Comptes rendus

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Colite ulcéreuse : maintien de la rémission et prévention du cancer colorectal

Simplification du traitement immunosuppresseur post-transplantation

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

Le 13e Congrès de la European Society for Organ Transplantation (ESOT)

Prague, République tchèque / 29 septembre-3 octobre 2007

«Notre recherche documentaire a révélé que 40 % à 60 % de tous les rejets aigus tardifs sont dus à l’inobservance du traitement», affirme la Dre Fabienne Dobbels, Université catholique de Louvain, Belgique. «À long terme, l’incidence des rejets aigus tardifs après une transplantation est <10 %, mais les rejets qui surviennent sont imputables à l’inobservance du traitement dans la moitié des cas. L’inobservance n’est souvent pas le seul facteur en cause, mais c’est une variable que l’on néglige fréquemment lorsqu’on tente d’expliquer de piètres résultats. De même, jusqu’à 20 % des pertes de greffon ou des décès tardifs sont causés par l’inobservance.»

«Même parmi les patients qui étaient voués à la mort avant la greffe, nous avons constaté que 20 % à 30 % n’adhéraient pas à leur schéma immunosuppresseur post-transplantation», explique-t-elle. On a même rapporté chez certains patients que l’observance du traitement allait en diminuant malgré le fait qu’elle était surveillée.

Schémas immunosuppresseurs standard vs simplifiés

Le Dr Rutger Ploeg, Université de Groningue, Pays-Bas, et secrétaire général de l’ESOT, estime que la prise une fois par jour de capsules de tacrolimus à libération prolongée est une mesure importante pour lutter contre le problème grandissant de l’inobservance. Comparativement à la posologie biquotidienne, la prise d’un médicament une fois par jour multiplie par plus de deux la probabilité d’observance du traitement prescrit. Le tacrolimus à libération prolongée est le premier inhibiteur de la calcineurine conçu expressément pour l’administration une fois par jour. Ses paramètres pharmacocinétiques, son innocuité et son efficacité sont comparables à ceux de la préparation classique à deux prises par jour.

«Nous utilisons maintenant des schémas médicamenteux très complexes chez chaque patient, note le Dr Ploeg. L’un des revers de ces protocoles très complexes est la probabilité considérablement plus élevée d’inobservance du traitement. Il ressort de la recherche que 20 % à 50 % des greffés d’organes ne prennent pas leur médicament comme il se doit; or, on sait qu’il suffit de rater quelques doses du traitement immunosuppresseur de fond pour augmenter le risque de rejet aigu tardif du greffon chez un transplanté. Il est donc essentiel d’accroître l’observance du traitement pour prolonger la survie du greffon.»

S’il est difficile de quantifier le pourcentage de pertes de greffon attribuables à l’inobservance chez les transplantés, il est encore plus difficile de reconnaître les patients exposés à un risque accru d’inobservance, enchaîne le Dr Arthur Matas, directeur, service de transplantation rénale, University of Minnesota, Minneapolis. Néanmoins, une étude de Dew et al. (Liver Transpl 2006;12:1736-40) a révélé que 22 % des transplantés n’adhéraient pas à leur traitement immunosuppresseur et que les transplantés rénaux étaient les plus à risque.

Résultats comparables

Les résultats des études de pharmacocinétique, des essais cliniques de phase II et d’un essai de phase III ont clairement montré que le tacrolimus à libération prolongée et à une prise par jour est l’équivalent thérapeutique de la préparation standard à deux prises par jour sur le plan de l’ASC0-24 chez les transplantés rénaux de novo, fait observer le Dr Bernhard Krämer, directeur, néphrologie et transplantation rénale, Hôpital universitaire de Ratisbonne, Allemagne.

«De plus, poursuit-il, les concentrations minimales de tacrolimus que l’on obtient après l’administration des deux préparations sont hautement corrélées avec l’ASC0-24, ce qui semble indiquer que les concentrations minimales de tacrolimus dans le sang entier pourraient facilement servir de marqueur de substitution de l’ASC0-24 pour la nouvelle préparation de tacrolimus à une prise par jour.»

