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Supplément de vitamine D : une dose suffisante est essentielle à la prévention des fractures

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - La 32e Assemblée annuelle de l’American Society for Bone and Mineral Research

Toronto, Ontario / 15-19 octobre 2010

Des taux sanguins suffisants de vitamine D – mesurés par le dosage sérique de 25(OH)D – sont essentiels à la santé osseuse et à la prévention d’événements connexes tels que l’ostéoporose (OP), les fractures et les chutes. Lorsqu’ils se sont penchés sur les dossiers de patients vus par divers spécialistes d’un hôpital, Egli et al. (résumé MO0326) ont constaté que parmi les 173 sujets de 65 ans ou plus qui présentaient une fracture de la hanche, plus de la moitié (51 %) présentaient une grave carence en vitamine D, c’est-à-dire un taux de 25(OH)D <30 nmol/L et 98 %, un taux<75 nmol/L. En outre, au cours des 10 années précédant leur fracture de la hanche, près de la moitié des sujets (47,4 %) avaient subi au moins une fracture confirmée et plus du tiers d’entre eux, une fracture non vertébrale.

La Dre Heike Bischoff-Ferrari, Universität Zürich, Suisse, a discuté au congrès d’une méta-analyse récente sur les suppléments oraux de vitamine D. Cette méta-analyse – qui regroupait 12 essais comparatifs avec randomisation dont l’effectif total dépassait 30 000 sujets de 65 ans ou plus – a révélé que les risques de fracture vertébrale et de fracture de la hanche avaient baissé – de 14 % et de 30 %, respectivement – uniquement chez les sujets des quartiles dont l’apport en vitamine D était le plus élevé. Les doses nécessaires à l’atteinte de ces objectifs variaient entre 792 et 2000 UI/jour. Pareilles doses donneraient probablement lieu à des taux de 25(OH)D de 75 nmol/L ou plus, précise la Dre Bischoff-Ferrari.

On sait déjà qu’un taux suffisant de vitamine D permet de prévenir les fractures, mais on a aussi démontré qu’un supplément de vitamine D3 à forte dose réduisait significativement les blessures résultant de chutes chez des sujets de 65 ans ou plus. Un effet protecteur a été observé en moins de 12 mois. Inversement, un faible taux de 25(OH)D (<50 nmol/L) a été lié à un risque élevé de syndrome de fragilité chez les hommes, quoique la corrélation ait été un peu plus faible chez les femmes.

Les résultats de l’étude LASA (Longitudinal Aging Study Amsterdam) (Am J Clin Nutr 2006;84[3]:616-22) ont révélé qu’un taux sérique de 25(OH)D <25 nmol/L – par comparaison à un taux >75 mmol/L – était associé à un risque 3,5 fois plus élevé d’admission à un centre de soins de longue durée sur une période de 6 ans.

En revanche, de très fortes doses de vitamine D3 orale semblent exercer un effet négatif sur les chutes et les fractures chez les femmes âgées. Lors de l’étude VITAL D dont les résultats ont été présentés par Sanders et al. (résumé 1164), 2256 femmes vivant à domicile (âge médian de 76 ans) ont été randomisées de façon à recevoir par voie orale une dose unique de 500 000 UI de cholécalciférol ou un placebo chaque automne/hiver pendant 3 à 5 ans. Les chutes et les fractures ont été consignées sur des calendriers mensuels pendant 4 à 6 ans. Les détails étaient confirmés lors d’un entretien téléphonique, et les fractures étaient confirmées par des radiographies. Les résultats ont montré que les chutes et les fractures avaient été plus nombreuses dans le groupe sous vitamine D : 83,4/100 années-personnes vs 72,7/100 années-personnes sous placebo. Dans le groupe vitamine D, l’augmentation du taux de chutes était aussi plus marquée au cours des 3 premiers mois suivant l’administration de la dose, et l’incidence cumulative des premières chutes et celle des premières fractures étaient toutes deux plus élevées.

La plupart des experts affirment maintenant qu’un taux sérique de 25(OH)D d’au moins 75 nmol/L est nécessaire au maintien de la santé osseuse. Comme le souligne le Dr David Goltzman, investigateur principal national, Étude canadienne multicentrique sur l’OP (CaMos) et professeur titulaire de médecine, Université McGill, Montréal, Québec, un taux de 25(OH)D <25 nmol/L dénote une carence en vitamine D et un taux compris entre 25 et 50 nmol/L, une insuffisance, alors qu’un taux de 50 à 75 nmol/L est considéré comme sous-optimal. Le seuil de toxicité présumé a été établi à 300 nmol/L.

Dans un pays nordique comme le Canada, ajoute le Dr Goltzman, il arrive que les taux de 25(OH)D atteignent des pics en été et qu’ils plongent en hiver. «La plupart des adultes ont besoin d’un supplément de vitamine D<sub>3</sub> parce que l’exposition aux rayons du soleil et l’alimentation ne suffisent pas à maintenir un taux [optimal] durant toute l’année», dit-il. Une dose de 800 UI/jour ou de 5600 UI/semaine est généralement nécessaire à l’atteinte d’un taux sérique de 25(OH)D =75 nmol/L.

