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Traitement antimicrobien optimal des infections à SARM : concordance des données d’observation et des recommandations de pratique clinique

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

PRESSE PRIORITAIRE - 21e Congrès européen de microbiologie clinique et d’infectiologie/ 27e Congrès international de chimiothérapie

Milan, Italie / 7-10 mai 2011

En présence de Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM), la vancomycine demeure l’agent le plus utilisé, même si elle ne semble pas un choix optimal au regard de ses propriétés pharmacodynamiques, puisque de nombreuses souches ont une sensibilité diminuée à la vancomycine.

On dispose maintenant d’autres options, comme la daptomycine et le linézolide. Dans ses recommandations de janvier 2011, l’Infectious Diseases Society of America (IDSA) suggère, parmi les traitements de deuxième intention contre le SARM, la daptopmycine i.v. à raison de 4 mg/kg/jour dans les infections de la peau et des tissus mous (IPTM) compliquées chez les patients hospitalisés; de 6 à 10 mg/kg/jour dans les bactériémies et les endocardites infectieuses (chez les adultes et les enfants); et de 6 mg/kg/jour dans les infections ostéoarticulaires, y compris les infections sur matériel prothétique.

À l’instar des recommandations de l’IDSA, les nouvelles données présentées au congrès mettent en lumière l’efficacité de cet antimicrobien en cas d’infection à Gram positif, telle une endocardite, une bactériémie, une IPTM ou une ostéomyélite, chez un patient neutropénique.

Pharmacodynamie et puissance

S. aureus est le micro-organisme le plus souvent isolé dans les IPTM, et la prévalence des SARM d’origine nosocomiale et communautaire est en progression rapide. Bien que la vancomycine et la téicoplanine, deux glycopeptides, soient considérées comme la norme dans le traitement des infections à SARM graves, l’utilité actuelle de ces agents est de plus en plus remise en question, affirme le Dr Matteo Bassetti, Division d’infectiologie, Hôpital San Martino, Gênes, Italie. Les résultats médiocres associés à la vancomycine dans les infections à SARM font ressortir le besoin de nouvelles options pour le traitement, mais également pour l’antibiothérapie empirique lorsqu’on soupçonne S. aureus, s’accordent à dire les experts.

Antibiotique rapidement bactéricide et actif contre les cocci à Gram positif, le SARM y compris, la daptomycine pourrait offrir davantage que ses homologues dans le traitement des IPTM compliquées, en permettant par exemple une guérison clinique plus rapide et en diminuant le besoin d’un traitement prolongé, estime le Dr Bassetti.

La puissance d’un antimicrobien est souvent définie par des paramètres pharmacodynamiques, comme le temps pendant lequel sa concentration plasmatique est supérieure à la concentration minimale inhibitrice (CMI), de même que l’atteinte et le maintien d’un creux plasmatique adéquat. Cela dit, pour certaines infections comme pour certains agents, d’autres facteurs entrent en ligne de compte, l’activité bactéricide par exemple, explique le Dr David Livermore, Health Protection Agency, Microbiology Services, Colindale, Londres, Royaume-Uni. C’est le cas pour les endocardites, les bactériémies sévères et les infections au cours desquelles les défenses de l’hôte sont gravement compromises (p. ex., neutropénies fébriles).

Ainsi, dans l’endocardite staphylococcique, l’efficacité clinique en monothérapie a été démontrée avec la daptomycine, un agent rapidement bactéricide, mais pas avec le linézolide, un agent bactériostatique. Dans les cas où l’activité bactéricide est moins cruciale, comme la pneumonie à SARM, le linézolide est plus efficace que la vancomycine, qui a une activité bactéricide faible, indique-t-il.

Au cours des premières 24 heures, il est essentiel de choisir le bon antibiotique et d’atteindre la cible pharmacodynamique prédictive de l’efficacité, confirme le Dr Alex Soriano, Département d’infectiologie, Hôpital clinique de Barcelone, Espagne. À titre d’exemple, il cite le taux élevé de mortalité associé aux bactériémies à S. aureus qu’il impute en partie à la faible probabilité que la vancomycine atteigne la cible pharmacodynamique (ASC24/CMI =400 µg/mL) au cours des premières 24 heures à la dose standard (1 g/12 h). Viser des creux plasmatiques supérieurs en augmentant la dose quotidienne de vancomycine lorsque la CMI est =1 µg/mL peut certes accroître cette probabilité, concède-t-il, mais le risque accru de néphrotoxicité alors associé à la dose nécessaire exclut généralement cette approche.

Analyse des données d’un registre européen

Au vu des données du registre EU-CORE (European Cubicin Outcomes Registry and Experience), la daptomycine affiche un taux élevé de réussite clinique et est bien tolérée chez les patients neutropéniques atteints d’infections à Gram positif.

