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Vers la cicatrisation de la muqueuse dans la colite ulcéreuse

Le présent compte rendu est fondé sur des données médicales présentées lors d'un congrès de médecine reconnu ou publiées dans une revue avec comité de lecture ou dans un commentaire signé par un professionnel de la santé reconnu. La matière abordée dans ce compte rendu s'adresse uniquement aux professionnels de la santé reconnus du Canada.

FRONTIÈRES MÉDICALES - 111e Semaine annuelle des maladies digestives (DDW)

La Nouvelle-Orléans, Louisiane / 1er-5 mai 2010

Dans la colite ulcéreuse (CU), les principes jugés essentiels à la cicatrisation de la muqueuse par un traitement d’induction à base d’une préparation d’acide 5-aminosalicylique (5-ASA, mésalamine) à libération retard ou prolongée semblent s’appliquer aussi au traitement d’entretien. L’essai SIMPLE (Strategies in Maintenance of Patients receiving Long-term thErapy) – qui vient tout juste de prendre fin – a démontré que la mésalamine permettait d’obtenir une cicatrisation durable lorsqu’elle était administrée à doses suffisantes selon un mode d’administration approprié à des patients observants, peu importe comment la cicatrisation avait initialement été obtenue. Lors de l’essai SIMPLE, la cicatrisation de la muqueuse était le seul critère de jugement de l’efficacité. D’ailleurs, ce paramètre est de plus en plus considéré comme la référence pour prouver que la maîtrise de la maladie est optimale. Au cours du traitement d’entretien, cependant, l’observance du traitement est un facteur clé de plus pour l’obtention d’un bénéfice durable.

«Les cliniciens commencent à comprendre que, dans la CU, l’inobservance est la raison pour laquelle un fort pourcentage de patients rechutent. C’est vraiment le facteur clinique sur lequel on doit agir pour améliorer les résultats», affirme la Dre Sunanda V. Kane, Département de gastroentérologie, Mayo Clinic, Rochester, Minnesota. En sa qualité d’auteure principale de l’étude SIMPLE, dont l’objectif était d’évaluer l’inobservance en tant que facteur de risque de rechute, la Dre Kane a réussi à prouver qu’en persuadant les patients de suivre à la lettre le schéma prescrit, on peut influer grandement sur la durabilité du bénéfice, même lorsqu’on utilise un agent à forte dose conçu pour libérer de la mésalamine dans l’ensemble du côlon. Elle insiste sur le fait que certaines variables comme la posologie uniquotidienne et l’amélioration marquée de la qualité de vie influent à la fois sur l’observance et la maîtrise durable de la maladie.

Résultats de l’étude SIMPLE

SIMPLE était un essai de phase IV multicentrique d’assez grande envergure dont l’objectif était d’évaluer l’efficacité d’un traitement d’entretien en une prise par jour reposant sur une préparation de mésalamine dotée du système multi-matrice (MMX) pour libérer l’ingrédient actif au niveau du côlon. Deux groupes de patients ont été évalués : le premier se composait de patients dont la CU était déjà quiescente, peu importe le traitement qu’ils avaient reçu pour parvenir à la quiescence, tandis que le deuxième se composait de patients dont la CU était en phase aiguë lorsqu’ils ont commencé à participer à l’étude sur la mésalamine MMX. Le paramètre principal était la rechute clinique à six et à 12 mois, celle-ci se définissant soit comme au moins quatre selles de plus par jour que la fréquence normale du patient, soit comme des selles impérieuses ou accompagnées de douleurs abdominales ou de rectorragies. À leur admission à l’étude de même qu’après huit semaines de traitement par la mésalamine MMX, tous les sujets avaient un score de 0 selon l’indice d’activité de la maladie (UCDAI), tant pour le nombre de selles que pour les rectorragies. Tous les participants à cette étude ouverte recevaient 2,4 g de mésalamine MMX une fois par jour.

