Comptes rendus

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Progrès dans l’analyse du tropisme et répercussions sur le traitement antirétroviral

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Mise à jour des données présentées au 15e Congrès sur les rétrovirus et les infections opportunistes

Boston, Massachusetts / 3-6 février 2008

La réussite d’un traitement anti-VIH exige la suppression à long terme de la réplication virale ainsi que le rétablissement et la préservation de la fonction immunitaire, le tout dans un but de prolongation de la survie et d’amélioration de la qualité de vie. L’arsenal anti-VIH comprend de nombreux inhibiteurs, certains agissant sur les enzymes essentielles à la réplication du virus et d’autres s’opposant à l’entrée de celui-ci dans la cellule et à sa fusion. On travaille sans relâche à la découverte d’agents et d’associations médicamenteuses qui saperont les efforts de mutation du virus et l’empêcheront de résister à des traitements auparavant efficaces.

Aux premiers stades de l’infection, les populations de VIH sont relativement homogènes. Avec le temps, toutefois, le virus acquiert normalement une pharmacorésistance consécutive à de multiples mutations. Chez le patient ayant un passé thérapeutique, la personnalisation minutieuse du traitement gagne donc en importance. Car en optimisant le schéma antirétroviral, on peut ramener l’ADN viral sous le seuil de détection malgré un lourd passé thérapeutique. Conformément aux lignes directrices en vigueur, on devrait associer deux ou trois agents, dont certains provenant des classes thérapeutiques les plus récentes.

Utilité de l’analyse du tropisme

Après l’échec d’un traitement antirétroviral, on doit tracer le profil de résistance en tenant compte de l’analyse génotypique et des antécédents médicamenteux afin de définir le schéma thérapeutique subséquent, explique la Dre Anita Rachlis, professeure titulaire de médecine, division des maladies infectieuses, Sunnybrook Health Sciences Centre, University of Toronto, Ontario. De plus, en révélant la voie d’accès que privilégie le virus pour pénétrer dans les cellules CD4+, à savoir le corécepteur des chimiokines CCR5 ou CXCR4 (ou les deux), l’analyse du tropisme nous oriente vers l’agent le plus susceptible de s’opposer à la pénétration virale. De 40 à 60 % des patients déjà traités sont porteurs d’un virus à tropisme CCR5 exclusif, tandis que de 20 à 40 % sont infectés par un VIH à tropisme double/mixte et qu’une proportion nettement plus faible présente un virus à tropisme CXCR4 exclusif (Figure 1).

Figure 1. Voie d’accès privilégiée pour le virus


Comme l’ont constaté les congressistes, l’analyse du tropisme à l’aide du test Trofile s’est révélée indispensable lors des études sur les antagonistes du corécepteur CCR5, soit le maraviroc et un agent encore à l’étude, le vicriviroc. Puisque ces agents ne peuvent pas inhiber la réplication du VIH qui privilégie le corécepteur CXCR4 comme porte d’entrée (et que la présence d’un virus à tropisme CXCR4 a été associée à une activité antivirale réduite chez les utilisateurs d’antagonistes du CCR5), le maraviroc et le vicriviroc devraient être réservés aux porteurs d’un VIH à tropisme CCR5 exclusif. En clinique, le test Trofile concourt à l’élaboration d’un schéma anti-VIH optimal et doit être effectué pour déterminer si l’antagonisme du CCR5 au moyen du maraviroc est judicieux.

Sensibilité accrue du test Trofile

Récemment, on a rehaussé la sensibilité du test Trofile. Tout en conservant sa spécificité, il permet de déceler de très faibles taux de virus à tropisme CXCR4. Selon le fabricant, il offre dorénavant une sensibilité de 100 % à l’égard des variantes CXCR4 ne constituant que 0,3 % de la population virale totale. Il est donc 30 fois plus sensible que le test initial (utilisé depuis l’automne 2007), dont l’exactitude atteignait 100 % lorsque les variantes CXCR4 représentaient au moins 10 % de la population virale et 83 % pour une proportion de variantes de 5 %. En clair, cette amélioration permet le repérage d’une tranche additionnelle de 8 à 10 % de porteurs d’un virus à tropisme CXCR4 plutôt que CCR5. Le test conforte donc le médecin traitant dans sa décision de prescrire un antagoniste du CCR5. C’est là un progrès digne de mention, car il «permet de mieux cibler les patients chez qui le maraviroc est indiqué», souligne la Dre Rachlis. Le mode d’emploi du test demeure inchangé, tout comme la charge virale minimale.