Parmi les 259 patients du registre qui souffraient de neutropénie au départ et au cours du traitement, le taux de réussite clinique global (guérison ou amélioration) a atteint 76 %, rapporte la Dre Tetjana Lejko-Zupanc, Département d’infectiologie, Centre médical universitaire de Ljubljana, Slovénie. Le taux de réussite clinique a atteint 79 % dans les cas de bactériémie sur cathéter, 74 % dans les IPTM à Gram positif, 100 % dans les endocardites et 80 % dans les ostéomyélites.

«Si on considère les infections à SARM, certains des isolats peuvent nécessiter une CMI élevée, de sorte que la vancomycine n’est vraiment pas appropriée, souligne la Dre Lejko-Zupanc. Chez les patients atteints d’une infection à entérocoques résistants à la vancomycine, même s’ils étaient peu nombreux dans ce registre, on ne peut pas utiliser la vancomycine ni la téicoplanine. Si le patient souffre de bactériémie, c’est l’impasse, puisque l’option restante, le linézolide, n’est pas envisageable chez ces patients.» Les autres agents aptes à traiter les infections à Gram positif, en particulier la vancomycine, semblent plus toxiques, indique-t-elle. Parmi les patients neutropéniques du registre, 12 % ont eu des effets indésirables graves, reliés ou non par la daptomycine.

L’activité bactéricide rapide concentration-dépendante de la daptomycine plaide vigoureusement en faveur du traitement à forte dose des infections difficiles à traiter, ont fait valoir le Dr Riccardo Utili et ses collègues, Université de Naples, Hôpital Monaldi, Italie, dans une communication par affiche.

Dans une autre étude sur le registre EU-CORE, l’antimicrobien administré à une dose =8 mg/kg a été associé à un taux de réussite clinique élevé tout en étant bien toléré chez les patients atteints d’une infection à Gram positif grave, et ce, quel que soit l’agent infectieux en cause. Le taux de réussite clinique global parmi les 270 patients qui ont reçu une dose d’au moins 8 mg/kg (durée médiane : 14 jours, durée maximale : 110 jours) était de 80 %, allant de 65 % (ostéomyélite) à 90 % (endocardite). Quant aux taux de réussite clinique calculés selon l’agent infectieux principalement en cause, ils s’établissaient à 78 % pour S. aureus (sans égard à la résistance ou à la sensibilité à la méthicilline), à 86 % pour les staphylocoques à coagulase négative et à 77 % pour les entérocoques. Comparativement aux doses =8 mg/kg, les fortes doses n’ont pas été associées à une fréquence supérieure d’effets indésirables graves ni à un plus grand nombre d’abandons pour cause d’effets indésirables, signalent les auteurs.

Option de traitement efficiente en ambulatoire

L’hospitalisation est le principal déterminant des coûts de santé liés aux infections par des cocci à Gram positif, en particulier les SARM. L’antibiothérapie parentérale ambulatoire est habituellement réservée à certains cas d’infections à Gram positif, notamment les IPTM et les infections ostéoarticulaires.

Dans les cas d’infections à Gram positif compliquées, on peut traiter avec succès certains patients en contexte ambulatoire, soit d’emblée, soit après un séjour à l’hôpital, observe le Dr Armando Gonzalez-Ruiz, Darent Valley Hospital, Dartford, Royaume-Uni. À titre d’option de traitement efficiente, la daptomycine «administrée en perfusion i.v. de 2 minutes 1 fois/jour se prête tout particulièrement au traitement ambulatoire de certaines infections habituellement rencontrées en clinique externe», poursuit-il.

Dans l’étude, la durée médiane du traitement était de 14 jours en contexte ambulatoire, de 10 jours en contexte mixte et de 10 jours en contexte hospitalier. Les taux de réussite clinique étaient globalement élevés pour toutes les infections, et les résultats ont fait ressortir une tendance vers des taux plus élevés chez les patients ayant été traités au moins en partie en contexte ambulatoire (Tableau 1). Des effets indésirables graves sont survenus chez 2,7 % des patients traités en ambulatoire et 9,7 % des patients traités à l’hôpital.


Expérience aux États-Unis

Dans le cadre du Programme de surveillance de la daptomycine (2002-2010), des chercheurs ont évalué 14 044 souches d’entérocoques et de streptocoques provenant d’hôpitaux des États-Unis. Plus de 99 % des souches (y compris des entérocoques résistants à la vancomycine et des streptocoques ß-hémolytiques et viridans) étaient sensibles à cet antibactérien, rapportent le Pr Helio S. Sader et ses collègues, JMI Laboratories, North Liberty, Iowa.

À la lumière de l’expérience en Europe et aux États-Unis et des recommandations de l’IDSA, il apparaît tout à fait licite d’espérer améliorer l’issue du traitement et diminuer le coût total des soins dans la prise en charge des infections à SARM et d’autres infections difficiles à traiter.

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