Tant à six qu’à 12 mois, les taux d’efficacité globale excédaient 60 %, peu importe que les patients aient été admis à l’étude alors que leur maladie était déjà quiescente ou que leur maladie soit devenue quiescente sous mésalamine MMX. À six mois, 76,1 % des patients déjà en phase quiescente à leur admission et 77,8 % de patients initialement en phase aiguë n’avaient eu aucune rechute clinique (Figure 1). À 12 mois, ces taux se chiffraient à 63,3 % et à 67,3 %. La Dre Kane en a conclu que la mésalamine MMX était d’efficacité comparable, qu’elle ait été administrée d’emblée ou non pour maîtriser la maladie. Cependant, précise-t-elle, la proportion de patients demeurés libres de rechute était beaucoup plus forte parmi les patients observants, l’observance ayant été définie comme la prise d’au moins 80 % des doses uniquotidiennes.

«Tant à six qu’à 12 mois, la comparaison des patients a révélé que les rémissions durables étaient significativement plus nombreuses parmi ceux qui répondaient aux critères de l’observance», poursuit la Dre Kane. Bien qu’il n’y ait pas eu de différence entre les patients déjà en phase quiescente à leur admission ou parvenus à la phase quiescente après avoir reçu de la mésalamine MMX en phase aiguë, la maladie n’avait toujours pas récidivé à six mois chez 79,4 % de ceux qui avaient pris au moins 80 % de leurs doses, vs 63,9 % de ceux qui en avaient pris moins (p=0,0476). À 12 mois, l’écart était encore plus marqué : 68,8 % vs 47,5 % (p=0,012) (Figure 2).

Figure 1. SIMPLE : Rechutes cliniques après six mois de traitement d'entretien par la mésalamine MMX*


Figure 2. SIMPLE : L'im
ce pour la rémission

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Prise en charge de la maladie : nouveau schème de références

Le lien entre observance et résultats n’a rien d’étonnant, mais l’observance joue aussi un rôle clé dans la transition vers un nouveau schème de références dans la prise en charge de la CU. Si le soulagement des symptômes était jadis un critère acceptable de jugement de l’efficacité, le lien avéré entre la cicatrisation complète de la muqueuse et la diminution des complications subséquentes, dont la colectomie, a délogé le soulagement des symptômes en tant que marqueur clé de l’efficacité. D’abondantes données ont montré que la mésalamine pouvait mener à une cicatrisation complète de la muqueuse si elle était administrée en préparation dotée d’un système de libération continue qui achemine une dose suffisante d’ingrédient actif dans l’ensemble du côlon.

Lors de l’une des deux études multicentriques sur la mésalamine MMX dont les résultats ont été publiés il y a trois ans, le taux de cicatrisation de la muqueuse après huit semaines de traitement était presque deux fois plus élevé dans le groupe sous traitement actif que dans le groupe placebo (41 % vs 22 %; p=0,007) (Kamm et al. Gastroenterology 2007;132:66-75). L’autre préparation de mésalamine évaluée dans le cadre de l’étude était associée à un taux de cicatrisation de seulement 33 % et ne s’était pas révélée supérieure au placebo.

La supériorité de la mésalamine MMX sur le placebo était d’ampleur similaire dans la deuxième étude (34 % vs 13 %; p<0,01) (Lichtenstein et al. Clin Gastroenterol Hepatol 2007;5:95-102). Lors de ces deux études, la cicatrisation complète se définissait comme l’absence de friabilité de la muqueuse et une baisse d’au moins un point du score à la sigmoïdoscopie par rapport au score initial. À l’époque, cette définition était extraordinairement rigoureuse, mais avec le temps, d’autres chercheurs l’ont adoptée pour leurs essais d’efficacité sur la CU, la cicatrisation de la muqueuse ayant fait la preuve de son importance pronostique.

