Comptes rendus

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Prévention des infections à méningocoques

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - Le 14e Congrès international sur les maladies infectieuses (ICID)

Miami, Florida / March 9-12, 2010

L’épidémiologie des méningococcies invasives change avec le temps, le lieu et la saison. L’incidence diffère également d’un groupe d’âge à l’autre, tout comme la sensibilité aux sérogroupes circulants responsables de la maladie. À l’échelle nationale, l’incidence des méningococcies invasives se chiffrait à 0,66 pour 100 000 habitants (210 cas) en 2006, dernière année pour laquelle nous avons des données complètes. Un peu plus de 50 % de ces infections étaient imputables au sérogroupe B, 20 % au sérogroupe C, 13 % au sérogroupe Y, 3 % au sérogroupe W-135, 1 % au sérogroupe A et 9 % aux autres sérogroupes.

Il importe de souligner que la proportion d’infections causées par les cinq sérogroupes principaux varie considérablement d’une province à l’autre et que chaque sérogroupe peut causer très peu d’infections, voire n’en causer aucune, ou, inversement, causer une forte proportion des infections à méningocoques. Dans chaque groupe d’âge, le choix du vaccin doit tenir compte de l’épidémiologie locale de la maladie.

Depuis 2001, le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) recommande l’utilisation du vaccin conjugué contre le méningocoque C dans certains groupes d’âge, et il a récemment inclus dans ses recommandations le vaccin quadrivalent chez les adolescents. Cette dose de vaccin antiméningococcique conjugué administrée à l’adolescence devrait s’inscrire dans le calendrier de vaccination, même si l’adolescent a déjà reçu le vaccin antiméningococcique C durant la petite enfance (avant l’âge de un an). La dose administrée à l’adolescence contribue au maintien d’anticorps circulants contre le sérogroupe C qui semblent importants pour la protection continue contre les infections invasives à méningocoques. L’âge optimal pour l’administration de la dose est d’environ 12 ans.

Le vaccin monovalent (sérogroupe C) et le vaccin quadrivalent (sérogroupes A, C, W-135 et Y) peuvent tous deux être utilisés à l’adolescence, le choix étant fonction de l’épidémiologie locale.

Vers un vaccin fortement immunogène

La distribution nationale et mondiale des sérogroupes étant variable et imprévisible, une lutte efficace contre les infections à méningocoques devrait passer par l’utilisation d’un vaccin fortement immunogène contre plusieurs sérogroupes. À cet égard, le vaccin antiméningococcique polysaccharidique n’est peut-être pas idéal.

Comme l’explique Jamie Findlow, PhD, Health Protection Agency, Manchester, Royaume-Uni, les vaccins polysaccharidiques contre les sérogroupes A et C sont efficaces chez les enfants de plus de deux ans, les adolescents et les adultes et ont leur utilité dans la lutte contre les éclosions et les épidémies. En revanche, ils sont peu immunogènes chez les enfants de moins de deux ans, et la réponse à ces vaccins ne peut pas être stimulée. De plus, «des taux élevés d’anticorps circulants sont nécessaires à l’obtention d’une protection», ajoute M. Findlow. Les vaccins polysaccharidiques n’induisent pas de mémoire immunitaire, d’où une durée de protection d’au plus trois à cinq ans, et n’exercent qu’un effet nul ou limité sur le portage nasopharyngé; ils ne contribuent donc pas à l’immunité collective. Lorsqu’ils sont réexposés au vaccin polysaccharidique, certains sujets ont une réponse anticorps émoussée qui ne les protège pas nécessairement contre l’infection.

En revanche, les vaccins conjugués induisent une mémoire immunitaire et sont immunogènes chez les nourrissons, le groupe d’âge le plus frappé par les infections à méningocoques. Au Royaume-Uni, l’expérience avec le vaccin conjugué contre le méningocoque C a démontré que le portage nasopharyngé du sérogroupe C diminuait de 71 à 81 %. «Ces données montrent que le vaccin prévient les infections invasives, mais aussi qu’il protège le nasopharynx en prévenant ou en éliminant le portage», fait valoir M. Findlow. De plus, les expositions répétées au vaccin conjugué ne risquent pas d’induire une réponse sous-optimale, et les vaccins conjugués entraînent une longue persistance de la réponse anticorps. En raison de ces avantages, les autorités sanitaires du Royaume-Uni recommandent l’utilisation du vaccin antiméningococcique conjugué à la fois chez les nourrissons et les adolescents de même que chez les sujets à risque et les sujets immunodéprimés. Le vaccin conjugué pourrait aussi être une bonne police d’assurance pour les grands voyageurs, note M. Findlow, car l’utilisation d’un vaccin conjugué diminue le besoin de doses répétées.

Nouveau vaccin quadrivalent

Lors d’un programme d’essais cliniques de phase III sur le nouveau vaccin antiméningococcique quadrivalent utilisant la protéine CRM197, toxine diphtérique mutante non toxique d’origine naturelle, il a été démontré que le vaccin MenACWY-CRM était non inférieur au vaccin MenACWY-D actuellement sur le marché (Menactra). En général, les adolescents ont été plus nombreux à répondre aux quatre sérogroupes vaccinaux dans le groupe ayant reçu le nouveau vaccin MenACWY-CRM que dans le groupe MenACWY-D : 75 % vs 66 % au sérogroupe A, 75 % vs 71 % au sérogroupe C, 75 % vs 63 % au sérogroupe W-135 et 68 % vs 41 % au sérogroupe Y.

