évident après un examen détaillé, et la rasagiline a atténué ses symptômes efficacement.

Résumé

Trois essais cliniques pivots ont confirmé l’efficacité de la rasagiline à laquelle on s’attendait compte tenu de son mode d’action. Les résultats prometteurs de ces essais ont depuis été confirmés par des études de post-commercialisation et l’expérience clinique générale, et très peu de problèmes d’innocuité ont été signalés.

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