Comptes rendus

Nouvelles lignes directrices sur les dyslipidémies : données cliniques et biologiques
Évolution de la prise en charge des plaques vulnérables

Réduction de la mortalité et du risque cardiovasculaire global sur 10 ans par une bithérapie en un comprimé

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

La 21e Assemblée scientifique de l’International Society of Hypertension

Fukuoka, Japon / 15-19 octobre 2006

Comme on peut le lire dans un compte rendu récent signé Wong et al. (Am J Cardiol 2006;98[2]:204-8), la prévalence de l’hypertension était de 30 % au sein d’une cohorte de plus de 2800 personnes représentative de la population américaine, alors que celle de l’hypercholestérolémie se situait à 47 %. Par ailleurs, 18 % de ces personnes étaient aux prises avec les deux facteurs de risque, et les femmes étaient un peu plus susceptibles que les hommes de les présenter tous les deux.

Cette enquête a également révélé que si l’hypertension et l’hypercholestérolémie étaient traitées chez 29 % des sujets, elles n’étaient véritablement maîtrisées toutes les deux que chez 9 % d’entre eux. Les auteurs en ont conclu que le traitement et la maîtrise de ces états combinés laissaient à désirer aux États-Unis. Or, il se trouve que l’hypertension est mieux maîtrisée aux États-Unis qu’au Canada. Il faut donc impérativement multiplier les efforts afin de traiter adéquatement les patients aux prises avec ces deux facteurs de risque.

Vers une prise en charge globale du risque

L’association de substances médicamenteuses dans un seul et même comprimé pour la prise en charge globale du risque cardiovasculaire (CV) suscite un intérêt grandissant. On peut, à titre d’exemple, associer un inhibiteur calcique à une statine pour agir à la fois sur l’hypertension et l’hypercholestérolémie.

«Lorsqu’on traite l’hypertension ou l’hypercholestérolémie, c’est en fait pour réduire le risque CV», soit, essentiellement, le risque global que pose l’athérosclérose, explique le Dr Ross Feldman, groupe de recherche en biologie cellulaire, Robarts Research Institute, et professeur titulaire de physiologie et de pharmacologie, University of Western Ontario, London. Constitué de deux agents ciblant chacun un facteur clé de ce risque, le nouveau comprimé peut être considéré comme un «réducteur du risque athéroscléreux», observe le Dr Feldman, ce qui aidera les médecins à «concevoir autrement le traitement du risque, soit d’une manière globale plutôt qu’individuelle».

Cette nouvelle conception a été mise à l’épreuve récemment lors de GEMINI-AALA, essai de 14 semaines auquel ont pris part 1649 patients de groupes ethniques divers : région Asie-Pacifique, Moyen-Orient, Afrique et Amérique centrale/du Sud. Ces personnes ont reçu la bithérapie amlodipine/atorvastatine réunie en un seul comprimé; grâce aux huit teneurs, on a procédé à une progression posologique jusqu’à l’obtention de la TA et du taux de C-LDL cibles; la dose moyenne s’est établie à 6,1 mg pour l’inhibiteur calcique et à 17,1 mg pour la statine.

Les patients ont été regroupés selon leur score de Framingham relativement au risque de maladie coronarienne. Dès le départ, tous les sujets souffraient d’hypertension et de dyslipidémies. Les patients du groupe 1 ne présentaient aucun facteur de risque CV additionnel, ceux du groupe 2 en présentaient au moins un (à l’exclusion de la maladie coronarienne et du diabète) et ceux du groupe 3 souffraient de la maladie coronarienne, du diabète ou étaient aux prises avec un facteur de risque équivalent. La TA et le taux de C-LDL visés dans les trois groupes étaient les suivants : <140/90 mmHg et <4,1 mmol/L; <140/90 mmHg et £3,4 mmol/L; et <130/80 mmHg et £2,6 mmol/L.

Le principal paramètre était le pourcentage de patients ayant atteint la TA cible selon les critères du Seventh Report of the Joint National Committee on Prevention, Detection, Evaluation and Treatment of High Blood Pressure et le taux de C-LDL cible selon les lignes directrices de l’Adult Treatment Panel III du National Cholesterol Education Program. Au terme de l’étude, 55,2 % des patients, tous groupes confondus, avaient atteint leur TA et leur taux de C-LDL cibles. Dans le groupe exposé au risque le plus faible, cette proportion se chiffrait à 81,3 %.

Dans le groupe 3 – le plus difficile à traiter, car il était composé des patients les plus à risque, à la poursuite des objectifs de traitement les plus ambitieux (<130/80 mmHg et £2,6 mmol/L) – 40,3 % des sujets étaient parvenus aux valeurs cibles après 14 semaines (Figure 1). Dans l’ensemble de la population de l’étude, 61,3 % et 87,1 % des patients, respectivement, ont atteint leur TA et leur taux de C-LDL cibles.