Bien que l’étude SIMPLE n’ait pas comporté de sigmoïdoscopie de contrôle, la Dre Kane a rapporté qu’à en juger par les données antérieures, le 5-ASA est efficace pour cicatriser la muqueuse. Chez ses propres patients, a-t-elle expliqué à l’auditoire, elle se fait un devoir de viser la cicatrisation de la muqueuse plutôt qu’un simple soulagement des symptômes.

«Il n’est pas pratique de réaliser une sigmoïdoscopie chez tous les patients atteints de CU afin de s’assurer de la cicatrisation après un traitement de courte durée, mais il m’arrive souvent de faire une endoscopie lors d’une visite de suivi six mois ou plus après le début du traitement d’entretien afin de voir si la cicatrisation persiste. Il est évidemment plus probable que je fasse une seconde endoscopie si le patient présente des symptômes, mais il n’est pas impossible que je modifie le traitement si je vois des signes d’activité de la maladie à la sigmoïdoscopie, même en l’absence de symptômes», fait valoir la Dre Kane. Cela dit, «la plupart du temps, c’est le patient qui n’a pas adhéré à son traitement, si bien que la solution n’est pas de modifier le traitement, [mais bien] d’éduquer le patient quant au risque de rechute à défaut d’une observance rigoureuse du schéma prescrit».

Un expert du Canada a exprimé un point de vue semblable sur le rôle de la cicatrisation de la muqueuse et sur l’importance d’envisager des stratégies thérapeutiques dans le contexte de ce paramètre. Lorsqu’on lui a demandé son point de vue sur l’évolution des objectifs du traitement, le Dr Remo Panaccione, directeur de la Clinique des maladies inflammatoires de l’intestin (MII), University of Calgary, Alberta, a répondu que divers facteurs concourent à la plus grande importance maintenant accordée à la cicatrisation complète de la muqueuse, non seulement dans la CU, mais dans toutes les autres MII.

«La cicatrisation de la muqueuse est devenue l’un des principaux objectifs du traitement dans les MII, tant la maladie de Crohn que la CU. On traite maintenant la maladie et non plus seulement ses symptômes, et c’est à ce chapitre que la cicatrisation de la muqueuse entre en jeu. Dans la CU, c’est peut-être encore plus pertinent, parce que la CU est une maladie qui affecte principalement la muqueuse. Une muqueuse cicatrisée signifie donc que la maladie a été bien traitée. La cicatrisation de la muqueuse est aussi associée à une diminution potentielle des rechutes, du risque de dysplasie ou de cancer et du risque de colectomie», fait remarquer le Dr Panaccione. Bien qu’il ne soit pas en accord total avec la position de la Dre Kane au sujet d’une endoscopie de second regard à six mois, il souligne comme elle l’importance de la cicatrisation en tant qu’objectif ultime du traitement.

Une définition plus stricte de la maladie «ne signifie pas forcément que nous devrions faire une endoscopie systématique pour s’assurer de la cicatrisation de la muqueuse, enchaîne le Dr Panaccione, mais le gastro-entérologue devrait être davantage à l’affût des symptômes subtils d’une activité persistante de la maladie et, le cas échéant, il devrait confirmer ses soupçons à l’aide d’une coloscopie. En outre, lorsqu’il choisit un traitement, le médecin devrait opter pour des médicaments qui se sont révélés capables de non seulement soulager les symptômes, mais aussi de cicatriser la muqueuse.»

L’importance critique de l’observance

La mésalamine MMX est efficace pour faire cicatriser la muqueuse chez la majorité des patients atteints de CU, mais la cicatrisation présuppose l’observance du traitement. La posologie uniquotidienne, par exemple, est un avantage qui s’est à maintes reprises révélé essentiel à l’observance du traitement, souligne la Dre Kane, mais d’autres attributs du traitement pourraient aider les patients à faire un lien entre observance rigoureuse et meilleurs résultats. En particulier, poursuit-elle, l’efficacité perçue du traitement peut être un facteur de motivation. Lors de la phase d’induction de l’étude SIMPLE, la fréquence des défécations et les rectorragies se sont normalisées chez 40 % des patients en une semaine. Le délai médian de résolution de ces symptômes a été de 22 jours.