Le traitement de l’ostéoporose au Canada

Afin de mieux comprendre comment on mesure le taux de vitamine D et comment on le redresse chez les patients ostéoporotiques au Canada, des chercheurs sous la direction du Dr Jonathan Adachi, professeur titulaire de médecine, McMaster University, Hamilton, Ontario, ont dressé le profil de 983 sujets suivis par 52 médecins de premier recours et spécialistes. Leur densité minérale osseuse (DMO) moyenne, que l’on a déterminée par le score T le plus récent, était de -2,15; 28 % des sujets de la cohorte avaient subi une fracture de fragilité. Près de 80 % des sujets recevaient un bisphosphonate (BP) et 85 % d’entre eux prenaient également des suppléments de calcium et de vitamine D. Une faible proportion de ces sujets (8,5 %) avait reçu des glucocorticoïdes pendant plus de 3 mois.

Le Dr Adachi a rapporté qu’environ la moitié seulement des sujets de l’étude prenaient une dose optimale (au moins 5600 UI/semaine) de vitamine D. Parmi les sujets dont le taux sérique de 25(OH)D avait été noté au dossier (les deux tiers de la population de l’étude), environ 50 % avaient un taux =80 nmol/L. Et parmi ces sujets dont le taux sérique était faible, plus de 75 % avaient reçu une ordonnance de 2800 UI/semaine de vitamine D. Il importe ici de souligner que les médecins traitants n’avaient pas recommandé d’augmentation de la dose du supplément de vitamine D chez près de la moitié des sujets dont le taux sérique de 25(OH)D était faible, même dans les cas où il était <50 nmol/L. «La plupart des médecins recommandent des suppléments de calcium et de vitamine D, mais le taux de vitamine D semble insuffisant chez la moitié des patients, y compris chez les plus de 40 % de patients à qui on avait prescrit un supplément de vitamine D d’au moins 2800 UI/semaine», font valoir les auteurs.

Dans la même étude, le schéma de traitement de l’OP a été évalué chez 769 sujets. L’augmentation de la DMO était insuffisante chez plus du tiers (37 %) des sujets, et le pourcentage de sujets dont le taux de vitamine D était insuffisant était similaire. Les auteurs ont conclu que l’augmentation insuffisante de la DMO résultait probablement de taux insuffisants de vitamine D.

Avantages éventuels d’un comprimé combiné

Au chapitre des suppléments de vitamine D, il arrive que les taux de persévérance et d’observance soient faibles, ce qui nuit à l’efficacité du traitement, comme l’ont démontré les auteurs de l’essai RECORD (Randomised Evaluation of Calcium Or vitamin D) (Lancet 2005;365:1621-8) ainsi que Jackson et ses collaborateurs (N Engl J Med 2006;354:669-83).

Un comprimé associant 70 mg d’alendronate et 5600 UI de vitamine D<sub>3</sub> pour administration hebdomadaire pourrait faire en sorte que les femmes atteintes d’OP atteignent un taux optimal de 25(OH)D. Ce traitement a été comparé au traitement usuel de l’OP dans le cadre d’un essai multicentrique, ouvert et international dirigé par le Dr Stuart Ralston, School of Molecular and Clinical Medicine, Western General Hospital, Édimbourg, Royaume-Uni. En tout, 515 femmes ménopausées (âge moyen de 73 ans) exposées à un risque accru de chute ont reçu aléatoirement l’un ou l’autre des deux traitements durant une première étude de 6 mois, puis durant une prolongation de 6 mois. La plupart des femmes du groupe de soins usuels prenaient un supplément de vitamine D quelconque, mais les doses variaient grandement. En tout, 228 participantes ont été traitées pendant 1 an.

Au départ, les femmes de chaque groupe avaient un taux de 25(OH)D <20 ng/mL. Après 6 mois, les femmes recevant le traitement combiné à prise hebdomadaire étaient significativement moins nombreuses à avoir un taux sérique de 25(OH)D <20 ng/mL (8,6 % vs 31 % dans le groupe soins usuels). La différence était toujours significative à 12 mois : 11,3 % dans le groupe alendronate/vitamine D vs 36,9 % dans le groupe soins usuels. Après 12 mois de traitement, chez les femmes du groupe recevant le comprimé combiné, on a aussi enregistré un gain significativement plus marqué de DMO de la colonne lombaire (2,2 % vs 1,5 %) et une tendance à la hausse du gain de DMO dans l’ensemble de la hanche. Tant à 6 qu’à 12 mois, la diminution en pourcentage du taux urinaire de télopeptides N du collagène de type 1 et du taux sérique de phosphatase alcaline osseuse, par rapport aux valeurs initiales, était significativement plus marquée dans le groupe recevant le comprimé combiné que dans le groupe témoin. Les chercheurs n’ont observé aucune différence cliniquement importante entre les deux traitements quant à l’innocuité ou à la tolérabilité.

Résumé

Un apport suffisant de vitamine D permet de prévenir l’OP et, en association avec un bisphosphonate, de la traiter. En général, une dose de 800 UI/jour est nécessaire à l’atteinte du taux sérique optimal de 25(OH)D, c’est-à-dire au moins 75 nmol/L. Le congrès de l’American Society for Bone and Mineral Research a bien sûr été le théâtre de nombreuses discussions sur un vaste éventail de sujets, mais le présent compte rendu ne visait qu’à résumer quelques-unes des présentations sur l’utilisation de la vitamine D en monothérapie et en association avec un BP.

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