Lors de l’essai de phase III qui visait à comparer les deux préparations de tacrolimus avec la cyclosporine (CsA) en microémulsion, explique le Dr Krämer, 638 adultes transplantés rénaux de novo ont été randomisés de façon à recevoir la préparation à libération prolongée et à une prise par jour (0,15 à 0,20 mg/kg), la préparation de tacrolimus à deux prises par jour (0,075 à 0,10 mg/kg) ou la CsA (4 à 5 mg/kg) en deux doses égales. Tous les patients recevaient un traitement d’induction standard par le basiliximab, du mofétil mycophénolate (MMF) et des corticostéroïdes (CS). Le paramètre principal était le taux d’échec de l’efficacité à un an.

«Le taux d’échec de l’efficacité post-transplantation à un an était comparable dans le groupe tacrolimus à libération prolongée [14 %], le groupe tacrolimus standard à deux prises par jour [15,1 %] et le groupe CsA [17 %]», souligne-t-il (Figure 1). «Par contre, le taux de 14 % de rejets aigus confirmés par biopsie à un an était plus élevé dans le groupe CsA que dans le groupe tacrolimus à une prise par jour (10 %) ou standard (7,5 %), ce qui dénote une supériorité statistiquement significative [p£0.04] de la préparation standard de tacrolimus par rapport à la CsA [Figure 2]. Les taux de survie à un an du patient et du greffon se chiffraient respectivement à 98,6 % et à 96,7% dans le groupe tacrolimus à libération prolongée, à 95,7 % et à 92,9 % dans le groupe tacrolimus standard ainsi qu’à 97,6 % et à 95,7 % dans le groupe CsA.»

Figure 1. Taux d’échec de l’efficacité post-transplantation à un an


Par ailleurs, note-t-il, le profil d’innocuité de la préparation à libération prolongée est comparable au profil d’innocuité établi de la préparation à deux prises par jour. «Sur le plan de la fonction rénale à deux ans, le taux sérique de créatinine – qui permet d’estimer le débit de filtration glomérulaire – était excellent et très semblable dans les deux groupes.»

Les études de phase II ont montré que, chez un transplanté rénal stable, on peut sans problème passer de la préparation à deux prises par jour à la préparation à libération prolongée afin de tirer avantage de la simplification de la posologie, précise le Dr Krämer. La posologie biquotidienne est convertie en posologie monoquotidienne milligramme pour milligramme, et bien que l’on puisse ajuster la posologie après la conversion de façon à maintenir les concentrations minimales, 70 % des transplantés rénaux n’ont pas eu besoin d’ajustement posologique par suite de l’évaluation des paramètres pharmacocinétiques. En outre, les chercheurs ont noté une forte corrélation entre l’exposition systémique (ASC0-24) et les concentrations minimales (Cmin) pour les deux préparations, de sorte que le système de surveillance du sang déjà en place pour l’administration de deux doses par jour a pu servir à l’administration d’une dose quotidienne unique de la préparation à libération prolongée.

Figure 2. Taux de
par biopsie à un an

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Le Pr Zbigniew Wlodarczyk, directeur de la chirurgie de transplantation, Université Nicolas Copernic, Torún, Pologne, a suivi 41 transplantés rénaux de novo pendant deux années complètes, à la suite d’une étude comparative et randomisée de six semaines sur les paramètres pharmacocinétiques. Les patients recevaient au départ une dose quotidienne de tacrolimus à libération prolongée de 0,15 mg/kg. Aucun décès ni perte de greffon ne sont survenus pendant la prolongation du traitement immunosuppresseur par le tacrolimus, de sorte que la survie des patients a été de 100 %. Quatre épisodes de rejet aigu ont été observés, dont trois ont été confirmés par biopsie, et tous ont répondu à la corticothérapie. La clairance de la créatinine est demeurée stable pendant toute la durée du suivi.

Il est essentiel d’améliorer l’observance pour prolonger la survie des patients et des greffons, de conclure le Dr Ploeg. Aux patients qui ont la chance de recevoir un organe, on se doit d’offrir le schéma post-transplantation le plus commode qui soit afin de favoriser le maintien de l’observance du traitement.

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