Jusqu’à maintenant, les essais MOTIVATE (Maraviroc Plus Optimized Background Therapy in Viremic, ART-Experienced Patients), menés à l’aide de la version antérieure du test Trofile, ont formé l’assise de l’homologation et de la prescription du maraviroc. Lors de ces études, dont les données à 48 semaines ont été présentées aux congressistes, les patients dont l’ARN du VIH est descendu en deçà de 400 copies/mL ont été significativement plus nombreux dans le groupe maraviroc et traitement de fond optimal que dans le groupe placebo et traitement de fond optimal (56,1 % des patients sous maraviroc 2 f.p.j. et 51,7 % des patients sous maraviroc 1 f.p.j. vs 22,5 % des patients sous traitement de fond optimal seulement). Lorsqu’on a porté l’objectif à <50 copies de l’ARN du VIH/mL, l’effet s’est accentué (45,5 % et 43,2 % des groupes maraviroc 2 f.p.j. et 1 f.p.j. contre 16,7 % du groupe placebo). De même, le nombre de cellules CD4+ a progressé davantage chez les sujets sous traitement actif que chez les témoins sous placebo (jusqu’à 124 cellules/m3 vs 61 cellules/m3). «On ignore dans quelle mesure le test Trofile plus sensible aurait modifié les résultats de ces essais, mais on peut penser qu’il aurait permis de mieux distinguer les porteurs d’un VIH à tropisme CCR5 et d’exclure les porteurs d’un virus à tropisme double/mixte, chez qui on pouvait s’attendre à une réponse moins favorable», avance la Dre Rachlis. On mène actuellement d’autres études prospectives sur un schéma comprenant du maraviroc, et le test Trofile à sensibilité accrue préside au choix des sujets.

Par ailleurs, on a présenté une nouvelle analyse des résultats de l’étude MERIT, la première analyse n’ayant pu démontrer la non-infériorité du maraviroc par rapport à l’éfavirenz (le critère était l’obtention d’une charge virale <50 copies de l’ARN du VIH/mL) chez des sujets exempts de passé thérapeutique (Heera et al. Résumé 40LB). Les chercheurs ont déterminé que 25 sujets (3,5 %) rangés au nombre des porteurs d’un virus à tropisme CCR5 lors de la sélection étaient en fait porteurs d’un virus à tropisme double/mixte. On constate sans étonnement que ce sous-groupe a peu répondu au maraviroc (7,1 % après 48 semaines). En revanche, la proportion de porteurs d’un VIH à tropisme CCR5 parvenus, sous maraviroc, à la charge virale cible, soit <50 copies de l’ARN du VIH/mL, est passée de 65,3 %, dans le compte rendu initial de l’étude MERIT, à 68 %. Les chercheurs ont également constaté que les changements de tropisme étaient 50 % moins fréquents avec la variante C qu’avec les autres variantes. Plus tard cette année, on compte réanalyser de nouveau des échantillons de l’étude MERIT à l’aide du test Trofile à sensibilité accrue. Ce réexamen pourrait montrer qu’il est désormais possible de tracer un profil très net du tropisme viral afin d’orienter le traitement dans ce sous-groupe de patients.

Il n’y a pas lieu de soumettre au nouveau test les patients actuellement traités par un antagoniste du CCR5 sur la foi de l’ancien test Trofile, à moins que la suppression virale soit insuffisante et qu’un changement de traitement soit envisagé, indique la Dre Rachlis. On n’a encore formulé aucune recommandation sur la réévaluation du tropisme ni sur la surveillance à exercer pendant un traitement par le maraviroc.

Résumé

Les médecins et leurs patients applaudissent à toute mesure susceptible de conduire à un traitement antirétroviral mieux adapté, conclut la Dre Rachlis. «La plus grande sensibilité [de ce test] et la mise au point éventuelle d’autres méthodes de détermination du tropisme ne comportent que des avantages.»

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