Figure 1 : Variation absolue de la TA et du C-LDL pendant l’étude


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Les Asiatiques et les autres ethnies sont parvenus à la TA et au taux de C-LDL cibles dans des proportions comparables. En outre, la bithérapie en un comprimé s’est révélée sûre et bien tolérée; en effet, 3,6 % seulement des sujets ont abandonné le traitement pour cause d’effet indésirable, le plus fréquent ayant été l’œdème périphérique (10 %).

À la lumière des baisses de la TA et du taux de C-LDL enregistrées au cours de cette étude de 14 semaines, les chercheurs estiment que le risque sur 10 ans d’événement CV selon l’équation de Framingham pourrait avoir régressé de 54 % dans la cohorte.

Essai CASE-J

Une autre étude dont le compte rendu a été exposé pendant le congrès a confirmé l’efficacité et l’innocuité globales de l’amlodipine au sein d’une population asiatique exposée à un risque élevé. On a réalisé l’essai CASE-J (Candesartan Antihypertensive Survival Evaluation in Japan) pour comparer l’inhibiteur calcique au candésartan, antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II (ARA), quant à la réduction de l’incidence de la morbi-mortalité CV chez 4700 Japonais hypertendus exposés à un risque élevé. Après une progression posologique, les patients ont reçu l’amlodipine à 5 mg/jour ou le candésartan à 8 mg/jour; les deux groupes pouvaient prendre d’autres antihypertenseurs pour atteindre la TA cible. Le principal paramètre, qui regroupait la morbidité et la mortalité CV, comprenait la mort subite ainsi que les événements CV, cardiaques, rénaux et vasculaires.

Après un suivi moyen de 3,2 ans, on a noté une baisse de la TA moyenne, ramenée d’environ 162/92 mmHg au départ à environ 133/76 mmHg dans les deux groupes. La maîtrise des chiffres tensionnels est demeurée parfaitement comparable tout au long de l’étude. On n’a pas relevé non plus de différence statistiquement significative entre les groupes à l’égard du principal paramètre mixte ni de chacune de ses composantes prise individuellement.

En revanche, des différences entre les deux composés sont ressorties quant au moment de la survenue des événements CV. Ceux-ci ont été moins nombreux dans le groupe inhibiteur calcique que dans le groupe ARA entre le sixième et le dix-huitième mois, mais l’inverse a été constaté après 18 mois; les écarts n’étaient toutefois pas significatifs. Par ailleurs, les nouveaux cas de diabète ont été moins nombreux dans le groupe candésartan, effet également observé avec d’autres ARA et inhibiteurs de l’ECA.

Fait intéressant, ces constatations temporelles rappellent celles de l’étude VALUE (Valsartan Antihypertensive Long-Term Use Evaluation). L’amlodipine avait alors été associée à une fréquence moindre d’AVC, d’infarctus du myocarde et de décès pendant les premiers mois de l’étude; à la fin de l’essai, cependant, les différences ayant trait au principal paramètre cardiaque mixte et aux décès toutes causes confondues s’étaient aplanies.

Le Dr Feldman décrit l’étude CASE-J comme «une étude VALUE, en plus modeste et en version asiatique». Les ARA et les schémas posologiques étaient différents, certes, mais la population des deux essais était exposée à des risques essentiellement équivalents. On est parvenu à une maîtrise de la TA plus uniforme dans les groupes de l’étude CASE-J que dans ceux de l’essai VALUE, où l’inhibiteur calcique avait amené rapidement une réduction plus marquée de la TA, qui est demeurée de 1 à 2 mmHg plus faible jusqu’à la fin de l’étude. «L’étude CASE-J réunissait, il est vrai, une population nettement moins nombreuse, mais ses résultats n’en confirment pas moins ceux de l’essai VALUE, à savoir qu’une baisse comparable de la TA se traduit par une diminution comparable, du moins selon toute vraisemblance, du risque CV», de conclure le Dr Feldman.

Résumé

Les résultats de l’étude GEMINI-AALA permettent de croire que la bithérapie amlodipine/atorvastatine en un seul comprimé pourrait amener un plus grand nombre de patients vers leurs valeurs cibles que l’emploi concomitant de ces deux composés. Si cette conclusion est étayée par d’autres études, il ne fera plus de doute qu’en ciblant deux facteurs de risque CV clés à l’aide d’un seul comprimé, on peut améliorer la prise en charge globale du risque CV et amoindrir celui-ci à long terme chez des hypertendus présentant d’autres facteurs de risque.

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