De plus, un mois après la vaccination, les moyennes géométriques des titres (MGT) d’anticorps étaient systématiquement plus élevées chez les adolescents qui avaient reçu le vaccin MenACWY-CRM que chez ceux qui avaient reçu le vaccin MenACWY-D. À en juger par le dosage de l’activité bactéricide du sérum avec le complément humain (hSBA), le pourcentage d’adolescents présentant des titres d’anticorps bactéricides =1:8 était aussi significativement plus élevé pour les sérogroupes A, W-135 et Y dans le groupe MenACWY-CRM, alors que les taux de réactions systémiques étaient similaires dans les deux groupes. L’administration concomitante du vaccin MenACWY-CRM et de plusieurs autres vaccins usuels de l’adolescence n’a aucunement influé sur la réponse à l’un ou l’autre de ces vaccins.

Parmi les adultes âgés de 19 à 55 ans, les réponses sériques étaient aussi significativement plus fortes contre les sérogroupes C et Y dans le groupe MenACWY-CRM que dans le groupe MenACWY-D. Toujours selon le dosage hSBA, le pourcentage d’adultes ayant atteint des titres d’anticorps bactéricides =1:8 contre les sérogroupes C et Y était aussi significativement plus élevé dans le groupe ayant reçu le nouveau vaccin, alors que les MGT étaient significativement plus élevées pour les sérogroupes C, W-135 et Y dans le groupe MenACWY-CRM que dans le groupe MenACWY-D.

Titres d’anticorps persistants

Non seulement est-il impératif que les sujets vaccinés aient une réponse anticorps suffisamment forte contre les sérotypes vaccinaux pour être protégés contre une infection invasive, mais les titres d’anticorps doivent demeurer élevés dans le temps pour que la protection soit durable. Comme on l’a souligné au congrès, le nouveau vaccin MenACWY-CRM est associé à de solides données démontrant la persistance de la réponse anticorps pendant une période d’au moins 22 mois.

Après un suivi d’une durée moyenne de 22 mois dans le cadre de l’essai de phase III mené chez des adolescents, la proportion de patients ayant des titres d’anticorps bactéricides (hSBA) =1:8 contre les sérogroupes A, C, W-135 et Y s’élevait à 36 %, 62 %, 84 % et 67 %, respectivement, dans le groupe MenACWY-CRM, par comparaison à 25 %, 58 %, 74 % et 54 % dans le groupe MenACWY-D, souligne le Dr Christopher Gill, Cambridge, Massachusetts (Figure 1). Après 22 mois, les MGT d’anticorps contre les quatre sérogroupes étaient aussi systématiquement plus élevées dans le groupe MenACWY-CRM, tout comme les proportions de sujets du groupe MenACWY-CRM dont les titres d’anticorps bactéricides (hSBA) étaient =1:8 pour les sérogroupes A, W et Y. Les MGT d’anticorps étaient aussi significativement plus élevées pour les sérogroupes A et Y chez les mêmes sujets vaccinés.

Ainsi, concluent les chercheurs, la majorité des adolescents avaient toujours des titres d’anticorps bactéricides d’environ 1:8 contre les sérogroupes C, W-135 et Y deux ans après avoir reçu l’un ou l’autre vaccin conjugué, mais les sujets du groupe MenACWY-CRM étaient plus nombreux que les sujets du groupe MenACWY-D à toujours avoir des titres protecteurs contre les sérogroupes A, W-135 et Y.

Figure 1. Titres d’anticorps bactéricides =1:8 22 mois après la vaccination (dosage hSBA)


Recommandations pour les voyageurs

Les experts du Canada recommandent maintenant aux voyageurs le vaccin antiméningococcique, en particulier le vaccin conjugué, dans certaines circonstances très précises. «Au Canada, les sérogroupes W-135 et Y représentent une proportion importante des infections à méningocoques, alors pourquoi ne pas leur administrer un vaccin conjugué quadrivalent», lance le Dr Jay Keystone, directeur, Toronto Medisys Travel Clinic, Ontario. Aux voyageurs, «je conseillerais sans hésitation d’opter pour le vaccin conjugué», ajoute-t-il, car l’expérience avec le vaccin polysaccharidique a démontré que les pèlerins se rendant dans les régions à risque élevé peuvent n’avoir aucun symptôme mais tout de même rapporter la maladie au pays et infecter leur entourage. Le nouveau vaccin quadrivalent MenACWY-CRM est associé à de plus forts taux de séroprotection et à des titres d’anticorps généralement plus élevés comparativement au vaccin quadrivalent actuellement commercialisé. «Finalement, ce sera peut-être un meilleur vaccin», affirme le Dr Keystone. Fait digne de mention, cependant, les essais visant à évaluer l’efficacité ne peuvent pas comparer les deux vaccins, car il y a trop peu de cas d’infections à méningocoques pour que ce soit possible. «En théorie, le vaccin MenACWY-CRM est peut-être avantageux, mais en pratique, je crois que ce sont deux excellents vaccins», conclut le Dr Keystone.

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