«Bien qu’il ne soit pas écrit noir sur blanc que le début d’action influe sur l’observance du traitement dans la CU, l’action rapide de la mésalamine MMX sur les symptômes cliniques ne peut probablement avoir qu’un effet positif sur l’attitude du patient à l’égard de son traitement», fait remarquer la Dre Kane. Lorsqu’on enseigne au patient à quel point il est important d’adhérer au traitement, on doit lui faire comprendre que la non-adhésion au traitement qui a soulagé ses symptômes pourrait entraîner la réapparition de ces mêmes symptômes. Cette information pourrait aider à dissuader le patient de relâcher son observance du traitement lorsque ses symptômes se résorberont.

Les données sur la qualité de vie issues de l’étude SIMPLE font ressortir le lien entre poursuite d’un traitement efficace et absence de maladie. Lors de la phase d’induction, on a observé une corrélation significative entre une amélioration significative des paramètres d’évaluation de la qualité de vie liée à la santé (QVs) et une activité moindre de la maladie. Les données subséquentes sur le traitement d’entretien issues de l’étude SIMPLE ont fait ressortir la même corrélation significative entre une diminution de l’activité de la maladie et l’amélioration de la QVs. Il est bien établi que la CU mine la QVs. Or, chez les patients sous mésalamine MMX, non seulement la quasi-totalité des aspects de la QVs se sont-ils améliorés de façon significative, mais ces patients ont atteint un niveau de QVs comparable ou supérieure à ce que l’on observe dans la population générale.

«En tant que cliniciens, nous devons aider les patients à comprendre le lien entre le traitement et le maintien du bien-être. Nous savons que les patients qui demeurent longtemps sans symptômes commencent à devenir non observants parce qu’ils pensent ne plus avoir besoin de leur médicament. Nous avons maintenant des données de l’étude SIMPLE qui semblent indiquer que de nombreux échecs du traitement d’entretien par le 5-ASA sont dus à l’inobservance. Une meilleure éducation du patient nous permettrait peut-être de remédier à ce problème», estime la Dre Kane.

L’observance pourrait jouer un rôle encore plus grand, l’objectif actuel du traitement étant l’obtention et le maintien de la cicatrisation de la muqueuse. La théorie voulant que l’homéostasie inhérente au tissu sein fasse obstacle au retour de l’activité de la maladie pourrait aider à expliquer l’importance de la cicatrisation de la muqueuse. À partir du moment où apparaissent les phénomènes moléculaires sous-jacents à l’expression de la maladie, la cascade inflammatoire qui perturbe l’intégrité de la muqueuse met du temps à se résorber, même sous traitement.

«Le traitement de première intention de la CU, à savoir le 5-ASA, est efficace pour l’obtention et le maintien de la cicatrisation de la muqueuse chez un fort pourcentage de patients atteints de CU légère ou modérée, mais encore faut-il que la préparation choisie facilite leur observance du traitement. De toute évidence, c’est un enjeu important», affirme la Dre Kane avec insistance.

Résumé

De nouvelles données d’une étude de phase IV confirmant qu’une observance à 80 % ou plus du schéma prescrit de mésalamine MMX réduit le risque de rechute soulignent l’importance d’administrer une dose suffisante dans l’ensemble du côlon pour faire cicatriser la muqueuse et ainsi faire obstacle à la rechute. On a constaté que cet agent pouvait prévenir la rechute chez presque 70 % des patients qui avaient adhéré à leur traitement d’entretien pendant 12 mois, peu importe que la maladie ait atteint le stade de la quiescence à l’aide de la mésalamine MMX ou d’une autre préparation de 5-ASA. Il a été proposé qu’on insiste sur le lien entre maîtrise de la maladie et efficacité d’un traitement en une prise par jour pour enseigner aux patients le rôle clé de l’observance dans la maîtrise durable de la maladie.

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